Chapitre 1

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Par cette belle matinée, Iris conduisait tranquillement. Elle s'arrêta sur le parking du lycée. Elle sortit de sa Citroën grise et changea ses lunettes de vue ronde contre des lunettes de soleil. Elle ouvrit ensuite son coffre pour en sortir sa valise avant de se diriger vers le lycée. C'était une jeune fille de dix-huit ans, aux cheveux châtains foncés, coupés au carré, qui ne passait pas inaperçue avec sa mèche bleue foncée. Assez grande avec des yeux bleus clair, elle était plutôt jolie mais comme elle se désintéressait des garçons, elle ne se préoccupait pas de son apparence. C'était la veille de la rentrée et elle se dirigeait tranquillement vers l'entrée du lycée de Loches. Après avoir traversé la passerelle qui enjambait la route et passé le portail, elle arriva devant le bâtiment principal et elle s'arrêta pour le regarder ; c'était un lycée  assez banal, aux murs blancs et orange, avec plusieurs bâtiments. Elle le connaissait par cœur, cela faisait deux ans qu'elle y étudiait. Même s'il n'était pas très grand, il lui avait fallu un bon mois pour s'y repérer. Elle se souvenait encore de son premier jour. Après être descendue du bus, elle avait marché seule, en suivant les autres élèves et elle avait été regarder quelle était sa classe au cas où elle aurait reconnu des noms de ses années précédentes. Elle avait regardé le nom des gens dans sa classe, à cette époque, elle pensait encore que les choses se passeraient différemment, qu'elle se ferait des amis, qu'elle s'amuserait... Mais elle était aussi seule aujourd'hui qu'elle l'était avant d'arriver en seconde. Elle connaissait tout le monde, en terminal mais personne ne la connaissait, elle. Elle était la fille invisible. L'intello timide. Elle espérait comme cette année pourrait être différente des autres, qu'elle pourrait se faire des amis... Mais pour être tout à fait honnête avec elle-même, elle devait bien s'avouer qu'elle ne faisait pas de gros efforts pour ça. Elle préférait rester à l'écart, en compagnie d'un bon livre.
Elle se dirigea naturellement vers l'accueil, dont elle connaissait le chemin par coeur. Elle poussa la porte après avoir frappé et se dirigea vers un bureau où une femme, qu'elle reconnu de ses années précédentes, était assise avec une énorme pile de dossiers devant elle. Elle se demanda comment il était possible que cette pile tienne debout, ce qui la fit sourire.
- Bonjour. Dit timidement Iris
La femme ne lui répondit pas, ne releva même pas la tête, mais tendit la main pour prendre le dossier d'Iris. Elle devait avoir fait ça longtemps vu la pile devant elle, Iris ne releva donc pas son côté sec. Elle lui donna et repoussa sa mèche bleue qui était tombée devant son visage. Après quelques minutes, elle lui dit :
- Ton dossier est complet. Voici la clef de ta chambre, ta colocataire est en terminale elle aussi.
- D'accord, merci.
Elle prit sa clef et se rendit dans le bâtiment des dortoirs, à côté du bâtiment D. Elle regarda le numéro des chambres, elle croisa plusieurs élèves dans les couloirs et arriva enfin devant la sienne.
- Bon, pensa-t-elle, je vais devoir partager cette chambre avec une autre fille toute l'année, il faut que je fasse bonne impression. Non, laisse tomber, soit naturelle.
Elle soupira et frappa.
- Oui ? Répondit une voix à l'intérieur
Iris pris son courage à deux mains, ouvrit la porte et entra dans ce qui serait sa chambre durant cette année. Elle y découvrit une jolie blonde assez petite, aux yeux verts clair et portant une très jolie robe.
- Bonjour, je m'appelle Iris Paget, je suis ta colocataire. Se présenta-t-elle poliment
- Enchantée Iris, je suis Amélie Lavour.
Elle posa le tas de cahiers qu'elle tenait dans les bras pour lui tendre la main. Iris la prit timidement et se raidie quand elle sentie une sorte de légère décharge électrique lui traverser le bras. Elle savait ce que c'était bien sûr, elle avait déjà ressenti ça auparavant mais de rares fois seulement. Et elle le ressentait encore maintenant ! Cette sensation signifiait qu'elle avait en face d'elle une autre wiccane, une autre sorcière ! Elle ressentait maintenant la magie en Amélie, comme elle la sentait en elle-même. Elle n' allait pas être obligée de garder son secret pour elle. Iris sourit de toutes ses dents tant elle était heureuse. Se rendant compte qu'elles se tenaient encore la main, Amélie la lâcha et continua de ranger ses affaires comme si de rien était, à la grande surprise d'Iris. Comment se faisait-il qu'elle n'ai pas sentie cette décharge si particulière ? Et si elle l'avait sentie, pourquoi n'avait-elle pas réagi ? Un millier de questions face au comportement étrange d'Amélie assaillirent Iris quand soudain elle comprit : se pourrait-il qu'elle ne sache pas qu'elle était une wiccane ? C'était très probable, elle-même, si ses parents n'avaient pas été des wiccans, peut-être qu'elle ne l'aurait jamais su... Le fait de penser à ses parents la rendit triste. Elle ne savait pas quoi dire, elle ne trouvait pas les mots mais Amélie dit :
- Tu veux quel lit Iris ? J'attendais que tu arrives pour choisir.
- Heu, n'importe. Répondit-elle encore confuse
Amélie hocha la tête et posa sa valise sur l'un des lits. Iris fit de même en remettant ses lunettes de vue et les filles rangèrent leurs affaires en silence. La chambre aux papiers peints rose pâle était composée de deux lits, de deux tables de nuit, d'une petite fenêtre et d'une armoire pour que les filles puissent ranger leurs affaires. Iris n'était pas familière avec le fait d'engager la conversation, elle hésita à lui parler, elle avait du mal mais il fallait, mis à part le fait que la dénommée Amélie était une wiccane, qu'Iris s'ouvre aux autres. Au bout d'un moment, n'y tenant plus, Iris se retourna, son collier entre les doigts et demanda à Amélie de but en blanc
- Est-ce que tu sais ?
Amélie arrêta de ranger ses lives et demanda :
- Si je sais quoi ?
Iris s'approcha d'elle et lui toucha l'épaule, la décharge était moins forte mais Amélie la ressentit quand même.
- Tu est bourrée d'électricité statique. Dit la jeune fille blonde avec un mouvement de recul
- Ce n'est pas de l'électricité statique... Cela signifiait que tu es une...
- Une quoi ? Dit-elle à moitié amusée, à moitié curieuse...
Iris inspira et lâche :
- Une wiccane.
Amélie ne comprit pas.
- Une... quoi ?
- Une wiccane. Une sorcière !
Amélie éclate de rire, ne pouvant y croire, en montrant le livre qu'elle tenait dans la main :
- Quoi, comme dans Harry Potter ?
- Mais si, je t'assure que c'est vrai ! Bon, tu veux que je te le prouve ? Demanda Iris
- Vas-y ! S'exclama-t-elle avec un air de défi
Iris réfléchi à toute vitesse pour ne pas passer pour une folle, mais aussi pour ne pas trop l'effrayer. Elle se rappela soudain que les pouvoirs d'une wiccane non expérimentée peuvent comme « exploser » quand elle ressent des émotions fortes.
- Alors, voyons voir... Ah, je sais ! Tu vas te concentrer, fermes les yeux
Elle s'exécuta toujours en souriant.
- Tu vas essayer de ressentir toute la colère, tout le chagrin, toute la joie que tu as en toi et... et essayer de l'extérioriser.
Amélie baissa la tête en soufflant :
- C'est n'importe quoi...
- Ferme les yeux ! Ordonna Iris
Il était hors de question qu'elle passe pour une folle, elle savait qu'Amélie était une wiccane et elle allait lui prouver !
- Ok, ok !
Amélie referma les yeux et essaya de se concentrer pour faire plaisir à Iris.
- Elle est bizarre cette fille... Pensa-t-elle
- Alors laisse la exploser autour de toi.
Amélie sentit des picotements dans le bout des doigts et un énorme bruit de fracas retentit autour d'elles. Quand elle ouvrit les yeux, les fenêtres et les cadres photos avaient explosé. Il y avait pleins de morceaux de verre partout par terre.
- Mais... mais... qu'est ce qui s'est passé ? Demanda Amélie sous le choc
Iris s'approcha d'elle et dit :
- C'est toi qui a fait ça.
- Quoi ? Mais, comment ça ?
- C'est comme ça que se sont déclarés mes pouvoirs. Quand on ne sais pas comment les contrôler, nos pouvoirs peuvent éclater, comme ça. Comme te ne les as jamais utilisés, la magie c'est accumulée en toi et tes pouvoirs ne pouvaient qu'exploser.
- Tout va bien ? Demanda une voie dehors
Iris pointa vivement sa main vers la porte et le loquet se ferma tout seul.
- Oui, tout vas bien, un cadre est tombé. Dit Iris
- D'accord, bonne journée.
Elle attendit que la personne s'éloigne puis Iris se retourna et balaya le sol de la main. Les bouts de verre se remirent à leur place, quelques instants après, tout était réparé. Amélie n'avait pas bougé, elle regardait tout autour d'elle ébahie et perdu. Iris ne savait pas comment réagir face à ce genre de situations. Alors avec un grand effort, elle posa sa main sur son épaule.
- Est-ce que ça va... ?
- Je... je sais pas, c'est si énorme je... Je sais pas...
Amélie n'arrivait pas à trouver les mots, regardant autour d'elle, se demandant si tout cela était bien arrivé, si elle n'avait pas tout imaginé. Était-elle devenue folle, était-ce un rêve ? C'était trop inimaginable pour être vrai...
- C'est... wow, c,'est incroyable, souffla Amélie. Et... et je suis capable faire ça moi aussi ?
- Bien sûr ! Les sortilèges de base sont assez faciles. En fait, tous les wiccans possèdent plus ou moins le pouvoir de la télékinésie. Et il y a d'autres tours comme celui que j'ai fait mais c'est mon père qui m'a appris celui-là et je ne connais tous pas les autres.
- Okay...
Iris s'approcha d'Amélie et remarqua que celle-ci avait une coupure sur la joue.
- Elle n'est pas profonde, ça va mais ça saigne. Assied-toi, j'ai du désinfectant.
Amélie s'affala sur son lit, toujours confuse et Iris sorti de sa valise sa trousse à pharmacie. Elle posa délicatement un coton sur sa pommette et la blonde grimaça.
- Il y en a beaucoup d'autres ? Je veux dire, des wiccans ?
- Et bien, je sais qu'il y avait mes parents et qu'il y a ma cousine mais je sais qu'ils sont déjà allés à des covens.
- Des quoi ? Demanda Amélie
- Oh, pardon, des covens ce sont des sortes de réunions entre wiccans, ils font des rituels pour les pleines lunes ou les changements de saisons par exemple. Ça permet entre autre de rencontrer d'autres pratiquants, de pouvoir demander conseil et d'apprendre des choses.
Iris était tellement à l'aise d'un seul coup, elle n'avait jamais autant parlé à une personne, elle s'étonna elle-même.
- D'accord...
Amélie soupira.
- Ça va ? Demanda Iris une nouvelle fois
- C'est juste que c'est énorme comme nouvelle...
- Je comprend. Il n'y a pas si longtemps j'étais à ta place.
Iris avait l'impression que c'était hier qu'elle avait découvert ses pouvoirs. En tout cas, elle s'en rappelait comme si.
Elles restèrent quelques minutes sans parler puis Iris se dirigea vers sa valise et prit un livre qu'elle avait mis dans le fond avant de le tendre à Amélie :
- Tiens, il y a beaucoup d'informations dans ce livre si tu veux te renseigner.
Amélie se releva et prit le livre.
- Merci.
Elle le feuilleta quelques instants en silence avant de dire :
- Apprend-moi !
- Quoi ?
- Apprend-moi à me servir de la magie !
- Je ne sais vraiment pas, je ne suis pas sûr d'être la personne la mieux qualifiée pour faire ça... Hésita Iris
- Mais tu es la seule que je connaisse ! S'il te plait Iris, tu l'as dis toi-même, quand des wiccans ne savent pas contrôler leurs pouvoirs, ils ont tendance à exploser. Et je veux apprendre à les contrôler pour que ça n'arrive pas.
La petite blonde s'était levée et regardait Iris. Il y avait de la peur dans sa voix, cela s'entendait.
- S'il te plait Iris. Souffla-t-elle
- Bon... D'accord. Mais attention, la magie n'est pas une chose à prendre à la légère !
- Merci Iris, répondit-Elle posément, presque soulagée. On y va ?
- Wow wow wow, calme-toi Amélie. D'abord vu l'heure, on va manger un morceau et on finit de ranger nos affaires. Et ensuite, je t'emmènerais à un endroit tranquille pour qu'on s'entraîne. Et puis il faut que je réfléchisse un peu à ce que je vais te dire.
- Bon, d'accord.
Elles firent ce qu'Iris avait dit. Comme le self n'était pas encore ouvert, leur famille leur avait donné un peu d'argent pour manger donc elles allèrent du lycée, à pied jusqu'au McDo qui n'était pas loin. Sur le chemin, elles n'arrêtaient pas de parler. Enfin, c'était plutôt Amélie qui parlait. Celle-ci était tout excitée à l'idée folle que tout ceci n'était pas un rêve et qu'elle avait bien des dons malgré le fait qu'elle avait encore du mal à y croire. Et de son côté, Iris était très heureuse de rencontrer quelqu'un qui était comme elle après toutes ces années de solitude. Elle n'avait pas encore quitté sa carapace qu'elle utilisait pour se défendre face aux interactions humaines mais elle commençait à se détendre. Elle pensait qu'Amélie pourrait être un bonne amie. Enfin, il fallait qu'elle s'habitue à son contact et notamment qu'elle communique plus. Mais l'excitation et la joie de la jeune fille était si communicatif qu'Iris se sentait plutôt à l'aise en sa présence.
Elles passèrent tout le repas à chuchoter, mais ce n'était pas très agréable avec tout le monde autour d'elles.
Puis elles retournèrent au parking et montèrent dans la Citroën grise d'Iris. Amélie demanda à celle-ci où elles se rendaient.
- Nous allons dans la forêt, comme ça on sera tranquille, on ne sera pas dérangées.
Elle hocha la tête et la jeune fille aux cheveux châtains démarra la voiture. Une fois arrivées, elles descendirent de voiture et s'engouffrèrent dans la forêt. Amélie avançait d'une démarche fluide et enjouée. Elle avait hâte de commencer. Au bout d'un moment, Iris s'arrêta et s'assit en tailleur. Amélie fit de même en face d'elle.
- Donc, comme je te l'ai dit, tous les wiccans possèdent plus ou moins le pouvoir de la télékinésie mais je ne sais pas comment l'expliquer, moi, je peux contrôler l'eau. C'est un don que j'ai, je ne sais pas pourquoi. Hum, tu vas te concentrer Amélie, ferme les yeux. La magie est présente en chacune de nous, ressens-là autour de toi, écoute les bruits de la nature et laisse toi bercer par la magie qui sommeil en toi depuis des années. Respire calmement et concentre-toi.
Les yeux fermés, Amélie entendit autour d'elle les branches qui craquaient, les oiseaux siffler joyeusement, le vent frais faisant voler ses cheveux et le doux soleil d'après-midi qui perçait à travers les arbres et réchauffait sa peau pâle. C'était presque fantastique ce moment, c'était... magique. Elle la sentait la magie flotter autour d'elle et en elle, elle la sentait couler dans ses veines. Elle pouvait presque voir le monde invisible de la magie.
Les yeux fermés aussi, Iris continua :
- Ressens cette force en toi, essaye de l'extérioriser, d'agir sur le monde qui est autour de toi...
Amélie se laissa bercer par la voix d'Iris qui n'était plus qu'un murmure à présent. Elle ressentait la magie au plus profond d'elle et la laissa remonter à la surface et l'envahir entièrement.
Iris ouvrit les yeux  et s'exclame :
- Oh mes dieux !

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