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   J'étais remplie de travail. La saison estivale se rapprochait à grands pas et les défilés se multipliaient. Nous avions un grand nombre de réunions, couvertures, shows et interviews à faire. Mes journées étaient denses et il m'arrivait de rentrer après minuit.

Pour Tobias, la situation était semblable. Ses partielles s'approchaient et des travaux communs de longues haleines étaient demandés.

Il nous arrivait parfois de ne pas dormir dans le même lit tant nous étions tous les deux chargés de travail. Mes seuls temps de poses furent les cafés qu'Édouard m'apportait et les appels rapides de mes amis.

Deux semaines passèrent à cette allure effrénée.

La température se réchauffait malgré les pluies fréquentes. Je commençais à délaisser les manteaux d'hiver et les pulls en grosse laine. J'optais désormais pour des pantalons larges voire pattes d'éléphant et des hauts en maille plus légers.

Le lundi suivant, j'entrais comme à mon habitude dans le hall quand Éveline m'interpella. Elle me fit signe de patienter sur le côté pendant qu'elle téléphonait à quelqu'un. J'obéissais et profitais de ce moment pour la détailler.

Son ensemble des années quatre-vingt mauve ne la rajeunissait pas. Néanmoins, le matière était belle et la couleur, bien que ce ne soit pas ma tasse de thé, correspondait bien à son teint.

Elle salua son interlocuteur et reposa la téléphone sur sa base.

« -Désolée de vous avoir fait patienter...,dit-elle. J'ai reçus une lettre en recommandé pour vous. »

Je la remerciai et montai à mon bureau sans plus attendre. Ma curiosité fut piquée à vif au moment où mes yeux se posèrent sur la mystérieuse enveloppe. Ce type de format n'était pas une lettre professionnelle. Or je n'attendais aucun message de ce genre.

J'entrai dans mon bureau au dernier étage, et m'installai rapidement. Je pris une paire de ciseaux et coupai le haut de l'enveloppe. Je sortai la lettre et vis une lettre écrite à la main.

L'idée que Jules m'avait envoyé autre chose qu'un mail me passa par l'esprit avant que je réalise que c'était complètement idiot.

L'écriture assez grossière me fit penser à quelqu'un qui ne faisait plus parti de ma vie. Je lus son contenu, impatiente.

Ma fille,

J'espère que tu vas bien. Je viens d'apprendre que ta sœur se mariait et j'eus soudainement conscience que j'avais envie de vous revoir tout les trois. Mais j'ai surtout envie de te revoir toi, ma petite préférée !

Je suis à Paris pour les deux prochaines semaines. Que dirais-tu d'une petit café entre père et fille ?Je suis dans un petit hôtel bas de gamme à l'extérieur de Paris. Il n'est pas incroyable, mais c'est tout ce que je peux me permettre. En espérant te voir bientôt.

Ton père, qui pense à toi.

Je dus relire la lettre au moins quatre fois avant de la comprendre. Mon cerveau, malgré les relectures, refusait de se rendre à l'évidence.

Je crus d'abord à une plaisanterie, tant cette possibilité était improbable. Mais en me réalisant que personne n'était au courant de mon histoire à part ma famille, je me rendis à l'évidence.

Mon père, qui avait quitté ma mère quand je n'avais que deux ans, souhaitait désormais me revoir. Après vingt-six ans de silence.

Un tas de questions sans réponses émergea dans ma tête. Pourquoi ? Pourquoi moi ? Et pourquoi maintenant, après tant d'absence ? Comment savait-il que je travaillais à Fashion ?

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