ℭ𝔥𝔞𝔭𝔦𝔱𝔯𝔢 27

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Maël déambulait avec aisance sur le pont du Vieux Marin, bien que celui-ci soit brinquebalé de gauche à droite par la violente tempête qui prenait forme au large du cap sur lequel ils avaient fait escale quelques heures auparavant. Tout le monde avait déjà quitté le navire pour trouver refuge dans l'hôtel qui se trouvait à quelques mètres à peine du port.

La tempête était bien trop violente pour qu'ils restent à bord.

Maël, accompagné du Capitaine étaient les dernières personnes à bord, vérifiant qu'il ne restait personne et que tout le matériel pouvant être déplacé (et coûtant très cher) avait bien été déchargé pour être stocké dans l'hôtel jusqu'à ce qu'ils aient l'autorisation de continuer l'expédition.

Cela faisait déjà huit mois qu'il était à bord du Vieux Marin.

C'était la première fois depuis huit mois qu'il mettait pied à terre et il en ressentait une certaine inquiétude. Infondée qui plus est.

Cela faisait huit mois qu'il avait pris l'habitude de repousser au plus loin de son esprit tout ce que lui avait révélé Leo avant son départ ainsi que la part de responsabilité (pas vraiment mais il n'arrivait pas à le dissocier) qu'il avait dans la mort de son grand-père. Il n'arrivait pas à lui pardonner. Il avait pris l'habitude de distraire son esprit avec tout ce qu'il pouvait.

Alice était sa meilleure alliée dans ces moments-là.

Cette dernière se tenait d'ailleurs sur la passerelle, les mains profondément enfoncées dans les poches de son sweat épais bleu foncé déjà trempé, ses cheveux lui battaient le visage. Quand elle le vit enfin descendre à quai, son sourire grandit sur ses lèvres et même une lueur de soulagement passa dans son regard, lueur que Maël décida de ne pas relever.

« J'ai cru que tu allais rester à bord. » Rigola-t-elle.

« Tu aurais dû rester au chaud, tu vas encore une fois attraper froid par ma faute... »

Alice lui sourit en baissant les yeux avant de se reprendre et de glisser son bras sous le sien pour le tirer jusqu'à l'hôtel. Même si Alice lui avait dit qu'elle comprenait son absence de sentiments amoureux à son égard, il avait l'infime conviction que ce n'était pas totalement le cas, mais il faisait comme si de rien n'était.

Il n'avait aucune idée de comment il pouvait faire face à tout ça.

Il était perdu.

En raison de l'urgence de la situation et l'aspect exceptionnel de leur arrêt sur la terre ferme, Maël se retrouvait à partager sa chambre et le lit double qu'elle contenait avec Alice. Il y avait plus d'hommes que de femmes dans l'équipe scientifique. Maël avait accepté cette cohabitation. De toute façon, son esprit était bien trop tourmenté par l'arrivée proche de la fin de l'expédition et son retour chez ses parents pour dormir.

Il allait devoir faire face à Leo.

Il le savait, il ne pourrait pas fuir éternellement, d'autant plus qu'au cours de ces huit mois passés en mer, il avait aperçu à de nombreuses reprises l'homme-sirène au large du Vieux Marin. A chaque fois, il s'était arrangé pour ne pas être seul en plongé et ne pas s'attarder trop longtemps sur le quai du navire.

Sauf ce soir-là, le jour de l'anniversaire de la mort de son grand-père, ce même soir où Alice était tombée malade par sa faute.

Ce jour-là, il avait ressenti plus que jamais le besoin de savoir : pourquoi Leo lui avait menti sur son implication dans la mort de son grand-père ?

Ou bien s'il mentait aussi sur d'autres choses...

Comme sur ses réelles intentions à son égard.

Le chant de l'océan. Tome 2 : mor-brasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant