Chapitre XII: Paris 2

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Dans une sombre prison, comme il en fleurissait tant à Paris à cette époque ci:

- Christine?!

Les quatre sœurs Solignac se réveillèrent dans la misérable prison de la Salpêtrière, ancien hospice transformé en maison d'incarcération pour incarcérer les opposants à la Révolution.

- Christine? C'est bien toi? Répéta la plus jeune des sœurs.

- Oui mes sœurs c'est bien moi. Manon, la femme de votre geôlier a bien voulu me laisser entrer...

- Christine il faut absolument que tu t'en ailles, ne restes pas une seconde de plus ici! Ordonna Henriette, sa sœur aînée.

- Oui, pars retrouver Père! Reprit Agnès la benjamine.

- Je ne pourrais jamais être heureuse en sachant que je vous ai abandonnée! Gémit Christine. Je vais de ce pas me dénoncer, je viens vous rejoindre.

- Christine! S'exclama Louise, sa jumelle. Christine, répéta-t-elle en tirant sa sœur par son corset contre les barreaux de sa geôle. Christine, sort de cet endroit infâme et venge-nous. Sois le grain de sable qui s'assemblant à d'autre, fera sauter cette machine infernale qu'est la Convention.

Cette possibilité n'avait jamais été envisagé par la jeune fille, elle en resta toute abasourdie.

- Non je ne suis pas d'accord! Tu délire complètement ma sœur. S'insurgea Henriette, il faut qu'elle se mette à l'abri, Paris est beaucoup trop dangereux.

- Tu as toujours été la plus courageuse, continua Louise qui n'avait pas quitté des yeux sa jumelle, son regard noire déchirant le cœur de Christine.

- La plus ingénieuse, ajouta Agnès en sanglotant.

- La plus intelligente, gémit Emmeline.

- Il y a des cercles royalistes qui se battent dans chaque grande ville et on parle que la Vendée est prête à prendre les armes. Sois utile à la cause, rejoins-les, pour notre Salut et celui de notre pays, termina Louise. Bats-toi ma sœur, bats-toi en notre nom, notre nom à toutes les quatre qui ne pourront le faire. 

Henriette semblait être la seule contre cette idée, se vit réduire au silence. 

- Vous délirez toutes complètement, vous signez son arrêt de mort.

           Christine, les joues baignées de larmes, les regarda tour à tour, ses chères sœurs qui attendaient avec une sainte patience leur martyre. Elle les embrassa du mieux qu'elle put, malgré les barreaux. Chacune lui donna une mèche de cheveux, en souvenir d'elles. 

- Je vous le jure, je vous vengerez! Assura la jeune fille entre deux sanglots. Il ne se passera pas un instant sans que vous soyez dans mes pensées, sans que je ne pense à venger par le sang, le crime de vos bourreaux.

Christine embrassa particulièrement Agnès qui avait treize ans.

- Une dernière chose ma jumelle, reprit Louise la voix brisée de douleur, si tu le peux, je t'en pries, fais savoir à Antoine-Philippe, que je lui pardonne tout et que je meurs en l'aimant, comme au premier jour.

- Je le ferai Louise, bien qu'il ne t'a jamais mérité.

- Mademoiselle! Vite Venez!

C'était Manon la geôlière qui était arrivée, totalement paniquée. Elle arracha Christine au bras de ses sœurs, qui ne pût s'empêcher de hurler, et la tira hors de la prison sans demander son dû et la flanqua dehors.

                La jeune femme trébucha sur les pavés du devant de la prison, restant prostrée, courbée sur le sol. Elle pleurait douloureusement. Quelqu'un, elle ne sut qui, une présence forte et ferme l'a remit subitement sur pieds. Christine ne distingua qu'une silhouette informe sous le peu de lumière que lui procurait la lune. Apeurée, elle se mit à courir dans les rues de Paris, elle était affolée et perdue dans l'immensité de la ville, ne sachant où aller. Elle sortit du faubourg Saint Marcel, en évitant les rustres sans-culottes, les tricoteuses aux visages hargneux, les filles de joies et les voyous. Elle avait perdu ses souliers dans sa course, son chapeau et son châle. Ses pieds nus battaient les voies mal pavées et mouillées. Elle entendait des cris de tous côtés plusieurs fois on l'interpella, sans même tourné la tête, elle continuait à aller droit devant elle, hagarde, l'ombre qui l'avait aidé restait en sa mémoire. 

La Louve de la Grande ArméeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant