Jour 9 (partie 1)

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L'univers est doté d'une infinité de galaxies, de plusieurs milliards de planètes, de milliards d'astéroides dont nous ne connaissons l'existence. L'univers est composé de milliards d'étoiles, brillant toutes à une intensité différente, de sorte que certaines sont visibles, et d'autres non.    Papa aimait cette vision des choses. Il adorait l'astronomie. Il aimait dire que nous étions tous de petites étoiles dans l'univers, et que certaines, les plus épanouies brillaient déjà, tandis que d'autres cherchaient encore le moyen de se faire remarquer. Celles qui ne brillaient pas étaient considérées comme celles qui n'avaient pas atteint leur but ultime. Celles qui brillaient déjà l'avaient fait. Ainsi, nous brillons à notre façon, notre intensité, et si nous ne brillons pas maintenant, ce n'est pas grave, il suffit d'attendre qu'un jour notre tour vienne. Papa avait un penchant pour les rêves. Il m'encourageait dans tout ce que j'entreprenais, même les choses les plus ridicules. Il me disait que si mes rêves semblaient trop ambitieux, c'était parce je ne regardais pas assez les étoiles, et que si parfois je perdais motivation en tout, c'est parce que je n'avais pas encore trouvé une raison pour briller. Ce but ultime, pour lui, c'était comme un rêve. Nous étions tous accrochés à lui, comme accrochés au destin. C'était notre raison de briller. Papa voulait que je brille, il le voulait vraiment.

Je ne suis pas encore sure d'avoir trouvé ma vraie raison, mais jusqu'à maintenant, ça aurait été qu'il revienne. Il me manque terriblement.

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J'ai regardé les étoiles, allongée dans un champs qui m'étais comme inconnu. J'étais couchée là, et je fixais le ciel, comme si je ne l'avais jamais vu de ma vie. Le vent était léger et l'herbe caressait mes jambes. Je ne saurai pas dire pourquoi j'étais là, ni comment, mais à ce moment précis, rien ne me faisais me poser toutes ces questions. J'étais au calme, dans une paix éternelle. C'était étrange. Etrange, et plaisant. 

Soudain j'ai senti une présence proche de moi. Le bruit de l'herbe autour me laissais comprendre que je n'étais pas seule, et que la personne qui était ici s'approchait de moi. Je me suis relevée, et je l'ai vu, face à moi. C'était lui, avec ses petites fossettes, ses cheveux bruns qui penchaient depuis peu vers le gris, et ses yeux verts clairs. C'était mon père.

Il m'a observé pendant plusieurs secondes, je l'ai regardé dans les yeux. Tous mes souvenirs avec lui me sont revenus comme un flash : les pancakes le dimanche, quand il tentait (en vain) de m'apprendre à bricoler, nos fou rires, ses blagues qu'il trouvait je ne sais où, nos sorties vélos les samedis après-midi, nos soirées mario kart... tout. J'ai continué à le regarder, son regard était intense, indescriptible, il était là, à quelques mètres de moi. Cela faisait six ans que je ne l'avais pas vu. C'était fou, incroyable. Je ne sais comment, ni pourquoi ou pour quelle raison, mais j'avais l'impression que rien n'avait changé, comme si la petite fille que j'étais à 10 ans était resté là, avec lui, tout ce temps. Comme si il n'était jamais parti.

J'ai fini, avec hésitation, par briser le silence:

- Papa? 

Oui, je sais, c'était ridicule. Il était clair que c'était lui, en chair et en os. Mais je ne savais quoi dire, j'étais là, face à lui, désemparée. Je n'y croyais pas. 

Il a continué de me regarder intensément, et n'a rien dit. Il n'a même pas hoché la tête, ni bougé. J'ai alors renchérie :

- Papa, tu me manques tellement, j'aurai voulu te dire au revoir comme il le faut, j'aurai aimé être là, savoir, t'empêcher de prendre ce fichu virage. T'empêcher de tomber...                                 

Je sentais mes joues rougir et les larmes monter peu à peu:                                                                      

- Si seulement j'avais su, j'aurais pu...

- C'est de ta faute, Eli. 

Sa voix m'a glacé le sang. Je suis restée figée sur place, les yeux écarquillés. Il continuait à me regarder droit dans les yeux. Son regard me transperçait. Je ne comprenais pas. C'était un accident. Il m'en voulait, il me mettait sa propre mort sur le dos. Comment? Comment cela pouvait être de ma faute? Ces dernières paroles m'avaient brisé le coeur, mais je continuais à le fixer, remplie d'incompréhension. Les larmes trempaient mon visage rougi par la tristesse. 

Je voulais lui dire, lui demander des réponses à toutes mes questions, mais au moment où j'ai ouvert la bouche, une main s'est posée sur mon épaule.                                                                                     Je me suis retournée, effrayée, avant de découvrir que devant moi se tenait ma mère. Elle était là elle aussi, vivante, en chair et en os. Elle était revenue ! Elle n'avait pas disparu ! J'ai ouvert la bouche, tandis qu'un léger sourire commençait à se dessiner sur mon visage remplie de peine. Elle me fixait du même regard glaçant que mon père, droit dans les yeux. Elle a fini par dire, d'une voix remplie de haine :

- C'est de ta faute, Eli.

J'ai écarquillé les yeux, et j'ai continué de la fixer, tandis que mon coeur battait si vite que l'on aurait pu croire qu'il voulait s'enfuir. Cette dernière parole m'avait brisé le coeur, une seconde fois. 

J'ai commencé à partir en courant pendant qu'ils me suivaient. J'ai trébuché sur une branche et je me suis écroulée au sol. J'étais à bout de souffle, effrayée. J'ai voulu me relever, mais quand j'ai levé la tête, ils étaient déjà là, devant moi, plus proches qu'avant, comme si ils voulaient me chuchoter à l'oreille.

Ils ne cessaient de répéter la même phrase: "c'est de ta faute Eli". Leurs regards avaient quelque chose d'étrange et d'effrayant, on aurait cru qu'ils n'étaient plus conscients, qu'ils étaient totalement vides de pensées. 

Le coeur brisé, apeurée et la tête remplie d'incompréhension, j'ai fini par hurler, le plus fort possible tout en fermant les yeux.

Le silence a régné, ils avaient cessé de parler. J'avais gardé les yeux fermés, je ne voulais plus croiser leur regard.





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