Chapitre 23 - Premières fissures

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Quand je me réveillai, je senti immédiatement que nous n'étions plus dans le sud. Bien qu'il fasse bon, la chaleur n'était pas étouffante, et l'air était légèrement humide. J'entendais tout le monde s'affairer. Doucement, encore dans les brumes du sommeil et de la fièvre, je me redressai. Nous devions être arrivés depuis plusieurs heures, à en juger par l'avancement de l'installation. Personne ne m'avait réveillée. Je leur étais inutile avec mon bras en moins, à quoi bon troubler mon sommeil. Alors que je me frottais les yeux de ma main valide, la tête d'Arthur fit son apparition au bout du wagon.

« Alors la marmotte, on se réveille enfin ? »

Je lui adressai un sourire endormi. Il s'approcha pour m'aider à descendre. Puis il me donna le bras pour marcher, me faisant la visite du camp. Je ne perdais pas une miette du spectacle. Nous étions désormais au milieu de majestueux arbres, qui nous apportaient ombre et protection. Il me fit m'asseoir sur un rocher qui surplombait la rivière en contrebas. Ce banc naturel était parfaitement placé. Je souris et, les yeux fermés, je respirai l'air pur. Les rouvrant, je voyais la mine inquiète d'Arthur.

« Ca va aller mieux maintenant Arthur.

- Je... Oui je suppose. Je ne sais pas. Il y a toutes ces tensions. Et Dutch... Dutch agit bizarrement.

- C'est la première fois que ça arrive ?

- Je suppose qu'Hosea gardait les choses sous contrôle. Je ne sais pas...

- Et maintenant, que va-t-il se passer alors ? »

Il ne put me répondre, une agitation détournant son attention. Des cris nous rassemblèrent tous au cœur du camp. Molly. Complètement ivre. Trouvée par Uncle dans un troquet à Saint-Denis. Il l'avait fait revenir avec lui et maintenant elle était là. Crachant sa colère d'ivrogne au visage de Dutch. Et soudain, des mots qui nous glacèrent le sang. Elle avait parlé. A Ross et Milton. A la Pinkerton.

« Je t'aimais moi, espèce d'ordure ! Vas-y, tue-moi ! »

Arthur tentait de calmer Dutch, de le convaincre de la laisser partir. Elle était juste folle. Et pendant un instant, j'ai cru qu'il allait l'écouter. Quand soudain, un coup fort retenti. Miss Grimshaw avait utilisé son fusil, tuant la jolie rousse sur le champ.

« Elle connaissait les règles Arthur, c'est quoi ton problème ? »

Elle se mit à hurler des ordres à tout le monde, nous disant de nous remettre au travail. Je m'éloignai discrètement vers les chevaux. Je me sentais faible et ne pouvais pas faire grand chose, mais je ne voulais pas m'allonger alors que le camp était plongé dans ce climat délétère. Caressant ma jument, j'essayai de comprendre ce qu'il venait de se passer. Je me sentais triste pour Molly. Elle était amoureuse de Dutch. Elle croyait en lui. Mais lui ne voyait en elle qu'un jouet, un passe-temps que l'on pouvait remplacer d'un claquement de doigt. Malgré tout, cela ne justifiait pas son comportement.

J'étais en colère. Sans elle, Hosea et Lenny seraient encore en vie. Sans elle, le braquage aurait marché, il n'y aurait pas eu ces dernières semaines et nous serions en train de vivre la belle vie sur une île paradisiaque. Sans elle, pas de balle dans mon bras.

Épuisée par ma blessure et la tension ambiante, je posai ma tête contre l'encolure de ma jument. J'entendis des pas se rapprocher. Abigail.

« Ton couchage est prêt Anna, tu devrais aller t'allonger. »

J'hochai de la tête et pris le bras qu'elle me tendait. Mon lit avait été placé de l'autre côté du chariot des filles, me mettant à l'abri de l'agitation du camp. Je remerciai mon amie et m'allongeai. Presque immédiatement, mes yeux se fermèrent.

Outlaws - Une jeunesse Américaine - [Charles Smith x OC]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant