White Era • kv TOME 3 | Terminé |

Chapitre 1

L'espace de quelques instants, mon regard se perd dans les rues enneigées, virevoltant entre les flocons. Tout ce blanc agresse mes yeux tandis que je peux presque sentir la morsure du froid malgré l'isolation qui nous sépare. Peu de voitures circulent, ayant trop peur de finir dans un accident tandis que le pays entier est paralysé par l'hiver si peu attendu en ce mois estival. J'inspire profondément et souffle un coup en levant les yeux vers le ciel recouvert d'une masse de nuages cotonneux.

Août vient d'arriver dans nos contrées et pourtant le froid du solstice précédent ne cesse de s'accrocher à la terre telle une sangsue à son sang. Un bruit sourd me fait sursauter et m'extirpe de mes pensées brumeuses, m'obligeant à tourner le dos à la fenêtre pour observer un Seojoon au visage légèrement recouvert de sueur. Soufflant un coup, il s'essuie le front à l'aide de la manche de son sweat rouge et se tourne vers moi. Sur le coup, il m'observe de la tête aux pieds puis finit par froncer les sourcils.

— Hey, je rêve ou tu glandes ?

Je lâche un léger ricanement puis hausse les épaules, m'appuyant au rebord de la fenêtre de mon nouvel appartement. J'avais décidé de prendre mon envol. Ma mère pensait que c'était pour que je puisse reprendre mes études en toute sérénité. Mais la raison principale était que je ne pouvais pas accueillir ma meute -aussi petite soit-elle-, chez moi. Ma génitrice n'aurait pas pu comprendre pourquoi quasiment chaque jour, des inconnus squatterait chez nous. Car en tant que chef, je me devais de prodiguer un havre de paix à mes loups. Comme Jungkook le faisait envers la sienne.

A cette pensée, mon cœur se serre imperceptiblement et mon regard s'assombrit. J'ai encore du mal à réaliser que nous ne sommes plus de la même meute.

Au fil du temps, mon corps avait peu à peu compris que je ne faisais plus partie de sa bande. Lentement, j'avais senti les pensées de Jin et Namjoon me quitter tandis que celles de Yoongi, Jimin et Seojoon demeuraient belles et bien présentes, comme inscrites au fer blanc dans mon esprit.

— J'te le mets où le carton "fragile" ? hurle Yoongi du salon.

— A-Ah, poses le dans la cuisine, j'arrive !

Seojoon ricane un coup. Je me retiens de faire de même et le dépasse, allant dans la pièce annoncée où je retrouve le barman déposer le carton sur le plan de travail. Il souffle si fort que ça en fait voler ses mèches de cheveux.

— J'en peux plus, j'ai envie d'pioncer.

— Oh le grand-père !

Nous nous retournons dans un même mouvement pour apercevoir un Jimin tout enjoué qui porte au moins trois cartons. Il était décidément un Oméga à la force de titan. Ce qui ne semble d'ailleurs pas plaire à Yoongi qui est touché dans sa fierté.

— Fais pas trop le malin blondi.

— Sinon quoi ?

Le dénommé "blondie" pose les cartons dans un coin du salon et porte son regard vers la cuisine ouverte où nous nous trouvons. Les deux loups se défient des yeux, ce qui m'arrache un sourire amusé. Je vois bien que ce n'est que de la taquinerie, alors je ne m'inquiète pas plus. Soudain, la porte d'entrée claque et Marie débarque dans la pièce de vie, les cheveux en bataille et des sacs de courses pleins les mains.

— Putain de vent de mes deux ! J'ai mis dix ans à me coiffer ce matin !

D'un air taquin, Seojoon qui est de nouveau parmi nous s'accoude au bar et plante son menton entre ses mains tandis qu'un sourire malicieux étire ses lèvres rosées.

— T'as pas un sort pour ça, petite sorcière ?

— J'ai surtout un sort pour te botter le cul, petit loup.

— Tu respires l'élégance et le glamour, rétorque mon meilleur ami en haussant un sourcil.

Marie se contente de lever les yeux au ciel bien que j'arrive à discerner un sourire sur son faciès. Je vois bien que quelque chose a changé entre ces deux là, j'ai d'ailleurs ma petite idée sur quoi. Cependant j'aurais aimé en avoir la preuve visuelle.

J'hausse les épaules pour moi-même puis me tourne vers le carton fragile avant de l'ouvrir délicatement avec l'aide d'une paire de ciseaux, décidant de ne plus faire attention aux chamailleries dans mon dos. Doucement, je sépare les pans de la boîte pour avoir accès à son contenu. Quand je vois au dessus du tout le cadre abritant une photo de la meute au grand complet, Jungkook se tenant dans le fond et de dos, je ne peux m'empêcher d'avoir un sourire mélancolique.

Je l'attrape entre mes fins doigts et malgré moi, mon regard se porte sur le jeune homme qui a l'époque avait les cheveux cendrés. Vêtu d'un long manteau noir, il se tenait à l'écart comme si tout cela ne le concernait pas.

Et aujourd'hui, cela semble être encore le cas.

Jin m'avait fait part du fait qu'il ne voulait pas quitter la meute pour ne pas laisser Jungkook seul. Namjoon m'avait tenu le même discours. Car un Alpha solitaire était un Alpha faible qui pouvait être la proie de nombreuses créatures. J'avais bien entendu respecté leur décision. Bien que j'avais décidé d'écarter Jungkook de ma vie, je n'allais certainement pas l'obliger à se défaire de ses amis et ses défenses.

Soudainement, je sens un menton s'appuyer contre mon épaule et une odeur de vanille me titiller le nez. Il faut peu de temps avant qu'un rire cristallin n'atteigne mes oreilles.

— Wouha, elle date cette photo !

Avec douceur, Jimin la prend de mes mains et se retourne pour s'appuyer contre le plan de travail. Un sourire sur son faciès, son pouce caresse délicatement le verre du cadre. Je peux voir la tristesse danser dans ses pupilles et cela me fait mal.

Car nous savons tout les deux que jamais nous ne pourrons reproduire ce magnifique schéma de l'époque. Je me contente donc de poser une main sur son épaule. Il relève les yeux, puis sourit un peu plus, posant sa main par dessus la mienne.

— Désolé... Je devrais pas être aussi nostalgique.

Je secoue la tête avant de me tourner à mon tour pour m'appuyer contre le meuble dans mon dos. De loin, je vois Seojoon et Marie se disputer la télécommande dans le salon tandis que Yoongi est assis dans le fauteuil massant, semblant être déjà parti pour un monde meilleur.

— Ne t'en fais pas. Je pense qu'on l'est tous un peu dans le fond. C'est normal de ressentir ça. Ça fait à peine trois semaines maintenant.

Jimin retient un petit rire, sûrement nerveux, puis regarde dans la même direction que moi. Derrière le trio qui se tient face à nous, nous pouvons apercevoir le chaos hivernal qui règne au dehors.

Et cela me rappelle qu'à partir d'aujourd'hui, nous étions une meute à part entière.

Une petite famille de cinq que j'allais m'évertuer à protéger.

Je rappelle que je peux faire des erreurs en réadaptant, c'est à dire d'oublier de changer des noms. Ça arrive alors dans ce cas dites le moi pour que je puisse y changer rapidement.