Chapitre 10 _ Lundi 10 décembre (1/2)

2.1K 223 0
                                    


J'ai passé la nuit à me tourner dans mon lit en cherchant le sommeil. Chose rare, Jiminy en a eu marre et est parti dormir ailleurs, lui qui me colle d'habitude envers et contre tout, a préféré le plaid sur le canapé au rez-de-chaussée. Chaque souvenir du baiser me faisait ressentir d'énormes bouffées de chaleur et le désir se faisait de plus en plus présent. J'ai dû me résoudre à faire réduire la tension qui habitait mon corps toute seule, avec comme seules images mentales, l'aperçu, que j'ai eu ce week-end, du corps du frère de ma meilleure amie. Mon imagination a été très fertile, seule une question demeurait et a renforcé ma frustration. Pourquoi mes parents ont débarqué à ce moment-là ? Surtout pour me demander de les accompagner à l'aéroport le vingt-trois décembre et histoire que je n'oublie pas que je passe le réveillon sans eux. Je me serais très bien passée de la complainte de ma mère, de la tronche tirée de mon père qui, visiblement, n'était pas d'accord avec elle. Je le remercie d'avoir écourtée la tirade de sa femme et de ne pas avoir fait semblant qu'ils étaient d'accord sur le sujet, chose que ma mère n'a guère appréciée.

Je décide de me lever malgré le manque de sommeil. Il est cinq heures du matin, mon café me tiendra éveillée. Je descends pour prendre mon petit-déjeuner dans mon pyjama licorne tout propre, je vais glisser l'idée à Laura que j'aimerais bien en avoir un de plus pour ne pas remettre ma chemise de nuit d'étudiante et un peu plus sympathique à regarder pour un homme. Pendant que la cafetière se remplit, je vais accrocher ma décoration du jour. La veille, j'ai pioché un porte-clés avec un ours polaire que j'ai détourné depuis des années en ornement de sapin. Aujourd'hui, j'attrape une vielle photo prise dans un photomaton avec Laura quand nous avions quinze ans. Avec notre look du milieu des années 2000 et notre fausse attitude rebelle, je pourrais pleurer de rire en repensant à notre adolescence. Le collier ras de cou et le maquillage bleu pâle des yeux ne nous mettaient pas en valeur. À chaque fois, j'oublie que Laura avait tenté une permanente, même si ce n'était pas horrible en soi, cela ne lui allait pas du tout. Cette image me rappelle de très bons souvenirs, je ne la considère pas comme une photo de la honte, je choisis de la placer vers le haut de mon petit sapin artificiel.

Je reçois un message de ma fameuse complice de photomaton où elle me rappelle qu'il faut que je garde Emma, cet après-midi, pendant son rendez-vous avec son gynécologue. Un deuxième arrive où elle rajoute qu'une discussion sérieuse est à l'ordre du jour. J'en conclus qu'elle n'a pas aimé que l'on parte comme des voleurs la veille. Je lui envoie un bref message pour lui confirmer que tout est bon avant de finir mon petit-déjeuner et de partir m'habiller.

Je passe ma matinée à préparer mon interview de mercredi sur le marché de Noël de Besançon. Je bosse sur la thématique de ses trois dernières années puis je contacte l'équipe pour avoir des images d'archives pour compléter mon reportage, les images que je trouve sur Internet ne m'aident pas à me plonger dans l'ambiance. Je passe mon temps à répéter au téléphone que j'enverrais une version du texte mardi soir pour la voix-off et le montage des images qui vont avec. Vive la confiance ! J'ai la tête comme un chou-fleur quand j'en ai terminé mais je suis contente d'avoir pu tout obtenir avant l'après-midi.

Je mange un peu plus tard que d'habitude, je mets les infos en bruit de fond pendant ce temps. Mon esprit s'évade et je pense à ce qu'il aurait pu se passer la veille si nous avions été seuls à l'hôtel ou si mes parents n'étaient pas arrivés si tôt. Je n'arrive plus à nier l'attirance que je ressens pour le frère de ma meilleure amie, même ses blagues ne m'irritent plus. J'embrase en pensant aux muscles d'Alexandre. J'hésite à le contacter pour savoir ce qu'il faut que j'annonce à sa sœur, mais je préfère en parler avant à Laura pour avoir son avis. J'ai besoin d'être sûre qu'elle accepte avant de me lancer véritablement dans cette relation.

Le téléfilm de l'après-midi est à peine commencé que la sonnette retentit, Laura dépose Emma.

— Ma chérie, va voir le sapin de ta marraine. Je dois lui dire deux-trois petits trucs avant de partir, lui demande-t-elle.

Ma filleule fonce dans le salon pendant que sa mère me fait la bise.

— J'ai pas beaucoup de temps, Pauline, je suis déjà être en retard à mon rendez-vous. Il faut que tu couches Emma vers quinze heures, elle a vu le Père Noël ce matin à l'école donc elle est encore un peu excitée par ça, mais heureusement elle est fatiguée du week-end, elle devrait s'endormir assez vite. Par contre évite les sucreries, ça plus le Père Noël, on va péter un câble ce soir si elle est survoltée. Ma visite ne dure pas longtemps chez le médecin mais après il faut que je fasse tu-sais-quoi pour la fin du mois. Si j'ai du retard, ne t'inquiète pas, tu sais comment ça se passe dans ce genre de magasin en période de fêtes.

Prête à repartir, elle s'arrête juste un instant sur le seuil pour me dire, sérieusement.

— Par contre, tu n'échapperas pas à la discussion que vous avez lâchement fuie hier. À tout à l'heure, me dit-elle avant de sortir de la maison.

Pour occuper Emma avant de la coucher, je vais chercher l'étoile que j'ai achetée au marché de Noël et je lui montre comment je la place. Je suis récompensé d'un "Il est trop beau, ton sapin, Marraine." avant qu'elle me réclame un gâteau. Je sais que Laura ne souhaite pas qu'elle mange entre les repas alors je lui refuse mais lui propose de choisir celui qu'elle mangera à son réveil pour son goûter. Pour éviter qu'elle boude, je lui montre comment jouer avec Jiminy et un bout de guirlande. Mes diverses tentatives pour la divertir ont finalement réussi à porter leurs fruits quand elle baille. Une demi-heure après l'avoir couchée, sa mère arrive. Elle enlève ses affaires pendant que je lui prépare un jus d'orange. Ma meilleure amie regarde son verre avec lassitude.

— Fichue grossesse ! Le café me manque terriblement, se plaint-elle. En plus, y avait un monde de dingue dans les magasins. Il me restait deux bricoles à trouver et j'ai eu le droit à deux dindes pénibles. Franchement, on s'en fout que son fils sache faire ceci ou cela, fallait juste qu'elle bouge ses fesses pour pouvoir avancer à la caisse. L'autre a fait refaire trois fois le papier cadeau, j'ai failli lui dire de le faire elle-même au lieu d'embêter la jeune fille qui le faisait pour son association. Les gens sont vraiment horribles, marmonne-t-elle.

Je souris en l'imaginant fusiller du regard les deux femmes.

— Ta fille a failli faire un caca nerveux quand j'ai refusé de lui donner un gâteau quand tu es partie, lui raconté-je.

— Ma mère est pénible de lui donner cette habitude, soupira-t-elle. Heureusement j'ai ma belle-mère qui me soutient sur ce coup.

Elle s'arrête de parler et me pointe du doigt.

— Je sais ce que tu essayes de faire ! Tu n'arriveras pas à détourner la conversation pour échapper à tes explications. Je veux tout savoir ! Commence par me raconter comment tu t'es retrouvé à dormir avec mon frère, le plus important comment tu t'es retrouvée sur lui dans la même pièce que ma fille et je veux tous les détails, me demande-t-elle avec un sourire en coin.

Toute la magie de NoëlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant