Partie de Rachel - Chapitre 2

79 10 5
                                    

Au menu : sororité purée


[TW description d'agression sexuelle/harcèlement sexuel] (ça se passe pas pendant le chapitre, juste elles le racontent)


Elle est arrivée à l'heure au banquet, assez tôt que Carl ne soit pas déjà assis sur le trône. Elle a pu s'y installer – aussitôt les regards des Carreaux l'ont transpercée. Elle craint que personne ne la trouve à sa place ici. Pourtant, elle ne peut pas se permettre de laisser le pouvoir au cavalier. S'il avait été dans sa position ce soir, il aurait simplement imité César. Il n'aurait pas interdit comme elle qu'Athéna se fasse battre. Elle a lutté pour leur épargner, à la Dame et elle, toutes les violences possibles. Ça ne sera en vain.

Elles ont pu s'éclipser à la fin du banquet, une fois les hommes ivres. Athéna a l'air fatiguée, mais quand Rachel lui demande si elle veut dormir, elle refuse.

– Nous avons attendu longtemps de pouvoir passer du temps ensemble sans crainte. Profitons-en.

Alors Rachel l'entraîne au sous-sol, auprès de la harpe. Elles allument les bougies ensemble, transformant l'endroit lugubre en refuge. Elle prend place sur le tabouret, et Athéna s'assoit face à elle. Le béton ne doit pas être des plus confortables. Elle pourra amener des coussins la prochaine fois – ou peut-être jouer ailleurs, puisqu'elle le peut maintenant. Elle soupire.

– Dame Rachel ? Qu'y a-t-il ?

Elle devrait se réjouir de leur victoire. Elle s'en sent incapable.

– Il s'est passé quelque chose ?

Elle reste immobile. Elle n'a pas à inquiéter Athéna avec ce genre de choses – elle-même aimerait avoir encore la sensation de sécurité que sa conversation avec Carl lui a ôtée.

– Nous sommes alliées, à présent, insiste la Dame. Vous pouvez me faire confiance. Je pourrais mieux vous aider si je suis au courant de ce qui se trame.

– Vous avez raison.

Ce n'est peut-être pas si égoïste, de saisir la main qu'elle lui tend. Elle inspire.

– Je ne me suis jamais bien entendue avec Carl. Il est imbu de lui-même et égoïste et hypocrite. Il me traite comme un objet. Un jour, César s'est montré d'une violence extrême. Je ne sais même plus pourquoi il était en colère. C'est Carl qui m'a accompagnée, à l'infirmerie, pour que je me repose loin du Roi. J'étais visiblement très mal, très faible. Il en a profité pour me faire une proposition déplacée. Il m'a promis que si j'acceptais, il me protégerait. J'ai refusé et il m'a dit que je méritais ce qui m'arrivait. J'avais à peine quinze ans. Lui trente-deux. Le lendemain il a dit au Roi que c'était moi qui lui avais fait des avances. J'ai nié, mais César ne m'a pas crue. Il était furieux. Furieux.

Elle déteste toutes les images qui l'envahissent. Athéna prend ses doigts dans les siens, avec beaucoup de douceur. Elle n'a pas l'habitude de ce genre de contacts – être touchée pour être rassurée.

– Je suis désolée. Que vous ayez eu à vivre ça.

– Il m'a proposé à nouveau, laisse-t-elle échapper en relevant la tête. Tout à l'heure. Il voulait le trône mais était prêt à le partager avec moi. Si je répondais à ses avances.

– Il vous a fait du mal ?

– Touchée.

Athéna se redresse.

– Je suis désolée.

– Ce n'est pas de votre...

– La prochaine fois, je serai là.

Les ReinesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant