Mon cerveau fonctionne à toute vitesse, fouille, rassemble, scanne, répertorie tout un tas d'éléments. Quand nous nous sommes connus, il a trompé sa copine quelques semaines ou mois. Donc capable de le refaire.
Mon mari a un boulot qui lui permet de rencontrer du monde. Il a des rendez-vous d'affaires, des salons, des horaires très irréguliers... Le profil type du mari infidèle (la littérature sur le sujet ne manque pas sur internet). C'est un beau mec, grand, brun, mince, très sportif. Très souriant. Au summum de son sex appeal à quarante ans. Il n'a pas connu beaucoup de filles avant moi, je n'ai même jamais entendu parler d'autres filles que celle qui lui avait mis une baffe quand il l'a quittée, donc certainement une seule fille avant moi. Je m'étais toujours dit que n'ayant pas vraiment profité de son adolescence pour tirer à droite et à gauche, il aurait sûrement besoin de vivre ça plus tard.
On y est et je n'ai pas vu l'échéance arriver. Trop confiante, trop sûre de moi, trop prise par le quotidien.
Pourtant je pensais que ça ne pouvait arriver que si la femme se laissait aller (en gros si elle devenait moche) et si le couple ne faisait plus rien ensemble. Or je ne me laisse pas aller physiquement, je fais attention, même si j'ai du mal à me débarrasser de quelques capitons suite aux grossesses. Nous aimons faire des voyages, et les années 2007 à 2009 ont été prolifiques, Martinique, Cap Vert, Canaries, Zanzibar, planche à voile, kitesurf...
Pas vraiment la fille qui se laisse aller. Il me semble.
Le point faible : le sexe. L'idée m'avait traversé l'esprit plusieurs fois. Pas assez de sexe. Le boulot, les enfants... La libido n'est pas toujours à son apogée. Au point quelquefois de redouter, j'avoue, le moment du coucher en me demandant ce que j'allais bien pouvoir inventer pour éviter de passer à la casserole. Or un homme a un besoin vital de se vider les couilles... Donc situation favorable à un adultère. Mais bon, voilà, on y pense, et puis on y pense plus et le temps passe...
Plus les petites choses qui m'ont interpellée régulièrement : tiens, pourquoi s'est-il acheté de nouveaux caleçons, comme ça sans raison, des odeurs de sperme, ou au contraire des odeurs de savon comme s'il avait pris une douche alors qu'il a passé la journée au travail...
Il faut toujours écouter son instinct et ne jamais négliger les petits détails...
Mes recherches ont donc commencé.
Je ne pensais plus qu'à ça. J'avais déclenché un truc, comme si j'avais appuyé sur un bouton ON et que le OFF n'existait pas. Pas possible d'éteindre. Incroyablement efficace comme processus, ça déclenche même des options psychoses et paranoïas qu'il faut parvenir à maîtriser pour rester la tête sur les épaules, continuer à raisonner, prendre du recul et ne pas interpréter les choses de travers.
Première étape : lire les sms sur le portable de mon mari. Pas facile de choper son portable. Il l'a constamment avec lui sauf quand il prend une douche, et encore, la salle de bain ouverte sur la chambre ne facilite pas les choses, il faut agir très discrètement et très vite.
Je vérifie presque tous les jours. Les sms échangés avec Marion sont nombreux à partir de mars, dès qu'elle a démarré son poste dans l'entreprise. Beaucoup trop nombreux à mon goût... Des sms de plus en plus amicaux, des bises, des "bonne nuit", des bisous, son prénom à la fin de chaque message. Elle se met à l'appeler par son surnom, Fab, il lui dit "salut miss". Des messages à rallonge...lui qui est si peu bavard, il ne fait jamais ça avec moi...
Ça me mine, ça m'excite, ça me met en colère, je suis électrique...
Début juillet mes parents m'invitent à passer une petite semaine chez eux avec les enfants. Fabrice ne vient pas parce qu'il participe à un triathlon auquel je n'ai aucune envie d'assister. Aucune envie de jouer à l'épouse patiente, admirative et enthousiaste que j'ai été à une époque, je me souviens encore du jour où j'ai attendu cinq heures sur un terrain d'atterrissage de parapente avec Nicolas qui avait six mois, angoissée au point d'appeler le Peloton de Gendarmerie de Haute Montagne, "je fais juste un petit vol, attendez moi en bas, j'en ai pour une petite heure" avait-il dit.
Les échanges trouvés en rentrant de chez mes parents me font bouillir.
Marion : "Coucou Fabrice ! J'ai loupé ton appel... Alors ce triathlon ? J'ai pas pu venir te féliciter à l'arrivée j'espère que tu m'en veux pas. Mais je suis sûre que tu as trop géré tu me racontes demain :) Nous une nuit à la belle étoile dans le froid, la descente des torrents en raft encore un bon we mais je suis achevée là ! Demain je peux pas covoiturer on se retrouve au boulot. Bonne nuit à demain Fab ;)"
Réponse de Fabrice : "Le triathlon c'est épuisant mais c'était vraiment sympa avec ce beau temps. Là je viens de faire un vol, super bon de voler en fin de journée ! Pour demain je suis en déplacement donc covoiturage mardi et parapente en fin de journée, cette semaine je suis "célibataire" ma femme et les garçons sont chez mes beaux parents, bye et bonne nuit aussi Marion."
Cette semaine je suis "célibataire" ma femme et les garçons sont chez mes beaux parents...
Hé bé...
Tentative d'invitation absolument claire. Mais elle n'est pas très emballée puisqu'elle n'est pas venue le voir au triathlon. Un petit râteau en vue ? Il doit tellement frétiller qu'il en a oublié ses quinze ans de plus qu'elle.
Weekend du 9 juillet. Il a prévu une sortie montagne avec une équipe de collègues de travail au Grand Paradis en Italie. C'est une course d'entraînement pour l'ascension du Mont Blanc prévue en septembre.
Le 9 juillet c'est le jour de mon anniversaire. J'appréhende cette sortie surtout, je veux être claire, parce qu'il va passer ce jour-là avec Marion. Dans d'autres circonstances je n'en aurais rien à foutre, je ne tiens pas particulièrement à fêter mon anniversaire.
Il sait que j'appréhende, nous en avons un peu parlé de cette Marion. Je n'ai pas pu m'empêcher de lui faire part de mon agacement à en entendre un peu trop parler. C'est même parti en engueulade (chose très très rare) et j'ai envoyé valser à travers la cuisine un beau cheesecake que j'avais fait (chose très très rare aussi) et qui a fini comme une bouse sur le carrelage. Première fois de ma vie que je m'énerve comme ça. Évidemment il a réagi en me disant que je déconnais complètement, que je me faisais des idées, que j'étais complètement à côté de la plaque, qu'évidemment il parlait d'elle puisque c'est sa collègue de travail. Pas question qu'il annule ce weekend que je me suis par conséquent appliquée à pourrir tant que je pouvais en étant extrêmement froide au téléphone et dans mes messages. Ma petite vengeance. Pourtant ce n'est pas mon genre. Je suis quelqu'un de très cool, mais là...
Quelques jours plus tard, petit évènement : Fabrice a un nouvel Iphone payé par le boulot. Il laisse donc son ancien portable à la maison...
Quel con...Je vais pouvoir le fouiller de fond en comble...
C'est le début du cauchemar. Avec le recul je me demande si j'ai bien fait...Oui sans doute.
VOUS LISEZ
La femme rose aux coulures - Tome 1
ChickLitJ'ai pris ma petite pelle et j'ai creusé toute seule un trou bien profond, j'y ai jeté tout le bordel dans un sac plastique (non biodégradable), bien rebouché et planté de jolies petites fleurs au-dessus pour que personne ne se doute de rien. Et j'a...