Inhumains

Incipit

Il courrait, courrait vite, courrait trop vite pour qu'on puisse considérer cela comme un simple footing, il courrait comme si sa vie en dépendait, en fait, disons que sa vie en dépendait.

Il ne comprenait pas comment tout avait commencé mais il avait su, quand il était rentré chez lui après les cours, il y a de cela quelques heures, que quelque chose de grave allait se passer, dans le regard rempli de peur que lui avait lancé sa mère, lui criant un grand ''court'' qui fut entendu même par ses jambes qui se mirent à courir sans regarder derrière lui et pourtant, la distance diminuait peu à peu, il le sentait, il l'entendait.

Au départ, c'était que des pas qu'il arrivait à entendre, beaucoup trop sonné pour entendre les ordres de cette personne, lui priant de s'arrêter sur le champ et pourtant, maintenant il entendait bien distinctement des bruits de sabots tapant contre le bitume, comme si il était en train de se faire courser par des chevaux.

Accélérant donc le pas en les sentant toujours plus proches, il sentait son coeur toujours plus accélérer, son cerveau lui envoyait des morphines qui l'endormaient presque sur place et c'était mauvais, il ne devait surtout pas manquer de temps ou d'attention.

Criant pour se donner de la force, il abandonna son sac en cours de route ainsi que sa veste, ne restant qu'en chemise et pantalon, ses chaussures, de beaux mocassins, le faisaient souffrir, si il avait su que le soir même il serait impliqué dans une course poursuite, jamais il n'aurait mis ces satané chaussures mais voilà, voulant montrer un style différent aujourd'hui, voilà qu'il en payait le prix.

Heureusement pour lui, il avait toujours été un très bon élément en sport, plus particulièrement en course et donc il arrivait à distancer, même de peu, ses ennemis et pourtant, pour la première fois de sa vie, il se dit qu'il allait peut-être perdre une course mais encore si ça avait été une course reglo et qu'il aurait juste manqué un prix, il n'aurait pas autant été stressé que maintenant parce qu'il n'avait pas le droit à l'erreur, il n'avait pas le droit de fauter parce que si autrefois il jouait pour une médaille, maintenant il se retrouvait à courir pour sa vie.

Alors, perdant peu à peu de l'énergie après il ne savait combien de temps à courir, il commença à emprunter dangereusement des petites rues vides, dangereusement parce qu'il pouvait bien tomber sur une rue sans issue, et d'ailleurs c'est là où s'arrêta sa petite course, son périple, sa vie peut-être, là où, avant de sombrer, il eut à peine le temps de remarquer les pattes d'un cheval s'approchant de lui.

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<< c'est quand qu'il se réveille ? >>

Un brouhaha parvint difficilement à entrer dans ses oreilles et parmi celui-ci, il en retint une phrase. Il se sentait courbaturé de partout, il avait un grand mal de ventre et une petite envie de vomir dans le fond, il avait aussi un fort mal de tête qui venait compléter son mal être mental, peur, angoisse, stress, le dernier souvenir qu'il avait était lui qui courait comme un déchaîné dans les rues de Londres et maintenant il était presque mort, entendant des voix dans sa tête. Mais bon, il sentait trop de choses pour être mort.

Essayant de bouger une de ses mains qu'il sentait à peine contre son ventre, il n'entendit plus aucun bruit, comme si les voix dans sa tête s'étaient arrêtées pour l'observer faire. Il essaya de lever le bras mais sentit une aiguille dans celui-ci, il était à l'hôpital ? Quelqu'un l'avait sauvé dans cette rue ? Quelqu'un avait vu les chevaux comme lui ? Il devait ouvrir les yeux pour le savoir, il lui fallait faire un petit effort, il comptait sur son cerveau, lui envoyant du courage alors qu'il commençait doucement et prudemment à papillonner des yeux.

Il tomba sur une grande lumière blanche, lui aveuglant presque les retines, il referma ses yeux pour mieux les ouvrir à nouveau, tombant donc sur cette lumière artificielle, il sentit quelqu'un à ses côtés bouger, sa maman ? Sa famille ?

D'ailleurs en parlant d'eux, qu'étaient-ils devenus ? La dernière fois qu'ils s'étaient vus sa mère et lui, elle lui avait crié de courir sans se retourner, peut-être avait-elle été attaquée par une bande de malfaiteurs, peut-être était-elle en danger à l'heure actuelle ?

Il savait que l'emplacement de sa maison n'était pas anodin, sa mère l'avait éloigné de la ville, elle l'avait éloigné des écoles populaires, le rendant invisible aux yeux des autres et le fils savait que c'était volontaire, qu'elle voulait cacher quelque chose, mais quoi ? Il en avait pris pleinement conscience quand, sans être prudents, sa mère et son père en avaient parlé, ils avaient commencé à dire que certaines personnes les avaient retrouvés et qu'il allait falloir changer encore une fois de ville mais le fils en avait marre, il n'avait jamais le temps de tisser des liens qu'il partait déjà dans une nouvelle ville sans qu'on lui explique la cause sachant qu'étant un grand timide, c'était compliqué pour lui de se faire des amis.

Il avait fait longtemps la tête à ses parents avant de tout oublier, n'ayant pas changé de ville, finalement peut-être qu'ils auraient dû vu ce qu'il s'était passé hier, enfin, il ne savait plus réellement quel jour on était, ayant perdu le fil du temps.

Il espérait juste qu'on répondrait à toutes ses questions bientôt pour qu'il arrête d'être inconnu à tout et qu'il puisse retourner chez ses parents sain et sauf.

___

<< vous vous sentez bien Monsieur ? >>

Faisant face à deux personnes totalement inconnues, le jeune homme rougit avant de bredouiller un petit ''oui'' d'une voix presque muette.

Il se retrouvait face à un grand homme aux cheveux plaqués en arrière avec du gel, il était habillé d'un costard et semblait attendre quelque chose au vu de ses réflexes de regarder sa montre sur son poignet toutes les secondes en espérant que l'heure passera plus vite, il semblait calme mais en même temps si bruyant à l'intérieur, il était très charismatique, dégageant un il ne savait quoi qui le rendait fort, mais, au contraire, il avait cette chaleur, cette douceur dans son regard, il avait aussi un visage très dur, ses traits semblaient fatigués mais aussi très vifs, cet homme était une contradiction à lui-même.

À côté de lui, la personne lui ayant demandé son état, était un docteur, rien de plus normal si il n'y avait pas eu ses yeux, un beau bleu envoûtant, c'était pourtant rare, voire impossible de trouver des asiatiques aux yeux azurs et pourtant, devant lui semblait être une exception à la règle, après les lentilles existaient mais il ne pensait pas qu'elles pouvaient servir même pour les médecins.

Le médecin d'ailleurs commença à lui parler de son état impeccable. Avec une certaine joie dans la voix, il semblait passionné par son métier, très petit mais très grand en même temps, ayant une grande prestance, il semblait inconsciemment s'élever. Il adressa un sourire à la personne à côté de lui qui se contenta de hocher la tête en s'avançant vers le blessé, le prenant de court.

<< tu peux te lever ? >>

Fébrilement, il se leva, manquant de tomber, l'homme à ses côtés le rattrapa presque aussitôt, comme si il avait prédit sa possible chute, et tout deux se dirigèrent vers la sortie de la salle et alors que le jeune homme pensait qu'ils étaient dans un hôpital, ils atterrirent dans de grand couloirs lumineux semblant faits en bois mais le jeune n'y connaissait rien en construction alors il ne savait pas trop si il pouvait confirmer sa pensée, le couloir était grand, et plus il avançait dans celui-ci, plus il croisait des salles, pensant que c'était peut-être des autres salles de l'hôpital, il regarda à travers les fenêtres mais fronça les sourcils en voyant des élèves suivre un cours, il y avait des tables, des chaises et des gens, mais pourtant, au dernier moment, au dernier regard, la classe se changea en quelque chose de plus... Effrayant, passant par de simples élèves à des animaux, du plus petit comme le lapin jusqu'à l'éléphant, il faillit en faire tomber sa mâchoire, détournant le regard.

Il devait sûrement rêver.