12. Les Martin (bis)

1.3K 129 21
                                    

Déborah

Le reste de la famille se trouve dans le jardin. Mon père est effectivement en train de s'occuper du barbecue pendant que mes sœurs papotent sur la terrasse. Mon petit frère, quant à lui, se tient légèrement en retrait, appuyé contre le mur de la maison, une bière à la main.

— Alors ce n'était pas une blague, se moque Sophie en venant m'embrasser. Tu nous ramènes bien quelqu'un ! On s'attendait presque à voir Caitlin débarquer.

Ah, ah, ah.

Humour pourri bonjour. Quoi, je ne suis pas capable de trouver un mec et de le garder ? Eh bien si, mes cocottes ! Bam ! Dans vos faces !

Je souffle un coup avant de sourire de toutes mes dents. Je n'ai plus quinze ans, je peux réagir en tant qu'adulte. Ashton me regarde avec amusement. Ma sœur a bien fait exprès de parler lentement, je suis certaine qu'il a tout compris. Il vient tout de même passer un bras autour de mes épaules pour me soutenir.

— J'espère ne pas vous décevoir du coup, déclare-t-il.

Sophie se met à rougir légèrement, j'ai presque envie de soupirer d'exaspération. Mon père ricane dans sa barbe, s'essuie les mains et s'approche pour nous saluer.

— Sylvain, le père de la demoiselle, se présente-t-il. On vous sert un truc à boire ? Théo, qu'est-ce que tu lui proposes ?

Mon frère s'avance et détaille, en anglais, les différentes solutions qui s'offrent à Ashton. Je dirais qu'il s'exprime encore mieux que moi dans cette langue, j'en serais presque jalouse.

— Va pour une bière, merci.

Annie ne nous a pas quittés des yeux et est la dernière à venir à notre rencontre. J'ai moins d'atomes crochus avec elle et pourtant, c'est à elle que je ressemble le plus physiquement. Elle a juste quinze centimètres de plus que moi. Elle se permet carrément de faire la bise à Ashton.

— Bienvenue chez les Martin, le félicite-t-elle. Mets-toi à l'aise et vient t'asseoir, on vous tout savoir sur vous deux.

Une petite boule se forme dans ma gorge lorsqu'elle lui prend le bras pour le mener vers la table déjà dressée. J'essaye de relativiser, je ne suis pas en compétition avec ma sœur. Cette période est révolue, et bien lointaine.

J'accepte volontiers le kir breton que me tend ma mère avant de les suivre, me forçant à paraitre détendue. Alors que je m'installe à ses côtés, Ashton attrape ma main et enlace nos doigts. Il doit commencer à bien me connaitre s'il a repéré que j'étais contrariée. Son geste m'apaise en tout cas.

— Comme c'est mignon, commente ma sœur, les lèvres dissimulées derrière son verre.

— On se demandait pourquoi Déborah voulait tout quitter pour aller vivre à Londres, on comprend mieux maintenant, me taquine ma mère. C'est plus crédible quand même.

— On ne le répétera pas à Caitlin, rit mon père tout en faisant passer le plat de viandes.

— Gnagnagna.

Oui, je sais, pas mature du tout.

Je ne leur tire pas la langue, c'est déjà pas mal.

— Je ne vais pas me plaindre, intervient Ashton.

Tout le monde se marre. Il faut qu'il en rajoute.

— Et mon bureau va accueillir quelques-unes de ses œuvres, c'est tout bénef'.

La discussion dérive sur ce que j'ai manqué ces derniers mois. Je leur apprends ensuite la grossesse de Caitlin, puisqu'ils ne vont pas tarder à l'annoncer officiellement. Théo et moi nous envoyons des piques, surtout quand il se permet de me reprendre sur mon accent alors que je traduis une phrase à Ashton. L'ambiance est détendue.

Lorsque nous avons terminé le plat de résistance, ma mère propose une petite pause avant d'attaquer le dessert. Mon père et Théo embarquent Ashton dans le jardin pour parler potager.

Qu'est-ce qui a bien pu leur faire penser que le sujet pouvait l'intéresser ?

Je me retrouve avec mes deux sœurs. Annie sort son portable et se plonge dans ses applications. Sophie, elle, se penche vers moi.

— Tu as très bon goût, commente-t-elle en désignant le beau blond du menton. Ça fait combien de temps que vous vous connaissez ?

— Deux ans.

— Et tu nous le présentes que maintenant ? me reproche-t-elle.

— Ce n'est devenu sérieux que récemment.

— Très récemment alors, intervient Annie en rapprochant sa chaise. Tu n'apparais même pas dans les journaux avec lui.

Elle tourne vers moi un article qui date d'il y a une semaine ou deux où ils prétendent qu'Ashton aurait eu une liaison avec une des invités lors du mariage tant attendu entre Wayne Stratton et Caitlin MacGreig.

La pétasse rousse.

Je ne dis rien, je ne me défends pas. Je sais que c'est faux. Par contre, que ma sœur prenne un malin plaisir à vouloir me faire douter me serre le cœur. Je m'excuse à voix basse, repousse mon siège et quitte un peu précipitamment la terrasse pour me réfugier à l'intérieur.

— On va passer au dessert, me prévient Maman lorsque je traverse la cuisine.

— OK.

Je me retrouve à faire les cent pas dans le couloir menant aux chambres. J'hésite entre être peinée ou en colère. Je ne me sens pas bien, mais je ne sais même pas pourquoi.

— Deb ?

Ashton me rejoint, sourcils froncés, visage inquiet. Je souffle, passe une main dans mes cheveux puis relève la tête.

— Je ne suis pas sûre d'être à la hauteur, lâché-je d'une voix bien plus frêle que prévu.

— De quoi tu parles ?

— Je n'intéresse même pas les journaux, murmuré-je.

— Ce sont des torchons, Déborah. Ils trouveraient un moyen de déformer la réalité. Ces journalistes ne recherchent pas la vérité. Ils veulent du scandale. Crois-moi, qu'ils n'aient pas encore cité ton nom est une bonne chose.

Il se rapproche jusqu'à pouvoir caresser ma joue.

— Tu n'as rien à prouver à qui que ce soit, m'assure-t-il.

Je hoche lentement la tête. Ses yeux s'ancrent dans les miens, sûrement à la recherche des derniers doutes qui pourraient subsister. Son souffle tout proche provoque un frisson le long de mon dos. J'entrouvre les lèvres. Son regard s'y attarde.

Ashton me plaque contre le mur derrière moi. Ses deux mains viennent attraper mon visage et sa bouche s'empare presque brutalement de la mienne. Je retiens difficilement un gémissement de plaisir. Mes bras s'enroulent autour de sa taille.

— Ne doute pas de toi. Ni de nous, murmure-t-il entre deux baisers.

Sa paume malaxe ma fesse, glisse jusqu'à mon genou et me relève la jambe au passage, ouvrant le passage pour son bassin. Son érection frotte contre mon entrejambe.

— Comment est-ce qu'on va retourner à table après ça ? haleté-je alors qu'il embrasse langoureusement mon cou.

Il sourit contre ma peau, dépose une dernière fois ses lèvres contre les miennes puis s'écarte, s'appuyant sur la cloison en face de moi. Il a du mal à reprendre sa respiration. Moi de même !

Quelle frustration !

En tout cas, ce baiser m'a remis les idées en place. J'ai commencé à donner de l'importance aux avis des autres. Grossière erreur. Ce ne sont pas eux qui comptent. Ils ne peuvent que vous empoisonner l'esprit. Notre relation ne regarde que nous. On fait comme on l'entend. On est qui on est, on ne va pas changer sous prétexte que des personnes extérieures à notre histoire nous trouvent mal assortis. Qu'ils aillent se faire voir.

Voilà, la Déborah pleurnicheuse a disparu. Il faudrait que je l'enterre celle-là pour m'assurer qu'elle ne revienne pas.

***

Eh bien eh bien, petit moment de doutes pour notre chère Déborah🥺... merci la grande sœur ! 😠

Comme on veut [terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant