Chapitre 14

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Plusieurs jours passèrent encore. Derek ne donnait aucun signe de vie. Stiles, trop préoccupé, fut finalement incapable de dire s'il ne s'écoula qu'une semaine ou bien deux. Au bout d'un moment, il se mit à imaginer le pire : Derek, mort de froid dans la forêt, dévoré par son loup à moitié sauvage. La présence de Natane lui permit de ne pas devenir fou d'inquiétude. La petite demandait beaucoup d'attention, était très joueuse et câline. Finalement, il était plutôt reconnaissant à Laura de la lui avoir amenée. Chaque fois qu'il la voyait, il ne pouvait s'empêcher de se souvenir d'Amarok, car les deux chiots étaient très semblables, il en ressentait donc un peu de tristesse, toutefois il était content qu'elle soit là, avec lui, pour l'empêcher de broyer continuellement du noir.

Apprendre tout ça sur Derek lui permit également de mieux réfléchir à sa propre situation. En fait, cela lui ouvrit même les yeux sur ce que la culpabilité pouvait avoir de destructeur.

Derek vivait ainsi depuis dix ans parce qu'il n'avait jamais pu se pardonner. Il y avait une certaine tristesse dans cet état de fait et, oui, cela lui fit même un peu pitié. Pour la première fois depuis longtemps, Stiles eut brutalement l'impression d'y voir clair, de sortir enfin la tête hors de l'eau. Une eau noire et ténébreuse.

La vérité c'est qu'il ne voulait pas devenir comme Derek ; la vérité c'est qu'il avait laissé Scott seul pour endurer tout ça.

***

Un matin, alors qu'il venait d'entrer dans le mois de février sans qu'il n'en sache rien, Stiles ouvrit la porte de chez lui et se figea aussitôt. La louve noire, qui s'éloignait en trottinant, se retourna pour le fixer de ses yeux dorés, les oreilles basses. Son cœur fit un bond dans sa poitrine. Si l'animal était là, cela voulait dire que Derek était revenu !

— Nushka ! appela-t-il d'une voix forte.

La louve dressa les oreilles, à l'écoute, lui accorda une seconde d'attention puis reprit sa marche légère.

— Nushka ! cria encore Stiles avant de se mettre à jurer.

Ayant certainement entendu l'urgence dans sa voix, Natane se mit à aboyer de sa petite voix aigüe en remuant sa queue en boucle.

Tandis qu'il déblayait toute la neige devant sa porte à grands renforts de coups de pieds énervés, Stiles entendit rugir des moteurs. Du virage loin devant jaillirent quatre motoneiges qu'il identifia immédiatement comme étant celles de Murphy et de ses amis. Nushka, qui les avait elle aussi entendus arriver, courait vers la forêt. Mais elle était trop noire, et la neige trop blanche. Les hommes la repérèrent immédiatement. Malgré le bruit de leurs véhicules, Stiles perçut très nettement leurs cris excités et ils se lancèrent derrière l'animal qui s'enfuyait.

— Non ! leur cria-t-il. Laissez-la bande d'enfoirés !

Ils ne l'entendaient pas, évidemment. En colère, Stiles courut dans sa chambre, saisit le Colt Python posé sur le tabouret qui lui servait de table de nuit, et se rua dehors. Natane tenta bien de le suivre, mais elle était trop petite et la hauteur de la neige lui faisait encore trop peur. Elle resta donc sur le palier à couiner, malhabile à cause de sa patte plâtrée.

Les traces de motoneiges étaient faciles à suivre, de même que tout le bruit qu'elles faisaient. La rage au ventre, Stiles courait, l'arme à la main, chargée, prête à servir.

Les premiers coups de feu retentirent et il jura. Nushka avait réussi à se réfugier au milieu des arbres, là où les véhicules ne pouvaient la suivre, et s'enfonçait désormais dans la réserve. De dépit, les hommes qui la poursuivaient lui tiraient dessus. Heureusement, la louve était déjà loin, bien plus rapide qu'eux et assez fine pour que les balles ne l'atteignent pas. Néanmoins, trop en colère pour se raisonner, Stiles tira lui aussi, sans vraiment prendre la peine de viser.

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