Chapitre 20 - Case départ [1/2]

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Finalement, les deux inspecteurs avaient repoussé l'étude du rapport d'Aleksy au lendemain, trop épuisés après l'interrogatoire de Lavande et ayant besoin de repos pour poursuivre l'affaire avec le plus d'efficacité possible, bien que tous deux aient fortement peiné à trouver le sommeil malgré leur fatigue, et le mal de crâne en ce qui concernait Martial, leurs pensées les maintenant éveillés en tournant et retournant toute cette histoire.
En arrivant ce matin, après une nuit agitée, les deux inspecteurs accompagnés de Tanguy, qu'ils se relayaient pour aller récupérer à l'institut Belforde, trouvèrent Aleksy dans leur bureau, installé sur la chaise de Martial et sirotant une tasse de café, celle de Martial également.
Il les salua d'un large sourire en leur demandant, certainement plus par politesse que par réel intérêt, comment leur nuit s'était passé, toujours avec son accent polonais.
S'abstenant de répondre, leurs cernes parlant d'elles-mêmes, ils mirent leur ordinateurs en route, se préparant à leur journée de travail, puis, s'installant debout derrière Julie assise, puisque son siège était occupé, pendant que Tanguy prenait des notes dans un coin, Martial lança à Aleksy :

« Alors ?
- Bah, je suis allé faire un petit tour à l'Assemblée et je peux vous dire que y en a qui se baladent sans leur ombre là-dedans. Annonça Aleksy.
- Tous ? Demanda Julie.
- Non. Notre ami Victor est malin. Il a pris que celles de ceux dont la voix avait le plus de poids et qui avaient le plus de chances d'entrainer les autres. Juste le nécessaire.
- Une seule personne privée de liberté c'est déjà trop. Marmonna Julie avant de reprendre plus haut, il faudra nous faire une déposition dans les règles.
- Très bien. Et j'ai pris en photo ceux que j'ai pu pour montrer qu'ils ont plus d'ombre par un autre témoignage que le mien (les deux inspecteurs lui renvoyèrent un regard surpris, étonnés par la présence d'esprit d'Aleksy). Bah quoi ? Eh, on s'en sort pas comme je l'ai fait en étant stupide ! (il confia son téléphone à Julie). Les photos sont là-dedans.
- Et bien merci beaucoup. On va demander une analyse au labo pour prouver que c'est pas un montage, expliqua Martial, Tanguy, tu peux leur apporter, s'il te plait ?

Le garçon acquiesça, se rendant utile dès qu'il le pouvait et ravi de le faire à chaque fois, puis prit le portable d'Aleksy, préalablement protégé par une pochette plastique qui comportait une étiquette sur laquelle était inscrites les quelques informations concernant l'objet, que lui tendait l'inspecteur Carmody. Il alla pour sortir et se diriger vers le laboratoire d'analyse scientifique du poste.
Avant qu'il ne franchisse la porte et quitte le bureau, Aleksy lança qu'il préférait qu'on ne fouille pas dans ses messages avec un sourire espiègle. Martial marmonna tout bas, n'appréciant pas la légèreté que manifestait le jeune homme polonais alors que la situation ne cessait de s'aggraver et de se détériorer autour d'eux.
Après tout, ils venaient de découvrir que la décision sur le statu des magiciens avait été manipulée, qu'une partie de l'autorité du pays servait de pantins à un magicien et ils se retrouvaient, deux inspecteurs dans une petite ville, à devoir affronter et gérer tout cela.
Ce n'était cependant pas la première fois qu'Aleksy paraissait ne pas prendre les choses au sérieux.
En fait, depuis qu'il était venu, répondant à l'appel de Monsieur Moreau, Aleksy, bien qu'il s'impliquait, ne semblait pas vraiment s'investir mentalement, comme si il s'en moquait sur les bords. L'instant n'était cependant guère à se questionner sur la personnalité du jeune homme, toujours installé sur la chaise de Martial, qu'il ne comptait apparemment quitter que lorsqu'il aurait terminé son café qu'il buvait à petites gorgées.
De toute manière, il devait remplir sa déposition officiellement alors ils avaient besoin de l'avoir à proximité. D'ailleurs, débutant la journée avec efficacité, Julie lui donna le formulaire en le priant d'y retranscrire ce qu'il avait observé à l'Assemblée.
Le jeune homme s'exécuta en s'efforçant de noter toutes les précisions sans rien oublier alors que Martial et Julie échangeaient sur tout ce qu'il leur fallait faire aujourd'hui : contacter le juge pour lui demander son avis sur le cas de Lavande et se charger de ladite Lavande selon les positions de la juridiction à ce propos, voir le responsable des relations publiques du poste pour décider de ce qu'ils allaient dire à la presse à propos de l'incident de l'institut Belforde, les gens ne se contentant évidemment pas des quelques mots de la veille, se renseigner sur l'avancée des recherches sur Victor, éventuellement tenter de soumettre Shikou à un nouvel interrogatoire, comme la jeune fille semblait être devenue davantage prête à l'échange que lors de son arrestation. Julie avait d'ailleurs plaisanté que, étrangement, la dealeuse en garde-à-vue, en attente d'une inculpation officielle, semblait avoir une excellente influence sur la jeune magicienne. Martial s'était abstenu de lui répondre que c'était effectivement le cas et bien plus qu'elle ne l'imaginait.
En somme, une journée bien chargée qui suffirait à peine pour accomplir tout ça mais, au moins, en se surchargeant ainsi de travail, ils s'occupaient trop l'esprit pour se demander ce qu'ils allaient bien pouvoir faire de l'information sur la façon dont les nouvelles lois sur le statu des magiciens avaient été votées, même si il serait difficile de ne pas y songer.
Alors que, s'attelant à la tâche sans trainer, Julie priait la secrétaire du juge de l'autre côté du téléphone de transmettre sa requête à ce dernier, Tanguy revint avec les photos récupérées sur le portable d'Aleksy imprimées et la confirmation, facile à obtenir, qu'il ne s'agissait pas d'un montage. Martial hocha le menton en le remerciant d'avoir joué les messagers et plongea dans ses réflexions.
Si quelqu'un avait encore eu un doute, ou bien avait préféré s'enfouir la tête dans le sable, il était à présent impossible de nier la réalité des faits et il s'agissait bien là d'un problème puisqu'ils ignoraient toujours comment réagir face à cela, la confirmation des scientifiques de la police ne leur apportant guère de solution.
Martial le pressentait, ce n'était que le début des complications dont ils allaient éprouver de grandes difficultés à s'extirper.
Soudainement, l'inspecteur fut tiré de ses pensées par une interpellation qui lui fit relever le regard sur Aleksy qui, ayant terminé sa tasse de café, se tenait appuyé sur le bureau, une joue écrasée dans sa paume.
L'air toujours aussi peu concerné par toute l'histoire et posant certainement la question plus par curiosité que parce qu'il se sentait réellement impliqué, le jeune homme demanda, toujours avec le même accent :

Les Yeux du Pouvoir - Tome 3 : Pensées Indigo [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant