J'aime les costards (Driller_Killer)

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      Driller_Killer

Jack... On m'appelle Jack. Non, pas comme l'éventreur. Jack, c'est juste mon prénom, pas celui d'un stupide meurtrier qui ne savait rien faire. Lui, il n'avait pas l'amour des choses bien faites, il ne savait pas... Mais c'était il y a un siècle, on ne peut pas lui en vouloir. Il a essayé... La seule chose pour laquelle je suis admiratif, c'est qu'on ne l'a jamais choppé. Et ça mon vieux, c'est un exploit sans nom.

Moi, c'est juste Jack, donnez-moi le nom que vous voulez, c'est pas le plus important.

Ils sont à l'affût dans les bureaux, là-haut. Ils le recherchent celui qui a pris soin de ces hommes à la sortie de leur bureau. Une petite dizaine de costard-cravate envolés, kaput comme dirait l'autre. J'aime leurs cravates, faut toujours qu'il y en ait un qui sorte de l'ordinaire en pensant que lui, il est pas comme vous et moi. Ma cravate préférée c'est celle avec les dessins de Barbapapa dessus. Adorable mon vieux. Elle est accrochée juste au-dessus de mon lit, c'est comme un attrape-rêves. Le matin, quand je me réveille, je la vois, et j'ai la pêche. Elle me donne l'énergie d'aller jusque dans ma cuisine pour me faire un jus, et pas n'importe lequel, du frais ! Une orange, un presse-agrume et on est bon mon gars. Plein de vitamines pour aller à la pêche au connard. Ouais, j'aime ma petite routine.

Enfin, je l'aimais jusqu'à cette ridicule boulette. C'est pour ça qu'ils sont après moi maintenant. Ils ne savent pas encore que c'est moi, mais ils ne vont pas tarder. Je le sais. J'aurais jamais dû laisser entrer cet huissier de merde, il n'aurait jamais vu mes cravates, et il n'aurait jamais été dire aux sbires du fisc que j'avais chez des documents de la plus haute importance qui concernaient.. j'en sais rien, je ne sais pas lire. Un péquenaud, diraient les gens de la ville. Un illettré, un ignorant, une grosse tache. Il a pris la mallette où je rangeais tous les papiers qu'il y avait sur mes pingouins endimanchés, et maintenant, je dois me préparer à fuir.

Je ne sais pas encore ce que je vais faire, où aller, quand ? Je fume ma cigarette peinard en réfléchissant à la meilleure option pour moi... Option... Le genre de terme qu'emploieraient mes "hommes d'affaire"... Je ris tellement en les imaginant encore vivant et pleurant leur mère que je ne vois pas mon cendrier et mes cendres tombent par terre, sur mon parquet pourri et dans ma tasse de café heureusement vide. Mon appartement est dégueulasse, décrépi, sombre... Mais c'est chez moi, et je ne veux plus partir. C'est ici que j'ai commencé. C'est ici que sont mes victimes, soigneusement emballées et rangées dans mon cellier. De beaux hommes, de beaux costumes, des cerveaux entretenus... J'ai eu du mal à retirer les deux premiers cerveaux des crânes, mais le résultat est là, maintenant je sais le faire sans trop de dégâts sur les visages, que je veux garder intacts.

J'allume ma vieille télé, et encore les mêmes informations... Des manifestations pour ci, pour ça... Jamais contents les gens. Là, une femme avec un costard sur la chaîne d'informations nationales, j'ai encore jamais essayé les femmes... Elle tient son micro comme si elle tenait ce que vous savez... C'est écœurant. J'en voudrais pas chez moi. Je préfère mes gentils messieurs je-sais-tout. J'éteins la télé. Ils ne parleront pas de moi maintenant, j'aurais été dans les premières infos.

Il serait temps que je m'habille moi. Le dernier costard était noir, je l'avais mis à laver aussitôt son porteur rangé au cellier, là il sent encore la lessive. C'était peut-être mon dernier repas, son cerveau juteux. Avec une petite salade, c'était parfait, mais j'avais sali son costard. Je n'aurais jamais dû prendre l'habitude de manger avec leur vêtements. Mais c'est ce qui me fait du bien, les voir nus devant moi, le regard vide, tandis que moi, je suis le mec endimanché. Leur bouche sans expression, leurs membres ballants, mous. Un repas aux chandelles, puis après ça finit comme vous l'imaginez.

J'ai pas envie qu'ils viennent tout gâcher. J'aurais dû me faire cet huissier, mais clairement, là... Mes hommes, je les pioche à leur sortie de bureau, je leur demande de m'aider pour la batterie de la voiture que je n'ai pas, et je prends la leur, avec eux dedans, assommés. Ils n'opposent jamais de résistance ces culs serrés.

Je ne sais pas quoi faire. Le stress commence à me gagner et mon eczéma recommence. Mes oreilles me démangent de fou. Mon flacon d'huile de nigelle est là, juste à côté de mon vieux sandwich d'hier. J'en applique dans mes esgourdes et je me remets à réfléchir. Que faire ? Où aller ? Je crois que la dernière solution, c'est la solution finale.

J'ouvre mes bouteilles de gaz, je ferme les fenêtres. Je suis dans un bloc de quoi, vingt appartements ? Tout devrait péter vite fait bien fait. J'ai un gros pincement au coeur en pensant à mes dix gars seuls dans le cellier... Mais c'est la vie. J'allume mon briquet...

VIENS LÀ! N'AIE PAS PEUROù les histoires vivent. Découvrez maintenant