Chasse Le Soleil, Traqué Par La Lune

Chapitre 1

Dans les rues étroites d'Hazel, le soleil s'était couché depuis quelques heures déjà et la lumière de l'astre Lunaire courbait les ombres dans des formes propices à la filature. Altéa se faufilait de ruelle en ruelle à pas de loups. L'homme qu'elle suivait depuis déjà plusieurs nuits venait de sortir d'un bordel miteux des bas-quartiers et il ne fallait surtout pas qu'elle perde sa trace. Ses contacts parmi les fournisseuses de plaisir d'Hazel ne payaient pas toujours et elle se retrouvait bien souvent avec des informations erronées, mais dans ce cas-là, ses longues observations nocturnes de cet homme lui avaient permis de dissiper majoritairement ses doutes et elle était désormais quasiment persuadé de la véracité du tuyau qu'on lui avait filé.

L'homme était revenu du front de guerre un mois plus tôt et avait passé toutes ses nuits depuis son arrivée à Hazel à sillonner les différents bordels de la ville. Altéa était parvenu à recueillir les témoignages de plusieurs des femmes avec qui il avait passé la nuit et tous les témoignages concordaient. Il ne se déplaçait jamais sans sa sacoche. Il ne la retirait que pour effectuer son affaire, et même dans ces moments-là, il jetait régulièrement des coups d'œil dans sa direction. Aucune de ses sources n'avait pu lui dire ce que renfermait la sacoche, mais il ne fallait pas réfléchir longtemps pour comprendre que, quoi qu'elle contienne, cela devait avoir une grande valeur. Et elle allait le voler !

L'homme entra dans une taverne et Altéa se posta dans la ruelle qui lui faisait face, accroupie dans les ténèbres. Plusieurs heures passèrent ainsi et, lorsque l'homme ressortit enfin après avoir bu tout son saoul, Le Fleuve brillait toujours dans le ciel nocturne. Il reprit son chemin à travers les bas-quartiers d'Hazel et Altéa reprit sa filature de plus belle. À la manière dont l'homme titubait, Altéa savait qu'il serait bientôt temps pour elle d'agir.

Elle n'était pas fière de son activité de voleuse, mais elle avait dû s'y résoudre lorsque sa mère était tombée malade. Elle n'avait pas été surprise, la maladie était une chose commune chez les fournisseuses de plaisir. Comme elle ne pouvait se résoudre à marcher dans les pas de sa mère et à reprendre le flambeau en tant que fournisseuse de plaisirs, elle avait été forcée de se tourner vers le vol afin d'assurer sa survie et celle de sa mère. Les bas-quartiers d'Hazel regorgeaient d'hommes de retour du front de guerre, les poches pleines de leurs paies de soldats, prêtes à être vidées contre un peu de compagnie. Elle ne faisait que les aider à se délester de ces piécettes encombrantes un peu plus rapidement.

L'homme quitta l'un des axes principaux pour s'enfoncer dans une ruelle adjacente plus étroite. Voilà ce qu'elle attendait, il était temps d'agir !

Elle sortir délicatement une lame et se rapprocha de l'homme à pas feutrés. Ce dernier continuait de longer la ruelle, s'appuyant de temps à autre sur les murs afin d'assister son équilibre précaire, inconscient de l'ombre qui se rapprochait dans son dos.

À mesure qu'elle se rapprochait de l'homme, la respiration d'Altéa s'accélérait. Ce n'était pas la première fois qu'elle dépouillait quelqu'un, mais le frisson et la peur étaient présents à chaque fois.

Lorsqu'elle fût enfin arrivée juste derrière sa cible, elle se figea quelques instants. L'homme n'avait toujours rien remarqué, tout se déroulait comme prévu. Elle fit un pas de plus vers lui et, d'un geste expert, plaça la lame sous la gorge de l'homme. Ce dernier eût un sursaut de surprise mais se calma aussitôt en sentant le contact froid et acéré du métal contre sa gorge.

"Pose ta sacoche par terre si tu veux vivre.", déclara-t-elle en tentant de maintenir sa voix aussi froide et inexpressive que possible. Elle espérait que la peur empêcherait l'homme de remarquer sa respiration irrégulière.

Pour toute réponse, l'homme se contenta de retirer doucement sa sacoche avant de la poser au sol. Pendant toute la durée de son mouvement, le regard d'Altéa resta fixer sur la sacoche.