Epilogue - corrigé

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Je fermai le carnet noirci par mes souvenirs et me dirigeai vers la boite cachée sous mon lit. La boite, qui recelait les plus précieux de mes trésors, glissa sur le parquet pour finir sa course sur mes genoux.

Le couvercle en était scellé depuis si longtemps qu'une pellicule de poussière s'envola et mon coeur se pinça à la vue des objets dedans. Je saisis l'extrémité d'un morceau déchiré et y posai mes lèvres dessus comme lors de ce jour. La pastel avait séché et n'avait plus ce rendu gras typique d'elle. Je caressai ensuite le velours vert d'eau entre mes doigts dont le fermoir était cassé. Je ne pouvais le faire réparer ; Jean-Baptiste avait bien essayé mais le collier datait de plus de deux siècles. Il fallait changer l'attache entière mais ce n'était pas envisageable. Je voulais le garder tel quel ; Que ce soit l'objet sur lequel les doigts de Daniel s'était posées.

Je calai le carnet tout au fond de la boîte et remis en place les deux autres objets que je chérissais tant. Je gardai le tout dernier trésor, à côté de mes genoux. J'inspirai profondément et dépliai le papier qui crissa sous mes doigts. Il était en ma possession depuis quatre mois déjà, et pourtant je m'apprêtais à le lire pour la première fois. Jean-Baptiste avait remué ciel et terre pour retrouver sa trace. La trace de Daniel. J'entamais ma lecture reconnaissant le tracée des lettres formé par son écriture.

« 8 février 1793.

Quebec, Nouvelle-France.

Elia, il se fait tard et ma vue se brouille. Pourtant je ne trouve point le sommeil.

Nous voilà arrivés après des mois d'un voyage épuisant. Thomas s'est remis de la fièvre qui a emporté nombre de passagers, le laissant de constitution fragile. Il ne peut toutefois ingurgiter la moindre substance. Je m'inquiète pour lui mais nous voilà pieds sur terre ferme.

Le bateau a déposé nos malles dans le port et elles nous serons amenées dans notre nouvelle demeure. J'ai refusé de laisser ton portrait entre les mains d'inconnus. Il est toujours à mes côtés, me suivant comme mon ombre.

Nous pourrons rejoindre notre domaine une fois que tout sera installé. En attendant, nous sommes hébergés dans une auberge de la ville. Les gens d'ici sont étranges. Leurs vêtements sont constitués exclusivement de peaux d'animaux méconnus. Je me plais déjà sur cette terre. Vous aviez raison, l'aventure est excitante.

Demain, j'emmènerai Isabelle s'acheter de nouvelles fourrures. Les nôtres sont de trop faibles épaisseurs pour nous protéger du froid. La neige est si épaisse, je n'avais jamais vu cela auparavant. Même tenir ma plume pour vous écrire, ces mots que vous ne lirez jamais, est un supplice.

Mes dernières pensées, avant de rejoindre les songes vous sont encore destinées. Nous avons appris, à notre arrivée, que notre bon roi Louis le Seizième avait été guillotiné le 21 du mois précédant. Vous êtes l'ange qui avez croisé mon chemin, et vous avez sauvé ma vie ainsi que celle de ma famille. Je vous suis éternellement reconnaissant et le serai jusqu'à la fin de ma misérable vie.

Je m'en vais à présent vous rejoindre là où personne ne pourra vous enlever de nouveau. Les rêves sont si doux à vos côtés que j'aimerais ne jamais me réveiller. »

« 15 mars 1796.

Louisbourg, Nouvelle-France.

Elia, je suis bien triste de voir mon frère nous quitter. Mais son désir de montrer son pays natal à sa jeune femme, Marie, est légitime. Une fois leur bébé né, ils ne pourront plus entamer ce périple de plusieurs mois. Je commence déjà à implorer le seigneur pour que la mer soit calme.

Je suis soulagé à l'idée de ne plus voir Marie et son ventre rond. J'ai honte de ce sentiment qui me prend lorsque je les vois. Celui d'une jalousie qui me ronge de n'avoir eu cette chance de tenir entre mes bras le fruit de notre amour. Pour ma survie, j'ai essayé de vous oublier, en vain. Votre absence est ma malédiction mais aussi ma bénédiction de part nos souvenirs. A présent, j'ai enfin trouvé la paix. Car je sens au plus profond de moi que vous ne m'avez pas oublié non plus, et je me sens plus proche de vous. Lorsque je regarde l'horizon, je vous vois vous et votre crinière au vent. Que vous êtes belle.

Votre portrait m'a été rendu aujourd'hui. Il est a présent protégé sous vitre pour traverser toutes les années à venir. Ce tableau bravera les siècles autant que notre amour le fera à l'égard du temps. »

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La fin de nos deux héros, 

S'il vous plait, ne m'en voulez pas. Je me déteste déjà assez des les avoir fait souffrir ainsi...  :')

A l'égard du TempsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant