Il(l) (chanbaek)

17 - celui qui n'était plus seul

- Vous êtes ici parce que la tournure de votre deuil vous inquiète ?

La jeune fille hoche la tête en triturant machinalement ses petits doigts. Elle s'appelle Kim Haeyon et elle a tout juste neuf ans.

- Vous pouvez ne pas me vouvoyer, s'il vous plaît, ça me gêne.

Sa voix est faible et elle n'ose pas relever ses yeux.
Chanyeol lui offre un sourire réconfortant. Il sait si bien les faire.

- Qui as-tu perdu ? il reprend en posant ses coudes sur son bureau.

- Mon papa.

Le souffle de son aîné se coupe un instant et se demande si Baekhyun n'a pas une soeur. Puis il se rappelle que pour commencer, ils ne portent pas le même nom de famille, et qu'ensuite, l'attitude égocentrique de son cadet découle forcément d'une éducation de fils unique.

- Il est mort comment ?

- Il s'est suicidé.

Le psychologue n'est pas mal à l'aise avec ces questions, il est robuste et puis ça fait partie intégrante de son métier.

- Comment te sens-tu chez toi ?

- Plus chez moi.

Ses réponses franches ne sont pas déplaisantes pour l'adulte. Il apprécie ça, c'est bon signe. Elle sait encore parler et s'exprimer.

- Tu as envie de quoi, là, maintenant ? il continue en barbouillant sa feuille blanche d'encre.

Il écrit très vite. Il y a beaucoup à dire sur si peu de choses.

- De pleurer... de me trouver des gentils copains qui se sentiront concernés par ma vie aussi... et beaucoup de bonbons... elle exprime d'une petite voix, moins assurée.

- Tu peux pleurer.

- Non je ne peux pas. C'est physiologiquement impossible. Ça ne sort pas.

Chanyeol griffonne un dernier truc avant de poser son stylo. Il sort un billet de son costume et le tend vers Haeyon.

- Je t'offre au moins les bonbons, il note gentiment.

Elle ne semble pas comprendre mais s'empare de l'argent. Quelle attitude bizarre.

- C'est pour mon frère, elle rectifie.

Le coeur de Chanyeol loupe un battement. Ça fait beaucoup d'éléments, il ne peut s'empêcher de penser à Baekhyun.

- C'est un pleurnichard, mais bon... il a que six ans lui...

Haeyon ricane et Chanyeol soupire de soulagement.

- Tu veux qu'on en reste là pour l'instant ? Tu as été très coopérative c'est gentil, il termine.

Il juge qu'il faut pas trop brusquer les enfants en plein développement, et trente minutes c'est déjà bien.
La petite secoue négativement la tête.

- Ce n'est pas gentil, j'en ai besoin.

L'éclat de lumière qui passe dans ses petits yeux bruns réjouit l'homme. Quel bonheur cette jeunesse se dit-il.

- C'est vrai !

Il se lève et la raccompagne jusqu'à la grande porte en bois. A peine elle passe la porte qu'une silhouette svelte s'introduit dans le cabinet, sans rien dire. La secrétaire proteste mais comme d'habitude, rien ne semble l'atteindre.