Le Casseur De Vitres

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L'école était pleine de cris et de rire. De souffles de vie, de chaleur humaine. Une marée de corps ondulants, pressés les uns aux autres, qui se bousculaient pour mieux dépasser le portail.

Le lycée était modeste, simple de structure, petit d'envergure. Il restait bien entretenu, semblait presque récent, alors qu'il n'en était rien. Des murs beiges, des portiques jaune poussin, le tout sous un enchevêtrement de branches et de troncs noueux. Non loin du portail, contre une épaisse colonne en béton, Solveig repéra Elke. Ses cheveux blonds avaient été noués en une natte lâche, dont les mèches rebelles retombaient autour de son visage pâle.

Pomme et agrume.

Elle avait beau être encore éloignée d'elle, Solveig pouvait sentir son parfum malgré tout. À chaque instant, peu importait la distance. Elle savait, sans jamais avoir compris comment, ni même pourquoi. C'était sa sœur. Sa cadette. Sa famille. Sûrement, était-ce une évidence. Et peu importait de savoir si cela était identique au cœur de toutes les familles.

Au même instant, Elke releva la tête. Elle aussi l'avait sentie. Pas son parfum. Non. Sa présence. Solveig dégageait une aura puissante. Une énergie qui semblait l'envelopper. Dense, épaisse, nul ne pouvait l'ignorer. Il y avait une impression de sécurité, de chaleur. Comme si elle rentrait à la maison. Ou plutôt comme si son chez-elle lui ouvrait ses portes. Elke embrassa son amie, et accourue tout sourire vers sa sœur.

- Sol ! Alors cette journée ?

- Et la tienne ?

Solveig avait détourné sa question, comme si de rien n'était. Une ombre semblait saisir son regard, s'y accrocher désespérément. Elke était loin d'être dupe, sa sœur lui cachait quelque chose. Elle jeta un regard autour d'elle, à cette masse de curieux, et décida de patienter encore un peu.

- Une journée de cours quoi. Rien de fou. Ah si ! Sanna nous en a encore fait une belle !

Sur ces mots, Elke éclata de rire, et embraya pour raconter son anecdote, son bras passé sous celui de sa sœur. Solveig respira profondément. Bercée par les babillages de sa sœur, elle se sentait plus légère. Comme si un poids lui avait été ôté de ses épaules.

Casque en main, Solveig attendit que sa sœur ait bouclé le sien pour faire de même, l'esprit songeur elle se mordilla la lèvre.

- Tu as beaucoup de devoirs pour demain ? demanda-t-elle à Elke.

- Non. Pourquoi ?

Elke avait interrompu son mouvement, une jambe immobilisée dans les airs, au-dessus de la bécane, elle observait sa sœur dans l'attente.

Lui dirait-elle le pourquoi de ses tourments ?

Solveig la fit asseoir d'une pression de la main dans le bas du dos, avant d'enfourcher sa bécane.

- On va passer chez le garde forestier avant de rentrer.

- Chez Viggo et Soren ? S'enquit Elke, surprise que sa sœur n'ai pas fait appel à leurs prénoms

Elke sentit le corps de son aînée se raidir contre le sien, sans qu'elle ne puisse en déterminer la raison. D'une voix étouffée et fuyante, Solveig confirma.

- Mais on devait pas manger chez les Heimr ce soir ?

Solveig Jura dans sa barbe, accélérant son bolide. Elle avait complètement oublié me chili d'Aglaë et de Kalej qu'ils avaient déjà reportés. Elle ne pouvait pas leur faire faux bond une seconde fois.

- J'avais oublié...

Solveig s'avançait à pleine balle sur le sentier de la forêt, comme si sa bécane était un prolongement de sa colère et de sa frustration. Plaquée contre son dos, Elke serrait les dents, consciente que la moindre plainte de sa part n'arrangerait en rien l'état de nerfs de sa sœur.
Les branches claquaient contre leurs casques, la terre s'envolait sur leur passage, dans un bruit de tonnerre qui brisait le silence originel.
Quand Solveig éteignit le moteur, le silence parut assourdissant à Elke, qui grimaça.

Solveig Ylgr : Empreintes d'Hiver Où les histoires vivent. Découvrez maintenant