Fuis-moi, je te suis ... | Carmuel

18 - L'intimidation

Je fixe un long moment l'eau de la piscine qui semble figée, alors que les émotions commencent à m'envahir.  La scène atroce de cette soirée d'il y a deux ans repasse en boucle dans ma tête, le visage terrifié de Polo me donne des frissons. Puis, je réfléchis au fait que je suis maintenant la seule à connaitre dans les détails ce qui s'est passé. Je suis l'unique personne pouvant expliquer le geste de Polo. Les parents de Marina et Guzman n'auront jamais de réponse à toutes leurs questions et je peux m'en prendre qu'à moi-même, je vais devoir vivre avec cela tout le reste de ma vie.

Je prends mon téléphone pour commander un UBER et rentrer chez moi mais au même moment il s'éteint car je n'ai plus de batterie. Fait chier !  Je cherche au fond de mon sac mon chargeur mais en vain. 

Je finis de boire cul sec le reste de vin qu'il y a encore dans mon verre quand soudain, la porte s'ouvre et j'entends des pas s'approcher de moi.

Je me retourne et tombe nez à nez avec Manu. Je me ressaisis immédiatement, je replace mes cheveux derrière mes oreilles, je prends une grande inspiration et me tiens droite, la tête haute tout en l'observant de haut en bas.

- Manu ? Qu'est-ce que tu fais ici ? Tu me suis ? dis-je sèchement.

- J'ai des raisons de te suivre ?

- Que fais-tu ici alors ?

- La même chose que toi j'imagine.

Je suppose que de se retrouver ici, dans cette pièce doit le ramener à cette fameuse histoire qui avait fait voler en éclat la vie de Polo. Polo n'en avait parlé à personne, personne jusqu'à ce que je l'accuse, que nous allions devant le tribunal et que Manu commence à recoller les morceaux. Il connaissait Marina, il savait que nous nous étions séparé Polo et moi au même moment et surtout que le comportement de Polo était devenu de plus en plus étrange à partir de ce moment-là. Ils avaient passé des vacances ensemble, mais Polo n'était que l'ombre de lui-même. Expliquant cela par différentes excuses telles que le fait d'être triste de notre séparation ou encore de partager la tristesse de Guzman. Mais Manu n'était pas bête, j'en suis sûre.

- Peut-on arrêter ce petit jeu ?

- Tu veux te baigner peut-être ? dit-il en regardant en direction de la piscine.

- Je voulais me nettoyer un peu avant de rentrer chez moi, au cas où tu n'aurais pas remarqué, ton amie m'a lancé son verre au visage.

- Te nettoyer dans la piscine donc ? dit-il en rigolant.

- Arrête, qu'est-ce que tu me veux à la fin ?

- Simplement discuter, nous sommes au calme ici. J'ai cru comprendre que ta nouvelle vie te réussissait plutôt bien, tu es heureuse alors ?

- Tu ne connais rien de ma vie, dis-je en le fixant droit dans les yeux.

- Raconte-moi, je n'attends que ça, dit-il en croisant les bras.

Je vis un vrai calvaire au fond de moi, je suis rongé par la culpabilité et un instant, j'imagine me permettre de tout lui raconter pour me libérer mais aussi pour qu'il connaisse la vérité. Je n'ai voulu faire de mal à personne, j'aimais Polo, et je voulais simplement le protéger. Il n'y a pas une seconde de ma vie où je ne regrette pas ce qui s'est passé. Je m'évade quelques instants dans mes pensées sans répondre à Manu.

- Pourquoi tu m'as menti ? dit-il en s'approchant de moi.

- A propos de ? demandais-je les sourcils froncés en le fixant fermement dans les yeux.

- Toi et Samuel.

- Qu'est-ce que ça peut bien te faire ce qu'il y a entre Samuel et moi ?! dis-je en levant les yeux au ciel.