Chapitre 1

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— Il était 22h30 quand on t'a trouvée dans cette propriété, que faisais-tu là ?

Bien trop curieux à mon goût celui là !

— Si tu ne parles pas, on ne pourra pas t'aider, soupire-t-il. Pourquoi es-tu allée dans cette propriété privée à une heure si tardive hier soir ?

Il insiste beaucoup trop sur le mot "privée" à mon goût. Comme si je n'étais pas au courant !

— J'en avais besoin.

— Continue, ordonne-t-il d'un ton las.

— Pourquoi ? Je dois vraiment vous raconter ma vie ? Je ne vous fais pas confiance à vous, il est où votre collègue, celui qui m'a trouvé ?

— Jordan ? Pourquoi lui ?

— Je vous fais confiance pour le prénom, dis-je arrogamment. Parce que lui, il m'inspire plus confiance que vous.

Il souffle bruyamment, sûrement à cause de mon insolence, et se lève. En sortant de la salle d'interrogatoire, il claque la porte. Enfin un peu de répit. Le même policier m'interroge, enfin essaye, depuis une heure et demie. Je n'ai pas confiance en eux, les adultes sont tous pareils. On leur accorde notre confiance sans méfiance et ils finissent par la trahir. Si je ne veux parler qu'à l'autre policier, c'est qu'il n'a pas l'air comme ça, alors je vais essayer de lui faire confiance.

La poignée s'abaisse et la porte s'ouvre. Le dénommé Jordan entre avec une tasse fumante dans la main. Il la dépose devant moi et part faire un truc avec la caméra qui est censée filmer tous les interrogatoires. Il revient s'asseoir devant moi et me fait un léger sourire, un de ces sourires qui ont pour but de vous rassurer et de vous mettre à l'aise.

— J'ai éteins la caméra, tout ce que tu diras resteras dans cette pièce entre toi et moi. Mon collègue m'a dit que tu ne voulais pas lui parler. Je comprends, moi aussi je le trouve agaçant.

Je hoche la tête. Agaçant est un euphémisme.

— C'est un chocolat chaud. Tu aimes ça ? Sinon je peux te faire un thé ou un café pour te réchauffer.

— Je peux vous poser une question ?

Il acquiesce. Cet homme a quelque chose dans ses yeux, quelque chose de rassurant et de chaleureux qui me mettrait à l'aise si je n'étais pas aussi méfiante envers les adultes et leurs belles paroles.

— Vous avez des enfants ?

Il semble surpris par ma question et visiblement pris de court.

— Non, je n'en ai pas, finit-il par avouer. Si tu veux tout savoir, j'en voudrais deux. Malheureusement, ma femme ne peut pas avoir d'enfants et le processus d'adoption est très complexe.

Sa réponse me touche. C'est de là qu'elle vient cette étincelle dans ses iris. Je décide donc de lui faire confiance.

— La propriété privée d'hier soir, c'est, enfin ça devrait être chez moi. Mes parents ont acheté ce terrain quand ils m'ont mise à la porte.

— Que s'est-il passé ?

— J'avais 15 ans, la première fois. Mon père est rentré du travail énervé, et surtout soûl. Il m'a frappée en disant que c'était de ma faute si mon frère a raté son examen. Le lendemain il a recommencé, ma mère n'a jamais rien dit. Il n'avait jamais aucune raison valable. J'ai toujours travaillé d'arrache-pied en pensant que je n'étais pas assez bonne. J'ai sauté une classe, j'ai eu mon bac à 16 ans juste pour les rendre fiers. Mais ils n'ont jamais cessé de me dire que je ne faisais pas partie de la famille. J'ai réussi à les convaincre de me payer l'école dans laquelle je voulais aller. Deux mois après le début de l'année scolaire, ils se sont fait rembourser. Avec cet argent ils ont acheté la maison et m'ont mis à la porte. Cela fait 3 semaines. Hier soir, je suis allée chercher des vêtements. J'avais l'espoir qu'ils n'aient pas tout jeté. Visiblement si...

𝓕𝓲𝓷𝓭 𝓜𝔂 𝓦𝓪𝔂Où les histoires vivent. Découvrez maintenant