CHAPITRE X

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Je reste plantée devant la porte de la chambre de Cinq quelques minutes avant de me décider à cogner deux fois dessus pour l'ouvrir. Je le trouve assis en tailleur sur son lit, sa trousse de secours ouverte devant lui, en train de planter une aiguille dans son bras. C'est vrai qu'il est blessé, il doit recoudre la plaie. Il ne me regarde même pas quand je m'avance vers lui d'un pas hésitant.

- Tu veux de l'aide ?
- J'ai déjà dit non à Luther.

Je vois...

- Est-ce que je ressemble à un géant de 3 tonnes ? 

Il s'arrête pour se tourner vers moi, me regardant pendant un court instant avec hésitation, puis me fait signe qu'il accepte mon aide. Il ne faudra pas me le dire deux fois. Je vais le rejoindre pour m'asseoir sur le bord du lit et prendre l'aiguille dans ses mains. J'espère que ça non plus je n'aurai pas à le faire tous les soirs. Je reprends donc son travail déjà entamé, le voyant légèrement grimacer du coin de l'œil. Je sais qu'il essaie de ne pas montrer qu'il a mal, mais n'importe qui souffrirait ne serait-ce qu'un tout petit peu en se faisant planter une aiguille dans le bras à plusieurs reprises. Et si je n'avais jamais eu à me recoudre une blessure, je saurais ce que ça fait grâce à notre cher père et son idée merveilleuse de nous faire tatouer. Même si le tatouage a le mérite d'être moins douloureux, puisque que plus rapide. La pièce est plongée dans un silence de mort. J'essaie de me concentrer pour être précise et ne pas lui faire mal, et lui...je suppose que s'il arrive à parler dans son état, il ne doit pas avoir grand-chose à me dire. Je finis de faire le dernier point, avant de couper le fil pour poser un pansement sur la plaie. Il regarde mon travail en bougeant un peu son bras.

- Merci. 

Je lui souris.

- Je t'en prie. 

J'aurais préféré que ça n'arrive pas. Qu'il ne se fasse pas toucher. A trop vouloir jouer les héros...

- Tu habites loin ? m'interroge-t-il soudain en se relevant pour enfiler une nouvelle chemise blanche.
- A environ une demi-heure en voiture. 

Je voulais partir plus loin de cet endroit mais mes choix étaient assez limités. Je sais pourquoi il me pose cette question pourtant.

- Elle est douée, ajoute-t-il en mettant le gilet de son uniforme par-dessus sa chemise.

C'est exactement ce qu'a dit Allison. Et très honnêtement, je n'ai jamais douté de ce point. Je sais que Grace est très forte, je sais qu'elle pourrait être bien plus puissante que nous, et c'est ma plus grande peur.

- Douée mais têtue. Quand je lui crie dessus comme je l'ai fait tout à l'heure, j'ai parfois l'impression d'entendre le vieux. 
- Il faut admettre qu'il n'avait pas entièrement tort. 

Je sais. Je le déteste, mais je sais. 

- Il nous a appris la discipline en nous inspirant la peur. Je ne veux pas de ça pour ma fille. 

Il se dirige vers sa veste comme si de rien n'était. Je le regarde faire, sans vraiment savoir quoi dire de plus. Ce que j'ai voulu lui dire ces six...onze...dernières années...

- Cinq...c'est elle qui m'a sortie de l'apocalypse et ramenée ici.

Il se retourne subitement à l'entente de ces mots, perplexe est curieux. Je savais que ce jour viendrait où j'allais devoir lui parler de cette journée. La seconde pire journée de ma vie...

12 ANS AUPARAVANT

Cinq ne devrait plus tarder à rentrer. J'ai hâte de lui montrer ce que j'ai appris à faire avec mes pouvoirs aujourd'hui. Je crois que j'avance pas mal. Je me tourne vers un énorme rocher, me concentrant un moment, avant de lever ma main puis de l'abattre comme si je tenais un fouet. Et au bout de deux secondes, le gros caillou, se fend en deux. Cinq dit toujours que je dois essayer de trouver de nouvelles techniques de défense et d'attaques pour ne pas laisser mon pouvoir s'endormir. Pourtant ça va bientôt faire 10 ans qu'on est là et personne n'a jamais essayé de s'en prendre à nous. On adorerait ça. Bon...il y a bien eu cette Directrice il y a 3 ans mais ce n'était rien de bien important. Je suis passée à autre chose, je n'ai même pas trouvé ça utile d'en parler à Cinq. Il aurait hurlé que j'aurais dû saisir cette chance de partir d'ici, quitte à le laisser seul. Mais je ne veux pas partir, j'aime bien cet endroit finalement. Loin de papa, près de Cinq. Je ne voudrais être nulle part ailleurs. Soudain le sol se met à trembler. Je perds l'équilibre, rattrapée de justesse par un courant d'air. 

Umbrella Academy ~ Parce que tu es avec moi [Numéro 5]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant