𝐋𝐀 𝐂𝐀𝐕𝐄「 ᵗʰʳᶦˡˡᵉʳ 」

１０.

   Un court silence s'installe le temps que je réalise que tout ceci est bien réel. Je ne rêve pas. Le simple fait d'entendre une voix me réconforte. Je ne suis plus seul.

   — Où elle est, Maman ?

   Mon cœur fait un grand bond dans ma poitrine. Pris de court, je reste muet. Je ne sais pas quoi répondre. La petite voix me parvient du mur sur ma droite.

   — Rachel... Quel âge as-tu ?

   Un bref instant de silence s'installe durant lequel je commence à comprendre.

   « Ça ne peut pas être... »

   — Hm... J'ai 6 ans.

   « Une gamine ! Mais... comment ? C'est impossible ! »

   — Tu es un monsieur méchant toi aussi ?

   — Non, non, bien sûr que non ! Je suis un... gentil.

   — Tu es un monsieur gentil ?

   — Oui.

   — Tu es sûr ?

   — Oui. Fais-moi confiance.

   — Ça veut dire quoi ?

   — Se faire confiance c'est quand on se croit et qu'on ne raconte pas de mensonges.

   — D'accord.

   — Il faut se faire confiance.

   — Il faut se faire confiance ?

   — Oui.

   — D'accord.

   — Dis-moi, Rachel... les monsieurs méchants, tu les as vus ?

   — Oui.

   — C'est vrai ?

   — Hm... il était pas gentil. Il a dit que je pourrai rentrer à la maison si je voulais.

   — Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

   — Je sais plus.

   — Combien ils étaient ?

   — Hm... deux.

   — Deux ?

   — Hm.

   — Comment ils étaient ?

   — Hm... normal. Mais après il a mis un déguisement pas beau. Et il y en avait un qui conduisait la voiture.

   — Et ta maman ou ton papa ?

   — Papa il est parti au travail. Maman et moi on est allées au parc.

   — Tu ne te souviens de rien ?

   — Si... mais pas trop bien.

   — Dis-moi ce que tu te rappelles.

   — Hm. Je sais plus.

   — Qu'est-ce qu'il y a ?

   — Tu es sûr que tu es un monsieur gentil ?

   — Oui. Tu as peur de moi ?

   — Hm, un peu. On se connaît pas.

   — Tu n'as pas à avoir peur. Je ne suis pas méchant. Je ne te ferai pas de mal. D'accord ?

   — D'accord.

   — Dis-moi... pourquoi tu pleurais tout à l'heure ?

   — Parce que j'aime pas, il fait tout noir et je suis toute seule.

   — Ne pleure plus, je suis là.

   — Tu es où ? Je te vois pas.

   — Euh... non, je ne suis pas là. On est dans deux salles séparées, tu comprends ?

   — Mais... tu es là ?

   — Oui, je suis là.

   — D'accord.

   — Tu as sommeil ?

   — Hm.

   — Tu veux dormir ?

   — Oui.

   — Tu as toujours peur du noir ?

   — Un peu. Mais ça va... tu es là.

   — Oui. Je suis là.

   — Et tu es gentil.

   — Oui.

   — Hm.

   — Vas-y, tu peux dormir.

   — D'accord.

   Je m'allonge. Il reste quelques heures avant le lever du jour. Pourtant, je sais que je ne dormirai pas. Tout est chamboulé dans ma tête. Je sais que maintenant si je dois sortir d'ici, je vais devoir faire sortir cette enfant aussi. Ça risque d'être compliqué... Beaucoup trop compliqué...