Chapitre 7

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        L'alcool ne m'aide pas à avoir les idées claires, et au début, je pense honnêtement à une hallucination. Mais quand je tente d'analyser chaque parcelle de son visage pour permettre à ma tête d'analyser la multitude d'informations qui s'offre à moi. Ces yeux bleus, ces longs cheveux noirs, ces piercings... aucun doute à avoir. C'est bien lui. Comment ne pas reconnaître quelqu'un qui a passé des années à décorer les murs de sa chambre ? Joey a toujours sa main tendue vers moi et ses yeux inquiets posés sur moi. Je la saisie avec force, ne le quittant pas du regard, et me relève non sans un léger étourdissement que je mets sur le compte de mon alcoolisation avancée.

- Est-ce que ça va ?

        Je mets à certain temps à réaliser qu'il vient de me poser une question. Je rêve ou est-ce que Joey Jordison est réellement en train de s'inquiéter pour moi ?

- Oh euh... Oui je vais bien.

        Je balbutie plus que je ne parle vraiment. J'ai l'impression d'être complètement stupide devant lui. Joey est rapidement rattrapé par un homme très fin et très grand, que j'identifie comme étant Ben, le batteur du groupe. Mes yeux s'écarquillent un peu plus devant cette autre constatation. Le groupe semble se balader tranquillement dans les rues de Paris, comme si de rien n'était. Je jette un rapide coup d'œil aux personnes qui se trouvent un peu plus loin et reconnais les autres membres des Murderdolls. Il y a Wednesday, accompagné de Roxanne, Acey et Eric qui tient par la main Chloë. Cette dernière semble m'avoir reconnue et murmure quelque chose à l'oreille de son petit-ami. Ils sont tous là, en face de moi, je n'en reviens pas. Mon esprit tourbillonne à vive allure, me donnant presque la nausée. Alors que je me perds dans la confusion de mes pensées, je constate que Joey a toujours son regard posé sur moi, ce qui me met quelque peu mal à l'aise. Ben prend la parole.

- Alors les bébés rockeuses ! Monsieur Jordison vous sort son numéro de charme ou quoi ?

        Je suis interrompue dans mes pensées par cette remarque à la fois amusante et peu flatteuse.

- La ferme mec ! Je voulais juste m'assurer qu'elle allait bien.

- Ça va aller, merci.

- Apparemment Chloë les a déjà vues, elles auditionnent pour nous demain, dit Ben à Joey, comme si nous n'étions pas là.

        Aucun son n'arrive à sortir de ma bouche. Et je remarque que ni Carole ni Avril n'en seront capables vu leurs têtes d'ahuries.

- Et vous alliez où comme ça ?, non demande Ben d'un ton des plus macho qu'on puisse imaginer.

- On rentrait à notre hôtel.

        Ma réponse me vaut aussitôt des regards assassins de la part de mes deux amies.

- Très bien, rentrez bien alors les filles, mais faites attention à vous, nous lance-t-il avant de rejoindre le reste du groupe.

        Et voilà, ça m'apprendra à toujours vouloir dire la vérité.  

- Et à demain alors, si j'ai bien compris.

        Joey parle comme si il ne s'adressait qu'à moi. Je sens que je rougis et ça me gène. Je ne lui réponds rien si ce n'est un léger sourire. Il s'éloigne en me jetant un dernier regard. J'essaye de faire le tri dans ma tête. Trop d'informations se bousculent en même temps. J'ai l'impression d'avoir fait une grosse bourde en leur avouant que nous rentrions à l'hôtel. Il disparaissent de notre champ de vision.

- Alors ça... C'était carrément irréel..., dit Avril, abasourdie.

- Et toi "On rentrait à notre hôtel " ! Amy ! Il était clairement sur le point de nous inviter à les rejoindre !, s'écrie Carole en me secouant par les épaules.

- Désolé... J'ai été prise au dépourvu.

- On devrait peut-être les suivre et leur dire qu'on a changé d'avis ?

        Elle cherche une approbation de notre part.

- C'est pas une très bonne idée...

- Avril ! Réagis ! Où est passée ton adoration pour Wed ?

- Amy  a raison, c'est pas une bonne idée. On n'est pas des groupies. Regarde comment Ben était entreprenant. Il avait clairement une idée derrière la tête.

- Et alors, on est des grandes filles que je sache.

- Carole !

        Avril et moi avons crié son nom à l'unisson, ce qui la ramène quelque peu à la raison.

- Bon comme vous voudrez. Mais Amy, tu as clairement raté l'occasion de te taper Joey Jordison, excuses-moi te te le dire !

- Mais n'importe quoi !

- Oui tu as raison, tu pourras te le taper demain !

        Je ne peux m'empêcher de rire devant le ton faussement désinvolte qu'elle emploie. Je prends appui entre mes deux amies et nous repartons zigzagantes vers notre lieu d'hébergement.

_____


        Après trois tentatives pour taper le code d'entrée de l'hôtel, nous arrivons à la chambre que nous partageons à peine décuitées par notre marche. Carole s'excuse à maintes reprises auprès d'une plante verte qu'elle a bousculé dans le couloir, provoquant chez nous un fou rire incontrôlable. Si bien que Katisha, qui est dans la chambre voisine, pointe son nez dehors. Elle constate rapidement l'état dans lequel nous sommes et croise les bras comme pour nous montrer son mécontentement. Carole ne tarde pas à lui faire part de votre rencontre atypique et elle n'en revient pas. Et bien sûr elle n'oublie pas d'omettre sa théorie selon laquelle Joey n'avait d'yeux que pour moi.

- Il est pas bien difficile alors, me lance Katisha en rigolant et en m'invitant à me regarder dans un miroir.

        J'ai en effet les cheveux tout ébouriffés, mon mascara a quelque peu coulé sous mes paupières et mes yeux sont brillants et injectés de sang.

- Quelle horreur !

        Je ne peux que constater qu'effectivement j'ai une mine affreuse.

- J'espère que vous aurez les idées au clair pour demain, nous lance Kat pour conclure notre conversation.

        Je déteste quand elle se prend pour plus adulte que moi. Mais pour le coup, elle a probablement raison.

- Mais oui ne t'en fais pas.

        Je lui adresse un baiser sur la joue et rejoins les deux autres dans la chambre. Carole est déjà affalée sur le lit superposé sans avoir pris le temps d'enlever ses vêtements et commence à ronfler. Heureusement que j'ai pensé à apporter des boules quies.  Même si je sais que je vais avoir du mal à trouver le sommeil après cette fin de soirée riche en émotions. Mais contrairement à ce que je pensais, je finis par me laisser aller dans un sommeil ponctué d'images où je rencontre un charmant jeune homme aux longs cheveux noirs et aux yeux bleus.

Love Me Till It Hurts // En pauseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant