Chapitre 11. I.

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« Les sirènes possèdent de multiples dons. Différents de ceux des sorcières des mers, les Néréides, ces dons proviennent du fait que les sirènes sont en parfaite osmose avec l'océan. Elles vivent par lui et pour lui. Et au-dessus d'elles, la Lune veille.

Bien évidemment, les capacités les plus célèbres chez ces créatures restent leur chant [...] et leur fabuleuse aptitude à sonder les désirs afin d'en revêtir l'apparence.

Cependant, elles peuvent également déclencher des tempêtes, des maelstrom et autres phénomènes catastrophiques. De plus, répondent à leurs appels les monstres des profondeurs : Léviathan, serpent de mer, Trolual, Luska, Kraken... »

Extrait du Répertoire de la sorcellerie depuis le commencement à nos jours par Valentinus, premier du nom et fondateur de l'ordre des faucheurs, Chapitre IV. Monstres et créatures.

*

Lorsque son cœur avait cessé de battre, en neuf cent après J.C., Erik avait d'abord accueillit ce vide avec soulagement. La peine avait été effacée. C'était tout ce qu'il désirait. Il avait ensuite appris à vivre avec l'absence des battements de son organe. L'Ordre des faucheurs avait été une échappatoire au néant de son être. Les nouveaux membres avaient rejoint cette grande famille au fil des siècles. Ils s'étaient liés à certains. En avaient perdu d'autres. Et la Mort avait toujours été derrière lui, lui montrant la juste voie. Et sans plus son cœur pour l'en distraire, il avait pu traverser les siècles ainsi. L'océan l'avait aidé à noyer tous ses fantômes du passé...

Jusqu'à qu'il ne les recrache sur le rivage.

Désormais, l'organe dans sa poitrine avait retrouvé son rythme si dérangeant. Et chaque fois que l'Immortel se trouvait face à Meredith... ce rythme accélérait, le plongeant dans un abîme de souffrance. Son cœur ne semblait réagir qu'en présence de la sirène. Un millénaire auparavant, elle avait clamé qu'il lui appartenait. Et Erik était effrayé d'admettre qu'elle avait eu raison. Son cœur appartenait, sang et chair, à celle qui l'avait fait battre alors qu'il n'était qu'un humain... et qui l'avait brisé sans états d'âme.

Et c'était ce cœur qui battait, ce cœur qui désirait, qui provoquait ce trouble que rien ne pouvait empêcher. Le tueur de monstre ne pouvait plus se mentir. Au fond de lui, un vestige d'amour persistait toujours envers Meredith.

La sirène ignorait tous des tourments de son ancien amant. Ce dernier le dissimulait à merveille.

« Mer...

— C'est drôle, un petit animal est venu me voir tout à l'heure... susurra-t-elle, d'un ton traînant.

Sa main glissa le long de la planche en bois qui délimitait le cadre de la porte alors que joueuse, elle se recula légèrement, se dissimulant toujours plus dans l'ombre. Le faucheur, impassible, ne répondit bien. Il attendait qu'elle poursuive. S'il était troublé par le manège de celle qu'il avait jadis aimé, il n'en montrait rien. Il savait que la moindre étincelle pourrait faire dégénérer les choses. Et il se devait de conserver le contrôle.

— Il m'a murmuré à l'oreille qu'un beau faucheur désirait me voir... Bien évidemment, je me suis demandée pourquoi... Si ce n'est pas pour me tuer.

Son ton était devenu soudain bien plus glaçant et cinglant. Lentement, Erik secoua négativement la tête.

— Je ne veux pas te tuer.

— C'est étrange, c'est pourtant ce que tu disais lors de notre dernière rencontre.

— Les choses ont changé depuis.

Les Faucheurs III - Chant MortelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant