Une poupée

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La jeune fille arriva, rouge aux joues, essoufflée, ébouriffée de ses jeux dans le jardin. Pourtant la dame rayonnait. Elle avait quelque chose de solaire et juvénile qui la rendait belle. Sa naïveté, son élégance naturelle attirait la sympathie. Elle dit qu'elle venait du jardin, elle jouait avec quelqu'un que nous ne connaissions pas. Un enfant du village. 

Elle posa un petit canotier sur une desserte à côté du fauteuil où elle décida de s'asseoir. Elle dû s'y reprendre à deux fois pour pouvoir se poser sur le siège de manière confortable. Pourquoi faisait-on porter des crinolines si gênantes à des enfants ? Cependant la jeune fille réussit avec un petit sourire embarrassé à s'installer selon sa convenance. 

Son extravagante mère entra dans la pièce. 

- Tout le monde est là. C'est parfait ! Nous allons pouvoir discuter. 

Elle prit place à côté de sa fille après l'avoir couverte de baisers. Les portes et les fenêtres furent fermées et les rideaux tirés. Des bougies furent placés partout dans la pièce pour que nous puissions tous nous voir. Le visage de la jeune fille, tordu par le stress, essayait de se raccrocher à quelque chose, sans résultat. Je comprenais son inquiétude mais nous faisions ça pour son bien. 

- Lève-toi. 

Les paroles froides de sa mère mirent la dame dans un tel état qu'elle fut incapable d'exécuter son ordre. 

- Lève-toi ! 

Surprise, elle sauta de sa place pour reculer un peu plus dans l'obscurité. Sa petite robe à rayures claires rendait ses mouvements  presque éthéré, spectrale. Ses yeux très bleu et très clair indiquait clairement la peur, ses mains tordues aussi. Elle remit son  col marin en place avec l'intention de rediriger son angoisse sur autre chose. Pourtant, il n'y avait rien à craindre. Absolument rien, à mon avis. Mais je pouvais comprendre pourquoi une si jeune fille pouvait craindre une telle situation. Son regard finit par fixer le sol dans l'optique de disparaître. Un petit fantôme inquiet scrutait des visages adultes et froids depuis derrière son siège. Tous les regards se fixèrent sur sa mère. Un sourire presque méchant se dessina sur les lèvres fines de l'extravagante. Elle agita son éventail devant son visage. 

- Voilà, nous allons pouvoir commencer les enchères. 

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