Chapitre 2) Pendant que nous tergiversons, l'ennemi avance

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- Huit ans... Huit ans déjà, et pas une seule nuit sans que je n'aie pensé à comment j'allais châtier ces impudents ! La voix de Darius devint soudain féroce, l'espace d'un instant tandis qu'il parlait encore de l'intervention athénienne de jadis. Je m'en souviens comme si c'était hier, revoyant les mâts brûlés de leurs navires, leurs boucliers étendus à Milet... Mais tu étais là Artapherne, t'arrive-t-il encore de te souvenir de ce moment ?

- J'étais là Grand roi, commença Artapherne d'une voix assurée tandis qu'il dirigeait son regard le long de la carte murale, jusqu'à la cité de Milet d'où était parti l'insurrection il y a près d'une décennie. Le jour ou Aristagoras avait tenté de faire sécession de la Perse, entrainant tout l'Ionie avec lui. Je me souviens de leurs étranges emblèmes, et de ces guerriers qu'on n'avait encore jamais vus et qui fuyaient comme des lapins, détalant à travers les ruelles, tentant d'atteindre leurs navires. Mais tout cela est terminé mon roi, Milet, l'Ionie, tous aujourd'hui ont ployé et vous jurent fidélité.

La tirade de son neveu provoqua un rictus de la part de Darius.

"Oui tous ploient le genou maintenant, attendant le moindre signe de faiblesse de ma part pour repartir en guerre. Voilà bien pourquoi je me dois de prendre les devants"

Mais ce n'était pas là où voulait en venir le roi des rois.

- Te souviens-tu alors Artapherne, mon neveu. De ce que tu m'as dit ce jour-là ? Alors que les feux de la révolte s'éteignaient et que nos ennemis de la mer repartaient toutes voiles dehors. T'en souviens-tu ? insista le roi des rois.

Artapherne fronça les sourcils un instant.

La révolte de l'Ionie datait d'il y a près d'une décennie, plus de huit ans, comment se souvenir de ce qui avait pu être dit en ce jour ? Parfois il enviait la mémoire et la force de son oncle, toujours aussi vive malgré le poids des ans. Pour autant comment retrouver ce dont Darius voulait précisément qu'il se souvienne ?

C'est en contemplant à nouveau la carte sur le côté qu'il comprit. Car la partie nord-ouest n'y figurait pratiquement pas, celle qui représentait la Grèce.

- Je me souviens mon oncle. De mon inexpérience, n'ayant jamais vu ces guerriers parmi la multitude de peuple et de tribus qui vous servent, des confins de l'inde jusqu'au désert de Libye. Je me suis demandé, je vous ai demandé, "A qui appartiennent ces boucliers et ces navires qui combattent auprès de nos ennemis". Je ne les avais encore jamais vu.

Et le roi des rois d'acquiescer.

- Et te souviens-tu alors Artapherne, mon neveu, de ce que MOI j'ai dit à ce moment.

Cette fois, Artapherne s'en souvenait, il s'en souvenait très bien, car à l'inconnu de la connaissance s'était ajouté la peur de la réponse.

- Vous m'avez répondu ne pas savoir non plus. Ne pas savoir quelle était cette "Athènes" qui venait nous défier. Ne pas savoir d'où il venait, ni la puissance dont il disposait.

Cette fois Darius acquiesça avant d'attraper un nouveau verre rempli de vin qu'il but d'une traite.

- Venaient-ils des Scythes ? D'Indes ? De plus loin encore ? Quel terrible et puissant ennemi sortit de nulle part envoyait ses forces nous attaquer et soutenir les révoltes de l'Ionie. Quel terrible empire se cachait derrière cette frappe... Quand bien même nous les avions repoussés avec aisance et pacifié l'Ionie, la question demeurait troublante, préoccupante...

La dernière phrase du roi des rois resta en suspens quelques instants avant que finalement le général Datis ne reprenne.

- Quel dommage ! A cette époque que les affaires me retenaient ailleurs, j'aurai pu dissiper votre anxiété bien vite mon roi. La Grèce est loin du cœur de l'empire, mais nous qui sommes proches de la mer la côtoyons. Par ailleurs, le tyran Hippias était déjà mon invité à cette époque. J'aurai pu vous dire la vérité...

A la grande gloire des guerres médiques: marathonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant