First [TERMINEE]

Chapitre 20

~CHERYL~

Une fois que Toni et moi fûmes arrivées à Thornhill, je m'empressai de lui faire visiter les extérieurs pour commencer.

Je lui montrai notre verger d'érables tout en lui parlant de mes ancêtres Blossom et, notamment, de leur fameux sirop d'érable. Certes, je n'appréciais pas mes ascendants sur le plan personnel – principalement en raison des valeurs trop conservatrices à mon goût qu'ils prônaient avec arrogance – mais, je devais reconnaître que, sur le plan professionnel, ils étaient parvenus à accomplir de grande chose. En effet, notre richesse d'aujourd'hui était essentiellement le fruit de leur réussite d'autan dans l'industrie du sirop d'érable et son commerce.

Puis, voyant qu'il commençait à pleuvoir, je la fis rapidement entrer à l'intérieur. Après lui avoir servi du thé à la menthe, je repris mes explications sur l'histoire de Thornhill, guidée par ses questions.

Toni semblait porter un intérêt tout particulier à ce que je lui racontais ce qui me touchait profondément. En effet, elle semblait boire avec attention chacune de mes paroles tout en me regardant de ses grands yeux brillants et admiratifs. A en voir son regard émerveillé, j'avais l'impression d'être une personne exceptionnelle et que chacun des mots qui sortaient de ma bouche avait une valeur inestimable.

Avant elle, aucune de mes soi-disant amies n'avait jamais porté n'était-ce qu'une once de considération à ce que j'avais à dire, sauf, bien évidemment, si c'était pour leur raconter comment ç'avait été d'embrasser tel ou tel garçon.

D'ailleurs, à ce propos, à chaque fois j'avais été obligée de mentir parce que, si je leur avais dit que je trouvais dégoûtant le fait de les embrasser, j'aurais pu dire adieu à ma place chez les Pretty Poisons.

La vérité était que je n'avais jamais trouvé un seul garçon attirant...

Je repensai alors aux propos de Toni de la veille concernant le fait qu'elle ne soit jamais sortie avec personne : Peut-être surtout que je n'ai pas cherché au bon endroit. Et, j'avais beau lutter, ces mots résonnaient inlassablement en moi.

Et, si le fait que je n'aie jamais ressenti la moindre attirance pour un garçon suggérait que je n'étais pas aussi hétérosexuelle que je pensais l'être ? Et si Toni m'avait, malgré-elle, aidée à ouvrir les yeux sur ce que j'essayais de garder enfoui au plus profond de moi sans le savoir depuis des années ?

En tous cas, une chose était sûre : cette question ne cessait de me hanter....

Toni était la seule personne pour laquelle j'avais ressenti une attirance forte, tant sur le plan sentimental que sur le plan physique. C'était la seule avec qui l'idée de partager un baiser ne me repoussait pas. Bien au contraire...

Pouvais-je réellement être hétérosexuelle dans ces circonstances ?

Quoi qu'il en fût, j'essayais de me persuader que tel était le cas car c'était bien plus facile pour moi étant donné l'homophobie familiale.

Je me répétais que ce je ressentais pour Toni ne devaient pas être de véritables sentiments amoureux, mais seulement un attachement très profond et probablement intensifié par le fait que je me sentais désespérément seule. Le fait que je sois attirée par Toni ne signifiait rien. C'était juste une exception. Une exception qui était pourtant en train de devenir mon principe...

A vrai dire, je savais que je me mentais à moi-même mais, avais-je vraiment le choix ? J'étais comme obligée d'être hétérosexuelle car mes monstres de parents n'auraient jamais accepté le contraire. S'ils savaient, ils me réserveraient indubitablement le même sort qu'à Nana Rose. Autrement dit ils me tueraient...