✧ Dix-huit ✧

133 14 7
                                    

Meredith se fit soudain très calme. Arthur bénit les dieux de ce miracle. Bon sang, elle avait des allures de tigresse lorsqu'elle se mettait en colère ! Il n'aurait pas aimé la voir se disputer avec Colleen – surtout, il n'aurait pas su sur qui parier.

Même si, d'une certaine façon, elle s'était déjà bel et bien confrontée à Colleen, et avait gagné haut la main.

— Non, répondit-elle. Je n'étais pas là. J'ignorais même que tu avais un frère.

Elle était bouleversée, Arthur ne manqua pas de le noter. Il s'engouffra dans la brèche.

— Les banshees l'ont tué sous mes yeux et il est mort dans mes bras. Ça te rappelle quelque chose ? Qui est le monstre, Meredith ?

— Je n'ai pas tué ton frère, répéta-t-elle, les dents serrées. Toi, par contre, tu as bien tué cette banshee sous mes yeux !

— Et elle, combien en avait-elle tué ? Toi, combien de vies as-tu arrachées ?

Meredith pâlit.

— C'était un accident !

Arthur s'approcha imperceptiblement. La panique de Meredith ne pouvait pas être simulée ; non, elle était bien réelle, et Meredith dissimulait une culpabilité qu'il n'avait pas soupçonnée au premier abord.

La peur, le dégoût de soi-même étaient des sentiments qu'il pouvait comprendre pour en avoir lui-même fait les frais. Il avait tout simplement appris à oublier les visages de ceux qu'il avait tué. Et il en avait un certain nombre à son compte.

Il se sentit étreint de compassion. Se pouvait-il qu'ils se soient tous deux trompés au sujet de l'autre ? Finalement, Meredith ne semblait pas si différente. Elle aussi était capable de remords. Elle ne savait simplement pas comment les gérer.

— Explique-moi, proposa-t-il.

Elle le toisa avec méfiance.

— Qu'est-ce que ça peut te faire, de toute façon ?

— C'est pour ça que tu es venue me trouver, il me semble. Tu voulais parler, alors explique-moi, Meredith.

L'enchanteresse ne se départit pas de sa suspicion. Arthur soupira avec exaspération, déconcerté par son brusque changement d'attitude. Que voulait-elle, à la fin ? Discuter ou se disputer ? Elle était totalement imprévisible, et ce défaut avait le don de l'agacer.

Il pouvait comprendre qu'elle veuille garder ses secrets, mais lui venait de faire un effort considérable en lui révélant la mort de Key. Il lui avait avoué d'où était née la haine qui le protégeait de la magie, et malgré cela, elle restait muette comme une carpe. Arthur ne savait pas quoi faire de plus. C'était à son tour de se lancer. Elle avait l'occasion de s'expliquer en toute diplomatie, occasion qu'Arthur ne lui offrirait pas deux fois – il pouvait comprendre la peur, mais ça, c'était de l'obstination irraisonnable.

— Si je te pose une question, est-ce que tu seras honnête ?

Ses yeux s'écarquillèrent légèrement. Puis elle hocha lentement la tête.

— Si tu veux.

— Non. C'est à toi de décider, Meredith. Tu peux me raconter tous les mensonges qui te passent à l'esprit si l'envie t'en prend. J'ai été franc avec toi. J'espère que tu t'en rappelleras.

— Tu as peut-être été franc, mais tu as avant tout été cruel, répliqua-t-elle d'un ton glacial.

— Et je ne le regrette pas, répond-il sur un ton d'avertissement. Nous sommes ennemis, je n'ai pas à faire preuve d'indulgence envers toi.

Le Cercle de la Table Ronde : Le serment de KeyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant