Chapitre 2

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Le fameux Liam s'est approché de moi. J'ai eu le temps de le détailler entièrement, le temps qu'il traverse la salle. Il était grand, je dirais une tête et demie de plus que moi, brun avec un sourire de tombeur et une démarche nonchalante. Mais ce qui m'a le plus frappée, ce sont ses yeux. Ils étaient incroyables. Au loin, j'ai pu apercevoir qu'il était clair, mais c'est quand il s'est rapproché que j'ai remarqué les détails. Ils étaient bleus, très clair, presque gris, envoûtants . Sa pupille était cerclée d'un anneau doré et son iris gauche avait quelques tâches noisette sur le haut. On ne pouvait pas le nier, il était beau. Et c'était sûrement l'avis des autres filles de ma classe qui ne cessaient de le reluquer en gloussant tout le long de sa traversée. 

Mon intérêt pour lui n'a cependant pas duré. À la seconde où il s'est assis, j'ai détourné le regard et je me suis reconcentrée sur ma feuille remplie de gribouillis. J'ai essayé de continuer à dessiner mais je n'y arrivais plus. Alors je me suis focalisé sur la fenêtre à coté de moi avec, toujours en bruit de fond, la voix soporifique de M. Bretands. À l'extérieur, le gel régnait en maître. Sur un arbre, la pauvre et misérable dernière feuille d'automne luttait désespérément contre le vent. Je me demande comment elle a fait pour résister jusqu'ici. Sur le sol, un moineau cherche, en vain, de quoi se nourrir. Je trouve ce paysage gelé, blanc et froid, absolument magnifique. 

"Excuse-moi "

Je suis sortie de ma contemplation par la voix de mon nouveau voisin de table. Je me tourne donc vers lui 

"T'aurais pas un stylo, s'il te plait ?" 

Je lui donne le mien - de toute façon, je ne m'en servais pas - et retourne à ma contemplation. 

Les deux heures restantes sont passés à une vitesse incroyablement lente. Après en avoir eu assez de regarder dehors, je me suis allongé sur ma table et j'ai écouté d'une oreille distraite, les histoires que nous racontais le professeur de littérature. Je me demande encore pourquoi j'ai choisi cette voie, car elle ne m'intéressais que très peu.C'était sûrement parce que c'était ce qui était le plus simple à mémoriser pour moi. Le prof finit enfin son laïus et nous laisse partir. Comme d'habitude, je suis la première à sortir de la salle, sans doute car je n'ai pas d'affaires à ranger, et je me dirige vers les escaliers qui desservent directement les appartements. C'est un des aspects pratiques que je préfère, je peut rentrer facilement chez moi dès que j'ai un trou dans mon emploi du temps. J'y arrive et je monte les premières marches, quand j'entends mon nom résonner dans le couloir. C'est étrange, personne ne m'appelle jamais d'habitude, et je n'ai pas un prénom très courant donc impossible que ce soit quelqu'un d'autres. Je ne retourne donc pour voir qui s'égosille comme ça. Je découvre alors le nouveau, qui me cours après et qui hurle mon nom dans tous les couloirs. Heureusement qu'à cette heure, il n'y a pas encore foule. Quand il arrive à mon niveau, il me tend mon stylo :

"Je te l'avais pas rendu"

Je murmure un petit merci ce qui fait augmenter son sourire :

"Je savais bien que tu savais parler" me dit-il avant de se retourner pour voir qui appelle son prénom à l'autre bout du couloir. C'est vraiment une habitude dans cet établissement de crier à tout va. 

Un groupe s'approche de nous. C'est le groupe de Jay Morison, les personnes "populaires". Ils vivent dans la plus grande fraternité du campus. Jay commence à entamer une discussion avec Liam et j'en profite donc pour m'éclipser. 

Je claque la porte de mon petit studio, je passe rapidement dans la cuisine, voir ce qu'il y a dans le réfrigérateur -rien, évidemment- avant d'aller dans ma chambre. Mon appartement était vraiment très simple, j'avais un salon-salle à manger-cuisine dans une seule pièce, avec une petite table, un canapé, une télévision. J'avais également une salle de douche minuscule et une chambre qui pouvait tout juste contenir mon lit et une petite commode contenant le peu d'affaires que j'ai. Je n'avais mis aucune décoration, aucune photo, aucun effet personnel, ça ne me rappellerait que des mauvais souvenirs. 

N'ayant rien à faire, je décide d'aller sur le toit, en passant par l'escalier de secours devant la fenêtre de ma chambre. Il y a un autre escalier plus simple dans le couloir pour accéder au toit mais je préfère l'escalier de secours. Il me procure une dose d'adrénaline, la recherche du danger me fait me sentir vivre pour une fois. 

Une fois sur le toit, je me suis assise sur le rebord et j'ai contemplé la ville en contrebas. Uniquement vêtus d'un sweat, je n'avais pas froid malgré le vent qui s'engouffrait dans mes cheveux, les faisant virevolter dans mon visage. J'ai pris une grande inspiration. Je me sentais bien. Je ne sais pas combien de temps je suis restée là. Après un moment, j'ai entendu la porte à l'autre bout du toit s'ouvrir. Je me retournais pour voir qui venait de perturber mon moment de paix, et j'ai vu la bande de Jay Morison sortir, accompagnée de Liam. Les membres du groupe étaient agités

"Ici, on se fera pas gauler" à déclarer Jay, sous les acclamations de ses comparses. 

Le regard de Liam a croisé le mien et c'est à ce moment que j'ai décidé de retourner chez moi. Je me suis levée doucement, mes membres étaient ankylosés d'être restés sur un rebord aussi longtemps et figés par le froid. J'allais sauter pour atterrir directement sur l'escalier de secours un peu plus bas, quand je sentis une sorte de brûlure sur la peau dénudée de mes hanches à cause de mon sweat qui s'était un peu relevé. 

C'était Liam qui, pensant que j'allais tomber et ne connaissant pas l'existence de l'escalier de secours, m'avait rattrapé. 

La lune et ses étoilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant