21 - celui pour lequel la peine n'existe plus

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Jaewon coince une cigarette dans sa bouche et se dirige vers l'espace fumeur du bar. Il l'allume en tirant une première taffe dessus sans grande conviction. Ses yeux fixent ses pieds avant de les relever vers une de ses amies.

- Ca fait longtemps qu'on a pas vu Baekhyun non ? il lâche en expirant la fumée.

Minsoo hausse mollement ses petits épaules.

- Bah... depuis qu'il allait chez son psy bizarre on le voyait moins déjà, elle rétorque.

Le jeune homme n'a pas toujours été un bon ami, il le sait, d'ailleurs toute cette bande n'est pas vraiment une grande aide. Dans le fond, il en a conscience. Pourtant, il aime sincèrement bien Baekhyun, il le trouve intéressant même si il a un caractère de cochon.

- Imagine il est mort, relance la jeune fille sur un ton qui se veut drôle.

Jaewon se fige un instant mais décide ne pas lui répondre. Il préfère terminer sa cigarette en silence, loin des réflexions peu intellectuelles de son amie. Ou plutôt, la possibilité que cette supposition soit exacte le tétanise. C'est loin d'être impossible après tout.


* * *

J'ai toujours pensé que je faisais les bons choix. Qu'il n'y avait qu'une seule bonne façon de vivre sa vie. Que le chemin qu'on commençait devait être terminé, comme quand on se ressert d'un plat qu'on aime bien. Je n'ai jamais laissé la place au doute, la place à l'erreur. J'avais assez fauté quand j'étais adolescent, après le décès de Maman, je n'avais pas besoin d'en rajouter. J'ai tout fait pour plaire à ce fantôme que j'imaginais être elle. Que je fantasmais à travers Eunmi, comme si elle représentait l'ultime figure maternelle à satisfaire.

C'est tellement freudien et c'est pourtant un domaine que je connais bien. Comment ai-je pu me tromper aussi vulgairement ? Pourquoi me suis-je entêté dans cette voie qui, je le savais, n'était pas celle qui me conviendrais ? A quel moment ai-je perdu mon estime de moi ? Ou plutot, à quel moment ai-je cru la récupérer ?

Pourquoi en suis-je arrivé là ? Psychologue incompétent, entrain de torturer un jeune homme déjà bien trop malheureux. Quel tournant de vie affreux.

Je relève les yeux vers la baie vitrée de notre appartement. Une multitude de carrés gris, bleus, blancs et noirs s'étalent sous mes yeux fatigués. Je surplombe une bonne partie de la ville. J'esquisse un sourire. C'est ridicule. Je suis ridicule.

Eunmi a emmené Jisung faire les courses avec elle. Comme si il allait se mettre à penser que sa mère n'est pas folle grâce à ça. Elle essaye désespérément de le noyer. Métaphoriquement. Peut-être que si Jisung n'existait pas je serai resté avec Baekhyun. C'est certain même.

Je plaque ma main sur la vitre froide et observe mon reflet dans celle-ci. J'ai une mine affreuse. Je comprends mieux pourquoi Eunmi ne veut pas rester là.

Je me fige puis je me laisse doucement tomber sur le sol glacé. Décidemment, tout est froid ici. Austère, vide et meurtrier.

- Je suis horrible. Comment je peux penser ça ? Jisung ne mérite pas ça.

Je coince ma tete entre mes deux mains. Je ne bouge pas. Je me cache. Je me cache de moi-même. Je n'ai pas envie de me retrouver. Je ne pourrais plus jamais exercer après ça, j'ai démontré mes horribles talents. Ceux qui font souffrir et pleurer les gens.

Je me sens soudainement si seul. Tellement seul. Atrocement seul. Comme si je venais tout juste de comprendre que depuis tout ce temps, je l'étais déjà sans vouloir l'admettre. En fait, c'est le cas.

Il(l) (chanbaek)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant