8 Août (2/2)

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Assis dans une cafétéria du centre-ville, je sirote tranquillement un décaféiné en attendant que River arrive. Il m'a donné rendez-vous ici à dix-sept heures piles, mais il est déjà et quart. Je ne lui en veux pas pour son léger retard, mais cela ne peut pas m'empêcher de m'inquiéter pour lui.

Mon estomac est vraiment en vrac, appréhendant comme jamais la réaction de ses parents. Je sais qu'il leur a tout raconté. J'ai essayé de lui tirer les vers du nez par texto, mais à la place, il m'a dit de venir ici. Si je n'ai pas pris un café, c'est bien à cause de mes nerfs. Je n'y peux rien, j'ai vraiment peur de ce qui peut se passer par la suite. Je n'ai jamais rencontré d'obstacles dans ma famille, mes mères m'ont toujours soutenu, quoi qu'il advienne. River et moi avons grandi dans des ambiances différentes.

Chez moi, ça a toujours été l'amour au-dessus de tout, chez lui, ça a été la discipline. Je doute beaucoup que son paternel accepte la sexualité de son fils, tout comme le fait qu'il veuille cesser de perdre son temps à étudier quelque chose qui ne le passionne pas du tout. J'espère cependant que sa mère arrivera à l'amadouer, même si une certaine partie de moi en doute.

Je crois que j'ai plus la trouille que River, alors que c'est lui qui va devoir faire face aux conséquences de ses actes. Toutefois, jamais je ne lui demanderai de choisir entre sa famille et moi. J'en serais incapable. Tout comme il ne m'a pas demandé de le faire avec Rory. Ça m'agacera s'ils ne comprennent pas, mais on n'éduque pas les gens du jour au lendemain, il faut du temps.

J'essaye de rester positif, mais je dois avouer que tout était beaucoup plus simple lorsque nous étions loin de Corvallis et que l'on ne devait pas s'inquiéter de la réaction des membres de sa famille. L'anxiété me gagne à chaque instant qui passe, grandissant de plus en plus et me noyant dans mes insécurités les plus profondes. Je panique presque lorsque plein de scénarios s'imposent à moi, plus catastrophiques les uns que les autres.

Les gens autour de moi me regardent, sans doute parce que je n'arrête pas de titiller ma jambe frénétiquement et que ça les agace. Mes doigts paient cher ce soir, je crois que je ne me suis jamais autant rongé les ongles de ma vie. Cette attente est insupportable. Le fait de ne pas avoir de nouvelles me tue !

Et ce retard... d'accord, ce ne sont que quinze maudites minutes, mais ça me donne de quoi cogiter !

— À tellement frapper du pied par terre, tu vas péter le sol de la cafète, dit une voix derrière moi, sardonique.

La tension dans mon corps se relâche en la reconnaissant et River vient s'asseoir à côté de moi, et non en face.

Avant que je ne puisse vraiment le voir, sa main se plaque sur ma nuque et ses lèvres se posent sur les miennes, accélérant à nouveau les battements de mon cœur. Même si après le départ de Rory, nous nous sommes lâchés lors du chemin de retour quant au fait de se montrer effusifs en public, cette fois c'est très différent : nous sommes à Corvallis, l'endroit que nous connaissons depuis toujours et où presque tout le monde nous connaît. Enfin, surtout lui et sa réputation de tombeur.

Le regard des autres, je m'en fiche, la sensation est juste bizarre. Je me sens épié, mais peut-être que je me fais simplement des idées.

River se sépare et me fait un clin d'œil. Il a l'air radieux, contrairement à ce que je me suis attendu. Peut-être bien que la discussion avec ses parents s'est mieux déroulée qu'escompté ? En tout cas, c'est ce que j'espère.

— Ça ne te gêne pas qu'on nous voit ?

— Ce que les autres pensent, je m'en bats les steaks, Theo, répond-il sans aucun hésitation. Tu es mon copain, j'ai le droit, et surtout, le devoir de t'embrasser.

Nuance Arc-en-Ciel ©Où les histoires vivent. Découvrez maintenant