Chapitre 12

430 37 36
                                    

~ Madeleine ~

Ses mains me saisirent avant que je ne m'écroule. Verhoeven me redressa lentement, comme si j'étais en porcelaine. Le sang me battait aux tempes. Ma respiration devint plus courte. J'étais sous le choc. L'adrénaline retombait. Cette attaque m'avait non seulement ébranlée mais aussi indirectement blessée. Au travers de Jäger. Par la faute du capitaine Hoffman.

Verhoeven fit crisser les pieds de la chaise au pied du lit de Jäger et me força à m'y asseoir. Je m'arrimais à ses bras comme si j'allais sombrer à tout instant. Ce n'était pas fondamentalement impossible vu mon état. Je lui indiquais ma tête d'un signe confus de la main, le souffle court. La porte s'ouvrit au moment où je basculais en avant. Un uniforme blanc apparut. Verhoeven fut presque immédiatement en retrait, devant son colonel. 

Une voix parla, lointaine et incohérente pour moi. Des mains me redressèrent, me donnant la nausée. Les yeux familiers de la mère infirmière percutèrent les miens. Leurs vois me parvinrent plus distinctement. Verhoeven semblait la disputer. Anne lui répondait sèchement mais je ne comprenais toujours pas leurs mots. Je lui agrippais les poignets avec désespoir en tournant la tête vers l'allemand blanc comme un linceul, allongé sur son lit de fortune. Elle ramena doucement mon visage vers le sien en commençant un examen minutieux de mon état. Sa voix revint brutalement, me faisant grimacer.

- J'ai percuté...

Je ne finis pas ma phrase. Jäger venait de revenir parmi nous. Il battit plusieurs fois des cils, perdu. Je me redressais aussitôt alors que Verhoeven se rapprochait avec un bref soulagement. Mais son colonel était encore dans un état alarmant et manqua de sombrer à nouveau aussitôt dans l'inconscience. Il ne dut son salut qu'à notre échange silencieux mais ô combien important, son regard rivé au mien. 

Son visage était livide. Plus les secondes passaient et plus, il perdait en couleurs. Une fine couche de sueur perlait sur ses tempes, me rappelant l'urgence de la situation. La main d'Anne arriva au même instant sur l'arrière de mon crâne, me faisant chanceler. Je couinais en cherchant à retirer sa main mais un autre geste de sa part me fit retomber sur ma chaise, déboussolée.

- Tu as une vilaine bosse... Pas de sang ni de plaie ouverte, c'est déjà ça, asséna-t-elle brusquement. Je vais te chercher de quoi te soulager.

- Elle doit rester consciente de ses faits et gestes, lui rappela Verhoeven.

- Je sais, claqua sèchement l'infirmière en lui tournant le dos.

Je me redressais immédiatement en me rapprochant de l'allemand mais ce dernier avait replongé dans l'inconscience. Verhoeven m'aida pour les premiers soins, le mettant sur le ventre pour me permettre d'examiner son dos. Lorsque nous réussîmes à lui retirer l'intégralité de son uniforme, la veste comme la chemise étaient bousillées. Je m'en servis d'ailleurs pour éponger le sang qui n'arrêtait pas de suinter de certaines plaies. Lentement et avec précaution, je me mis au travail.

Malgré son état, le corps du militaire restait chaud. Un long frisson m'étreignit quand je frôlais la peau de son dos. Il était blessé mais ce n'était pas irréparable si les bons soins étaient prodigués. Lorsqu'Anne revint, j'étais trop perdue dans mon travail pour sentir la piqûre qu'elle me fit. Mon front se couvrit lentement de sueurs. Ma respiration devint chevrotante au fil des heures. Cependant, je poursuivis mes efforts. Lorsque je relevais les yeux pour la première fois après avoir presque fini de soigner le dos blessé, la soirée était déjà bien avancée. Verhoeven se redressa péniblement, les yeux ensommeillés.

- Je vais aller vous chercher de quoi manger.

- Je n'ai pas... C'est gentil,me repris-je en lui adressant un bref sourire. Je vous en remercie,capitaine mais je suis incapable d'avaler quoi que ce soit pour l'instant.

1943 : Amour de guerreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant