Partie d'Athéna - Chapitre 13

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[TW violence physique] [TW mention de viol (implicite)]


La prochaine Bataille aura lieu demain. Rachel a enfin eu l'autorisation de sortir, mais sans Athéna. Elle l'a raccompagnée dans sa petite chambre ce matin, et est partie aussitôt. Elle restera sans doute longtemps dehors, comme cela fait des jours qu'elle n'a pas pu aller se promener. Athéna en profite pour dormir, faire du sport et prier sans grande conviction. Elle s'agenouille devant la vasque, y fait couler un peu d'eau, et pense :

– Faites que je sois libre.

Elle voudrait que les Atouts l'entendent. Elle-même ne sait plus vraiment ce que ce souhait signifie, elle espère qu'ils comprennent mieux qu'elle ce qu'elle désire. Elle se remet debout. Sous son matelas se trouvent toutes les notes qu'elle a prises. Elle les relit, ébauche par ébauche. C'est presque comme si elle s'évadait à nouveau.

On frappe à la porte en fin d'après-midi. Rachel entre. Athéna, à peine réveillée, s'incline précipitamment devant elle. La Dame s'excuse :

– Pardonnez mon retard.

– Ce n'est rien.

Elles échangent un sourire. Athéna s'engage à sa suite dans les escaliers. Le garde de service referme la porte, mais ne les accompagne pas. Elles sont seules. Elles restent silencieuses un long moment, le temps de descendre la tour. Rachel prend la parole plus tard :

– C'est que je suis passée aux bains, d'habitude je m'y rends le matin, mais quand le Roi a accepté que je retourne en forêt je n'ai pas pu attendre.

– C'était une bonne promenade ? s'enquiert Athéna.

Elles traversent un large canal, grâce à des morceaux de béton espacés les uns des autres. Rachel, habituée, fait de longues enjambées. Athéna bondit de dalle en dalle pour la rattraper.

– Oui. Cela m'a fait du bien.

– Décrivez-moi.

La Dame, arrivée de l'autre côté, lui jette un regard surpris. Athéna s'immobilise et ajoute :

– S'il vous plaît. Ça me fera du bien de vous écouter parler.

Rachel commence alors à lui raconter sa balade. Elle lui décrit les arbres, la lumière, les bruits. Elle parle d'un oiseau qu'elle a croisé, d'une fleur qu'elle a cueillie. Elle a rassemblé assez d'herbes pour soigner les soldats lors de la prochaine Bataille, et ça la satisfait. Elle a pu tremper ses pieds dans un ruisseau (un vrai, qui n'ait pas un lit de faïence) et contempler la nature s'éveiller autour d'elle. Il a même un peu plu. Son long et doux récit dure tout le temps du trajet jusqu'à la bibliothèque, et même un peu plus. Athéna n'en perd pas une seule phrase.


Depuis leur discussion à propos de leur mariage, Rachel relit tous les livres d'histoire de la bibliothèque. Elle cherche quelque chose, Athéna ignore quoi. Elle n'ose pas la questionner. La Dame étudie en silence, les sourcils froncés, repoussant parfois une tresse qui la gêne. Athéna lit à sa suite, chaque ouvrage que Rachel termine elle le prend. Elle apprend beaucoup – des dates surtout. La monarchie des Carreaux, ainsi que celle des autres Couleurs, existe depuis près de trois siècles, et a été créée pour mettre fin à une guerre (ce qu'Athéna trouve absurde, puisque cela n'en a que débuté une nouvelle). Elle trouve beaucoup de récits vaniteux sur les Batailles notables qui se sont déroulées. À chaque fois il lui semble que les Carreaux ont écrasé les autres armées, mais elle devine que si elle avait accès à la bibliothèque des Piques, elle trouverait des livres similaires. Elle n'est pas certaine de pouvoir comparer toutes ces informations avec l'histoire de sa Couleur, puisqu'elle ne la connaît pas. Personne ne lui a rien enseigné. Elle ignore encore beaucoup de choses – mais elle est patiente. Ici, elle a le temps de rattraper son retard.

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