BATMAN - L'As et le Masque, Avant l'histoire

~ 10 ~

Une fois de retour chez lui, Gordon aida ses filles à se préparer pour la nuit. Alors qu'il les bordait avec tendresse, il repensait à sa rencontre avec Wayne ainsi que le plan qu'il avait concocté. Après avoir déposé un baiser sur le front de Barbara et s'être assuré que Coralie dormait à poings fermés, il enfila son manteau, barra la porte du condo à double tour, puis s'engouffra à nouveau dans sa voiture.

Guidé par la lueur laiteuse de la lune, il fila à toute vitesse en direction du commissariat de la ville. Quand il fut enfin arrivé à sa destination, il gravit l'échelle interminable sur le côté de l'énorme bâtiment afin d'arriver sur le toit.

D'une poigne de fer, il tourna le projecteur en acier vers le ciel noirci par la nuit et y projeta le Bat-Signal. Son appel ne fut pas sans réponse : à peine quelques minutes plus tard, le Bat-Plane largua le héros de Gotham sur le toit de l'édifice. Le Chevalier noir atterrit avec grâce auprès du commissaire ; néanmoins, il s'étonna de se retrouver seul en sa présence. Où était l'urgence de cette sollicitation ? À quel danger la métropole était-elle, cette fois, exposée ? Le rouquin passa une main embarrassée dans sa chevelure enflammée : il lui expliqua brièvement qu'il n'était pas question d'un meurtre irrésolu ou même d'un vol, mais plutôt d'une requête personnelle. Voyant qu'il avait piqué la curiosité de son interlocuteur, il lui rappela le sauvetage de Coralie Wayne, puis lui résuma ses événements qui l'avaient suivi. D'une voix plus basse, il lui décrit les soupçons qu'il possédait envers le GCPD : les intrus qui s'y étaient infiltrés collaboraient probablement avec les déclencheurs de l'incendie – et bien qu'il détînt le plan parfait pour les prendre sur le fait, il avait besoin d'une aide extérieure, digne de confiance, pour conclure son enquête. Sans l'ombre d'une hésitation, Batman accepta le rôle qu'il avait à jouer dans l'affaire. Ils voulurent poursuivre leur entretien afin de peaufiner les détails de leur stratagème, mais ils n'en eurent pas l'occasion : malgré la nuit encore jeune, les journalistes et policiers reportaient déjà un cambriolage au Diamond District. Alors que le Chevalier noir, appelé par le devoir, s'évanouissait dans la nuit, James reprit la direction de son véhicule.

Cette fois, il laisserait la situation entre les mains de ses collègues et du gardien qui veillait sur eux. En dépit de la culpabilité qui le rongeait, il retourna chez lui : armé d'une tasse de café tiède et de sa fidèle pipe, il s'assit à son bureau et commença à régler les documents attitrés à son poste.

S'il travaillait suffisamment bien, il pourrait, avec un peu de chance, avoir le temps de suivre les conseils de Pennyworth et faire évaluer le traumatisme de Coralie pour mieux l'encadrer.

🦇 🦇 🦇 🦇 🦇

Le lendemain matin, dès les premières lueurs de l'aube, le rouquin se fit extirper de son sommeil par la sonnerie insupportable de son cadran. En ronchonnant, il arrêta l'appareil infernal, puis se glissa mollement à l'extérieur de son lit.

La nuit avait été pénible, terrible même. Les terreurs nocturnes de la noiraude avaient empiré : ses paroles et caresses ne semblaient plus en mesure de la calmer. C'était sans compter le chauffage de sa chambre qui, sans aucune raison apparente, s'était encore déréglé. Bien qu'il fût parvenu à régler la paperasse qui lui était assignée, il ne se sentait guère plus reposé qu'à la veille – aussi décida-t-il de s'habiller léger et de se réveiller à l'aide d'une bonne tasse de café fumante.

Pendant qu'il dégustait un rôti et lisait le journal du matin, ses deux filles, tirées de leur repos par les rayons du soleil, vinrent bientôt le rejoindre. Si Barbara était rayonnante de bonheur face à cette dernière semaine de vacances, Coralie, quant à elle, traîna les pieds jusqu'à la cuisine où elle se laissa choir sur l'une des chaises en bois.