𝐋𝐀 𝐂𝐀𝐕𝐄「 ᵗʰʳᶦˡˡᵉʳ 」

１２.

   La nuit tombe. Rachel dort. Ça fait un jour qu'elle est ici. Pour la première fois depuis que je suis dans cette cave, je suis heureux. Je ne me me l'explique pas, mais la présence de cette petite fille si douce et innocente m'apaise. Sa petite voix guillerette me fait remonter loin en enfance, à une époque meilleure et je ne pense plus à cet endroit noir et humide. De plus, avec elle s'accompagne l'espoir d'être enfin retrouvé. Ses parents ont certainement dû alerter la police et une enquête doit déjà avoir été ouverte pour disparition inquiétante. Ce n'est plus qu'une question d'heure avant qu'on ne nous retrouve.

   « Du moins, je l'espère... »

   J'ai menti à Rachel. Je sais que je lui ai dit de me faire confiance. Mais je pense m'être aussi menti à moi-même. Je pensais sincèrement ce que je lui disais et je le pense toujours.

   « On va sortir. Il faut qu'on sorte d'ici. »

   Je ne peux m'imaginer baisser les bras maintenant que Ray est ici. Avec moi. Dans ce lieu sombre et lugubre. Cette petite fille de six ans ne peut pas finir sa vie ici. Je ne le permettrai pas ! Aussi, cette promesse que je lui ai faite en lui assurant que nous allions sortir d'ici, cette promesse c'est surtout à moi que je me la suis faite. Ray et moi, on sortira d'ici et on découvrira ce qu'il se passe. J'en fais la promesse.

   Des bruits de pas résonnent alors dans le couloir. Vu l'heure, je sais que c'est le moment où on nous apporte à manger. J'espère que Ray ne sera pas effrayée en se réveillant.

   — Mika ?

   — Je suis là.

   — C'est quoi les bruits ?

   — Ne t'inquiète pas, Ray.

   — C'est les méchants qui viennent ?

   — Ça va aller.

   La porte s'ouvre et laisse passer l'homme qui vient d'habitude pour me donner à manger. Il dépose l'habituel bol et le morceau de pain à quelques pas de la porte avant de récupérer l'ancien bol. Il ne semble pas se soucier davantage de moi et s'apprête déjà à refermer le battant quand je l'interpelle.

   — Attendez !

   Il interrompt son geste.

   — Il y a une petite fille à côté. Elle a peur et elle a froid. Je vous en prie, laissez-la venir avec moi.

   — Un par cave.

   La porte se referme.

   Je tremble de rage et de colère, mais je ne fais rien. Je reste simplement planté là, à fixer la lumière passant sous le pas de la porte close.

   — Mika ? Qu'est-ce qui se passe ?

   Je n'ai pas le temps de répondre à Rachel que déjà j'entends une porte grincer. C'est celle de sa cave.

   — Ne lui faîtes pas de mal ! je crie tout en me précipitant jusqu'à ma porte.

   J'entends Rachel s'éloigner vers le fond de sa cave et commencer à sangloter. Je voudrais casser cette porte, la démolir pour courir à son secours, mais je ne fais qu'écouter, le coeur battant, la respiration saccadée. J'entends les pas de l'homme dans la cave à côté de la mienne.

   — Allez, viens, gamine. On a des questions à te poser.

   Je comprends qu'il veut que Rachel le suive en haut. Mais pour quoi faire ? Je repense à la fois où j'ai monté les marches et ma tête me fait de nouveau mal. Vont-ils traiter Rachel comme ils m'ont traité ?

   — Mika, j'ai peur, sanglote Rachel.

   — Ne t'inquiète pas, Rachel, je suis là !

   J'entends de nouveau l'homme s'avancer plus profondément dans la cave. Cette fois ce sont des pleurs qui proviennent de la cave. Je frappe avec force sur la porte et me mets à crier.

   — Je vous en prie, laissez-la tranquille ! Ne lui faîtes rien, ce n'est qu'une petite fille !

   — La ferme !

   Je fonce et m'écrase violemment contre la porte, mais elle me résiste. Je crois que mon cœur va s'arrêter quand j'entends ces mots :

   — Nooon ! Lâchez-moi !

   La porte se referme brutalement. Le bruit claque contre les murs de la cave. J'entends les pleurs de Ray qui diminuent au fur et à mesure qu'elle s'éloigne, entraînée par l'homme, dans le long couloir.