Chapitre 15

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~ Madeleine ~

Je me réveillais dans un calme étrange. Je tournais brusquement la tête en me rappelant où j'étais mais Wilhem avait disparu. Je soupirais en me redressant en grimaçant et examinais la pièce en silence. Qu'étais-je censée faire ? La honte m'accabla brusquement. Puis je me souvins de la veille : de sa décision - la sanction qu'il devait prendre - puis de son état à nouveau fiévreux. Et enfin, sa requête. Son ordre. Dormir avec lui. Un frisson me fit me redresser définitivement, le souffle court. Je repoussais les draps pour rejoindre la fenêtre mais la Cour était calme. La nuit était tombée depuis quelques heures, visiblement. Je me rapprochais de la porte au moment où je perçus un mouvement derrière et me figeais. Lorsque l'ombre réapparut, je compris qu'il s'agissait d'un garde. Il a... fait monter la garde ?! Le choc me coupa les jambes et je dus me rasseoir sur le lit pour assimiler l'information correctement. Je ne pouvais donc pas quitter les lieux sans lui.

Je soupirais en me relevant et me rapprochais du broc d'eau toujours près de la fenêtre. Retirant sa chemise, je la posais sur le rebord de la fenêtre et attrapais le tissu que j'avais utilisé pour faire baisser la température de Wilhem. Je me lavais autant que possible sans retirer mon uniforme, les yeux toujours rivés sur la porte. Je commençais par mon visage et eus toutes les peines du monde à faire partir les traces de crasse incrustées depuis le bombardement. Je soupirais en glissant le linge dans mon cou puis sur mes épaules. Mon uniforme s'humidifia mais je continuais mon rafraichissement, soulagée de me sentir un minimum propre. Lorsque je finis par le bas de mon corps, personne n'était réapparu. 

L'attente se prolongea et la nuque commençait à nouveau à me tirer quand enfin... l'ombre se figea devant la porte. Je m'étais rapprochée de la fenêtre entrouverte et étais par conséquent pile dans l'ouverture de la chambre lorsque Wilhem poussa le battant. Son regard balaya ma tenue avant qu'il ne se tourne, le bras bloquant l'accès à la pièce. J'aperçus une autre silhouette et me contentais de rester immobile et silencieuse, dans l'ombre de l'allemand. Les hommes du Colonel savaient que j'étais ici. Tout autant que ses hauts gradés puisque j'avais dû rester auprès de lui pour le soigner. 

- On se voit demain, dit-il soudain à son interlocuteur. 

- Bonne nuit ? S'amusa la voix de Ludwig. 

Wilhem ne lui répondit pas et referma la porte. Puis il se retourna lentement vers moi, le visage légèrement dans la pénombre qui tombait sur la chambre. Je le fixais sans savoir quoi faire d'autre, l'uniforme encore humide par endroit et la fatigue me pesant lourdement sur les épaules. 

- Bonsoir, Madeleine. 

- Bonsoir, soufflais-je. 

- Avez-vous pu vous reposer ? 

Tout en parlant, il avança jusqu'au bureau où il y déposa son arme. Son visage m'apparut entièrement : toujours aussi dangereusement beau et péniblement désirable. Il déboutonna lentement la veste de son uniforme et glissa une main dans la poche interne du vêtement pour en sortir un carnet noir. Je le fixais sans répondre. Lentement, il retira sa veste et la posa sur la chaise avant de me regarder à nouveau. C'était indéniable. Cet homme était extrêmement beau. Charismatique. Mais allemand. Mon esprit se remit à lutter contre l'inexorable attirance qui nous poussait l'un vers l'autre. Wilhem esquissa un pas dans ma direction et je reculais par réflexe avant de me figer, troublée. Un sourire amer glissa sur ses lèvres et il recula à nouveau pour s'asseoir sur le bureau. D'un geste, il m'invita à lui faire face. Je pris place sur le lit que j'avais quitté plus tôt, terriblement consciente de son odeur masculine omniprésente. 

- En somme-nous revenus là, Madeleine ? Murmura-t-il avec douceur.

Je détournais le regard en retenant mon souffle. Il reprit d'une voix douce.

1943 : Amour de guerreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant