Chapitre 19

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     La salle d'audience se vidait petit à petit. Je n'entendais que le bruit des chaises rayant le plancher de la pièce. Mes yeux fixaient mes chaussures, mes oreilles entendaient mais étaient incapables de décrypter et de comprendre ce que tous ces gens racontaient. A vrai dire, je n'en avais que faire : je n'arrivais déjà pas à réaliser ce qui venait de m'arriver.

    Cette jeune femme... Adélaïde...oui Adélaïde. Elle s'était avancé, elle avait parlé. Oui, elle avait parlé. Elle avait témoignée. En témoignant, elle à apporter cette pièce qui manqué à résolution finale du puzzle. Ce puzzle, c'était l'incarcération de Trenz...non...je ne m'en souviens plus de son véritable nom. L'important dans tout ça, c'est qu'il allait payer.

    Je n'arrivais pas à comprendre mais surtout à croire ce qui m'arrivait : cette histoire était terminée ! Fini. Aucun mot, aucune expression ne pouvait décrire mon état d'esprit. 

    Adélaïde s'était approchée fièrement à la barre. Le regard droit, puissant, défiant quiconque qui osait se mettre en travers de son chemin. Personne ne comprenait ce qu'elle faisait ici. Pas même le juge. Sa voix avait traversé la salle d'audience. Elle était comme possédait. Elle n'accorda aucun regard.

    Tout était allé tellement vite. Je ne comprenais plus rien à ma vie. Des mains me prirent les épaules. Ces mains m'étaient familières : c'était celle de Julien. Je me retournai, le regard presque vide. Je ne possédais en rien la force de ma lever de ma chaises, de prendre mon sac et mon manteau pour rentrer à la maison. Je n'avais la force de rien à vrai dire. Je voulais juste qu'on me laisse tranquille le temps que je récapitule et qu'on revienne me voir après.

    Ju m'aida à me lever. Il ne restait presque plus que nous deux dans la salle avec le Dr. Ducreuil. J'allai la saluer et lui dire merci pour tout ce qu'elle avait fait pour moi. Elle me sera dans ses bras tel une mère. Des larmes coulèrent depuis mes yeux, dévalèrent mes joues et mouillèrent une infime surface du manteau du docteur. Je fermai les yeux. Quand je les rouvris quelques secondes après les avoir fermés, j'aperçus cette fille. 

    Je sortis de l'étreinte du docteur et donna mon sac à Ju. « J'arrive » soufflai-je le dos à moitié tourné. Je marchai rapidement puis me mis à courir voyant qu'elle partait pour sortir du palais de justice. « Attendez ! » criai-je. Ma voix résonna. Elle se retourna et me fixait.

    Je m'approchai d'elle avec peine tellement j'étais essoufflée. Je n'avais pourtant pas courut une distance gigantesques mais mes émotions pesaient sur tous les efforts physique que je pouvais accomplir. « Attendez », je me relevai. La jeune femme s'approcha de moi. Je la vie enfin de près. Elle était très jolie. Une tresse en épi faite avec ses longs cheveux blond comme les blés lui ornait l'épaule. Son regard bleu azur était souligné par ses traits d'eyeliner en haut de sa paupière et par son trait au crayon en bas. Sa bouche était fine et rosé. Sa peau était laiteuse et on distinguait quelques taches de rousseur sur ses joues en plus de ses deux faussettes adorablement adorables.

    « Oui ?

- Je voulais vous dire merci pour tout à l'heure. Sans vous,... sans vous il n'aurait jamais était condamné, dis-je

- Non, non, c'est à moi de vous remercier. C'est vous qui avez eu le courage d'aller jusqu'au procès. Moi, je n'en possédais aucunement la force. D'ailleurs, c'est le Docteur Ducreuil qui m'a demandé de venir témoigner. Vous savez à l'époque, personne mis à part elle ne me croyait, répondit-elle »

    On se regarda dans le blanc des yeux pendant un long moment. Je ne savais pas comment la remercier de m'avoir aidé à mettre fin à mon cauchemar.

      Je ne sais plus où j'en suis. Je n'y croyais plus et pas. J'ai beau fouillé dans mes souvenirs, il y persiste comme un vide. Je ne me souviens de rien. Aussi, je n'ai jamais rien fait pour m'en souvenir. Le procès avait été l'un des épisodes les plus éprouvants de toute ma vie.

   D'une part par le regard des autres –de ma famille- et d'une autre par le fait que je n'arrivais pas à passer à autre chose. Je n'en pouvais plus des « bon courage » et des regards pleins de pitié des gens quand j'allais acheter mon pain. Je n'en pouvais plus. J'avais été tellement fier d'avoir réussi à coffrer ce salaud que les traitements de faveur remplis de pitié des gens qui m'entouraient me dégoutaient et me désappointés.

   Je n'abordais plus et Ju non plus ce sujet. Nous avions tourné la page nous. D'ailleurs, nous n'avions touché mot à personne sur mon agression sexuelle. Imaginez ce qui se serai passé si en plus de cela ils avaient appris que je n'avais pas seulement été séquestrée. J'aurai subi les regards salissant de mansuétude des locataires de l'immeuble, sans oublier tous les commentaires et autres choses qu'auraient pu dire les « membres de ma famille ».

    Après quelques mois assez douloureux, je recouvrai ma vie d'autre fois. Juju, le boulot, le dodo, mon chien, Farés. J'avais conservé un contact avec Adelaïde ainsi qu'avec le docteur Ducreuil. Elle était même devenue une sorte de mère protectrice que j'appelai au moindre souci. Un lien très fort s'était tissé entre nous deux. J'arrivai à lui parler de chose très personnelle comme par exemple Alice. Ce qui était étrange c'est qu'elle me comprenait non pas d'une manière consolatrice mais plutôt comme si elle aussi avait vécu un épisode pareil au cour de sa vie.

    Elle savait tout. Quand Julien ne voulait pas parler, j'avais Farés et elle.

    Julien, je le saoulais avec toutes mes histoires. Il ne me le disait pas mais je le sentais. La fatigue morale et physique se faisait sentir. L'épisode de Trensovski l'avait plus qu'épuisé : il était irritable, nos rapports verbales et physique surtout n'était plus les même. Je me sentais salie, il se sentait trahi. Je n'osai pas engager une conversation sur quelque sujet qu'il soit. S'il voulait parler il savait ou me trouver. Il était toujours resté fermé comme une huitre.

    Par moment, j'avais l'impression qu'Alice n'avait jamais existé. Je ne me rendais de nouveau compte de son passage sur terre seulement quand j'allais à mes visites hebdomadaires du cimetière pour refleurir sa tombe, y déposer des peluches et autres petits cadeau. Je restais alors des heures devant la stèle de marbre pensant à la courte semaine durant laquelle elle avait vécu et toutes les années qui ne la verrons jamais.

    La peur d'en parler à mes proches me tétaniser. Ils ne comprendront jamais pourquoi on leur avait caché l'existence d'une petite-fille pour les uns, d'une nièce pour les autres ou encore d'une cousine. Non, ils ne le comprendront jamais. Pourquoi ? Parce qu'ils ne l'ont pas vécu. Parce que pour ma part, les membres de ma famille étaient toujours liés aux scandales, aux coups de poignards dans le dos, aux polémiques, aux vieilles histoires remises sur la table avec une nouvelle sauce plus amère que les précédentes. Non. Non ! NON ! Je ne voulais pas entendre le nom de ma fille ainsi que des remarques sur son histoire sortirent de la bouche de gens qui ne l'avaient pas connu. Mais un jour, oui un jour, je sais que son existence sera connue de tous. Je en sais pas pourquoi, ni comment ni quand. Je sais juste qu'un beau matin ou une belle soirée, nos deux familles découvrirons cette petite vie si longtemps cachée.

Intrusøs (Tome 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant