Chapitre 14 • Une Soirée des Plus Chaotique

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Face à son regard de merlan frit, je me dis que je me suis peut-être mal exprimée.

— Je veux dire je, je peux aller dans ta chambre.

Une seconde, deux secondes, trois secondes.

Rien, niet, nada. Le silence est de tel.

— Enfin pas spécialement ta chambre, je reprends. Ça pourrait être n'importe quelle chambre !

Cette phrase aurait pu régler tous malentendus si j'avais fait preuve de 99,9% de conviction supplémentaire. Pas étonnant que Merlin ne réponde pas, il préfère de loin me torturer par son silence. L'infime quantité d'espoir qui me reste s'évanouit petit à petit devant ses yeux. Je me vois déjà annoncer mon échec à Kheo et Maoni, eux qui ont travaillé si dur pour en arriver là. Mais le pire reste Kat, celle qui avait tout organisé pour m'assurer un avenir paisible, celle qui s'est chargé de bourrer la gueule de son cher et tendre pour me transmettre son savoir. J'entends déjà le glas de ses représailles au sujet de mon incompétence.

— Tu sais quoi, laisse-tomb...

Comme pour m'empêcher d'en dire plus, le blond me saisit par la main et m'entraîne dans le couloir. J'émerge de mes pensées telle une bouteille à la surface de la mer.

L'espace d'un instant je crois rêver, les cadres dorées qui arpentent les murs défilent sous mes yeux. L'océan y est représenté sous toutes ses formes ; à l'aube par le biais d'un arc-en-ciel de couleur, au crépuscule, scintillant à la manière d'une parure de diamants, par mauvais temps, sous forme de vagues gigantesques. Ma contemplation s'achève lorsque nous atteignons la troisième porte.

Une question.

Il suffisait de lui poser la question.

Je ne peux pas croire que la solution finale de tous mes plans se résume à une simple question. C'est comme si je venais de conclure un combat sur la plus écrasante des défaites, mais que le maître du jeu m'octroyait la clé pour débloquer le prochain niveau.

Je franchis le seuil de la porte.

Malgré l'obscurité de la nuit, sa chambre est baignée de lumière, grâce à l'imposante baie vitrée que traverse le clair de lune. La vue sur la mer est imprenable ; les vagues se jettent sur la plage d'une telle force que l'air y est empli de sel. D'épaisses étagères en bois brut suspendu aux murs jaune soleil, se révèlent sous la clarté du plafonnier. Chacune dispose de ses propres bouquins et babioles en tous genres, dissimulés ici et là, comme de minuscules trésors qui attendent d'être découverts.

Depuis son bureau, Merlin me dévisage. Non pas avec dédain, ce n'est pas son genre. Il me dévisage, ni plus, ni moins. J'étais tellement obnubilée par le fait de me trouver dans cette zone tant convoité que j'en ai oublié de justifier la raison d'une telle demande.

— Mmh, je...

Le blond s'avance afin de réduire à néant la distance qui nous sépare. De son index, il pointe le matelas.

Oula, ça va un peu vite en besogne.

D'un geste prompt, il fait glisser les bretelles de mes ailes en tulle. Je m'apprête à contester, mais voilà qu'il s'attaque à ma couronne de fleurs qu'il saisit avec une telle vivacité que j'ai à peine le temps de riposter. Une fois m'avoir démunie de la moitié de mes accessoires, il se contente de rester planté là, devant moi, sans bouger d'une pouce. Certainement dans l'attente que j'en fasse de même pour lui.

— Écoute, je ne suis pas venue pour euh... Tu sais... j'affirme d'une voix un peu trop aigüe.

J'espère que ce détail ne se résout qu'à ça : un détail.

Blue as the SkyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant