Chapitre 6 : La maison de la terreur (partie 1)

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Point de vue d'Adèle

Après avoir bravé les embouteillages marseillais, je sors du périph pour m'engouffrer sur des petits chemins de traverse. Aux alentours de 20h30, j'arrive devant la barrière qui interdit l'accès des véhicules. Je descends de voiture, allume la lampe de mon téléphone portable et marche. Il fait nuit noire. Le bruit des cigales et l'odeur des essences boisées accompagnent mon périple pédestre dans les montagnes provençales. Après une bonne heure de marche, j'arrive devant un immense manoir sordide et effrayant. Une "petite baraque" donc, d'après Maxence ? Je pense qu'il n'a pas dû y aller souvent ! On dirait un château maléfique comme ceux dans les films d'horreur. Je comprends qu'ils aient choisi cet endroit, il fait tellement froid dans le dos qu'on ne veut pas s'y aventurer sans une bonne raison ! Mais pourquoi n'ai-je rien dit à Thomas ? Je dois être folle ! Je m'approche de la porte et frappe. Un homme vient m'ouvrir. Il a un air menaçant. A l'intérieur, il y a une grande agitation. De nombreux hommes sont là, servis par des jeunes filles ; trop jeunes pour être employées de maison ou serveuses. Le tout est accompagné d'un fond sonore, dont les paroles me sont vaguement familières. Il me semble que je connais cette chanson. Je tends l'oreille pour percevoir la musique, pourtant déjà forte mais recouverte par les cris des hommes. "Ici tout l'monde déraille/T'es cent fois trop, cent fois trop bonne/ T'as beugué nos entrailles/ T'es mille fois trop, mille fois trop sexe". Oh misère ! C'est "Hit sale", du groupe Thérapie Taxi. J'ai déjà entendu cette chanson plusieurs fois à la radio. Comme si ces jeunes filles n'étaient pas déjà assez humiliées, il faut que ces hommes en rajoutent en les martelant de Hits sales aux paroles rabaissant les femmes à de simples objets de convoitise ! Je me trouve devant une scène rebutante. Ces personnes fixent ces gamines comme des proies. Bande de pervers ! Je suis dans l'antichambre de la terreur ce n'est pas possible ! Je fais un cauchemar. Dites-moi que je vais me réveiller bientôt ! Je suis tirée de mes pensées cauchemardesques par un homme à la mine patibulaire glaciale.

-... : Bonsoir ! Qu'est-ce que vous voulez ?

-Moi : Euh c'est une connaissance, Adrien Parlier, qui m'a dit de venir ici. Il paraît qu'on y trouve de bonnes choses.

-... : Oh je vois. Vous êtes venue pour quoi exactement ?

-Moi : Euh, je ne sais ... Qu'est-ce que vous avez à me proposer ?

-... : Et bien si vous êtes tentée par de la compagnie, nous pouvons vous en trouver. Mais ce ne sera que de la compagnie féminine. Sinon, vous pouvez aller boire un verre au bar.

Je ne comprends pas ce qui se passe ici. Il vient de me proposer de la "compagnie féminine", je crains le pire. Je crois que je me trouve dans ce qu'on aurait pu appeler à l'époque une maison close. Sauf que de nos jours c'est totalement illégal et de plus je pense que les jeunes filles qui doivent satisfaire les plaisirs des clients, si j'ose dire ne sont pas majeures. Une étrange sueur froide coule le long de ma colonne vertébrale. J'ai peur de comprendre, en fait. Je suis au coeur d'une affaire d'esclavage sexuel et domestique. Et au vu de la machine à sexe que tout ça m'a l'air d'être, je doute qu'Amadeo ne se soit pas monté un dossier en béton. A mon avis, son affaire n'a pas de faille, contrairement à ce que m'a dit Maxence. Un type de son acabit ne peut pas faire tout ce marché sans avoir pris une forteresse de précautions au préalable. C'est impossible. Ou alors, il veut vraiment finir les restant de ses jours en prison.

Au même moment ...

Point de vue de Thomas

Je m'inquiète pour Adèle, je l'ai sentie bizarre toute la journée. Son agressivité ce matin était normale vu la nuit qu'elle avait passé, mais ensuite, elle est partie en coup de vent ce soir, sans rien dire et ça ce n'est pas son genre. Enfin, je voulais plutôt dire qu'elle salue toujours au moins Jessica et Hippolyte avant de rentrer chez elle. Moi, ça risque de mettre un peu plus de temps à revenir... J'essaie de calmer mon inquiétude en me disant que c'est idiot, qu'elle devait peut-être récupérer Ulysse. Après tout, j'ai cru comprendre que c'était compliqué avec lui en ce moment, elle veut peut-être passer du temps avec son fils. Mais sans succès. Je tourne en rond tel un lion dans sa cage, lorsqu'une idée assez osée me vient : je vais demander à Hippolyte de tracer son téléphone portable.

Profilage : peur sur MarseilleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant