Olivia
Ça devait déjà faire deux heures que j'étais assise dans cette salle immense. L'amphithéâtre était bondé d'étudiants de toutes les races. Je m'amusais à décrypter quelques uns dont les styles attiraient vaguement mon attention — Deux filles qui pouffaient devant un écran portable, plus bas. L'une portait une coupe de cheveux digne de Yara Shididi dans Grown-ish. L'autre, maquillée jusqu'aux oreilles, était presque au bord de l'explosion dans sa robe moulante à imprimé piton, on aurait dit qu'elle l'empêchait de respirer. Je ne suis certainement pas une experte sur la question, mais qui s'habille encore comme ça ! Je remarquai une autre fille qui passait, plutôt mignonne et à la carrure d'athlète. Ça se voyait que c'était une sportive. Baskets, deux ponytails en bazar recouverts par un bandeau vert fluo, t-shirt banal, et un jean qui épousait plutôt bien la forme de ses cuisses parfaitement modelées.
Le brouhaha augmentait au fur et à mesure que les gens arrivaient.
J'étais fatiguée d'être là. Où étaient les professeurs ? Qu'est-ce qu'on foutait là ? C'était donc ça, l'Université?Je tapotais frénétiquement mes doigts sur la longue table-banc qui ne portait que moi pour l'instant. Mes écouteurs aux oreilles, comme à chaque fois que je me retrouve dans un milieu où je ne connais personne, je chantais à voix basse la chanson qui tournait en boucle dans mes tympans depuis plus de trente minutes : Look at me de Xxx Tentacion. Je suis folle de ce chanteur. Dommage qu'il fasse partie de ces gens que j'aime, mais qui m'ont abandonnée trop tôt pour un soit disant "au-delà".
Du coin de l'œil, je remarquai une silhouette masculine statique à l'autre bout du meuble. Après avoir levé la tête, je vis un garçon, de taille moyenne: comme ça lui allait bien, son style street-wear !
Il prît place un peu plus loin de moi sur le même banc, puis fourra à son tour, d'un mouvement presque agressif, des écouteurs dans ses conduits auditifs. Un bonjour n'aurait pas été de refus !
Je m'étais presque oubliée à le dévisager, outrée par la prétention qu'il laissait échapper de sa prestance. Celui-ci ne manqua pas de le remarquer puisqu'il arqua un sourcil en me lançant un regard hautain.
Je détournai furtivement mes yeux pour les plonger à nouveau dans le regard pixelisé de mon smartphone: mon précieux ! Et je tombai net sur un message d'Andie d'il y a une minute.Andie: je suis là. Mais flemme d'entrer, il y a beaucoup trop de monde. Tu es où ?
Je levai la tête vers la sortie pour essayer de repérer ma copine. Et je la vis à la porte, guettant à l'intérieur comme si elle espérait me trouver dans toute cette foule.
Moi: sixième banc, deuxième colonne à l'extrême gauche.
Après avoir lu ce qui devait certainement être mon message, elle se décida enfin à entrer et se dirigeait vers la place que je lui avais indiquée.
Lorsqu'elle ne fût plus qu'à quelques pas, je fis un geste de la main pour qu'elle me remarque immédiatement.
Son visage s'illumina dès qu'elle me vît.— Hey ! S'exclama t'elle.
Le garçon prétentieux au bout du banc se leva pour la laisser passer.
— tu es toute belle!
Ai-je seulement eu le temps d'articuler ces quelques mots, que mon amie se jetta sur moi et me gava de bises — que je lui rendis favorablement. Que faire? j'étais super contente de la revoir, moi aussi.
— c'est toi, la plus belle. Regarde toi! Bon sang, Liv! Ça ne fait même pas encore deux semaines que tu es là et tu jouis déjà de tous les privilèges de la fac.
— arrête de raconter des conneries, j'ai pas changé, répondis-je tout sourire.
Andie émît un rire sarcastique, mais mignon, qui lui était bien propre. Cela signifiait souvent qu'elle disait peut-être la vérité, mais avec un peu d'exagération. Ou bien qu'elle mentait, mais qu'elle avait seulement l'intention de te faire plaisir. Dans ce cas, mon choix était déjà fait.
— et dire que j'ai failli louper ce premier jour de cours... Renchérît t'elle.
— oui, tu n'as pas fini de m'expliquer ça hier. Qu'est-ce qui s'est passé exactement ?
Elle inspira un bon coup avant de souffler désespérément comme si elle venait d'échapper à un rhinocéros furax.
Et c'était reparti pour un tour! Andie en avait toujours, des périples à raconter. Des intoxications alimentaires, aux incessantes disputes avec son petit ami Cédric, en passant par les pertes d'argent et de pièces d'identité. Cette fille, c'était un vrai ouragan à elle seule.Nous nous sommes rencontrées en classe de première. C'était ma première année dans cette ville là. Le cliché de la petite nouvelle timide qui ne veut parler à personne ? C'est exactement ça que j'étais. Puis un jour, le quatrième jour de classe, j'ai vécu ce qui jusqu'aujourd'hui, reste la pire gêne de ma vie.
Pour commencer, j'ai un cycle menstruel très irrégulier. Mais à cette période là, c'était encore pire car j'étais vraiment en stress. Donc, j'attendais mes règles depuis lundi; elles n'arrivaient pas. Le jeudi je me suis dit: « Allez, puisqu'elles ne se pointent pas, autant ne plus gaspiller de serviettes. » et je suis allée en cours sans protection.
La sonnerie retentît. C'était la fin des cours. Les cahiers claquaient, le bruit des fermetures et des scratches énonçaient les sacs qui s'ouvrent puis se ferment, et les élèves s'éparpillaient dans la salle. Je me levai à mon tour et m'apprêtais à sortir, quand mon voisin de banc, un grand costaud à qui je n'avais parlé que deux fois environ depuis, afficha une mine ahurie. Je le regardai d'une façon interrogative.— rassieds toi, chuchotat-il.
Et mon premier réflexe fût de regarder mon derrière.
Oh-Mon-Dieu !
J'avais déposé un cachet géant sur le banc et ma robe bleue était teintée d'un liquide rouge vif — j'avais saigné sans m'en rendre compte.
Je me rassis immédiatement et restai là, comme patientant pour un miracle. Et il arriva finalement.
Andie portait une veste ce jour là. Je l'avais déjà remarquée avant. Elle ressemblait à ces filles qui passent leur temps à parler de maquillage, de fringues et de mecs, même si je la trouvais super jolie: la plus jolie de la classe. J'avoue que je l'enviais un petit peu en plus de la trouver superficielle. En gros, je ne me voyais absolument pas traîner avec elle.
Mais ce jour là, au lieu de m'ignorer comme la plupart de mes "camarades" l'ont fait, ou de se moquer comme le reste, elle m'a tendu sa veste. Je l'ai attachée autour des hanches et j'ai pu cacher la tache, et donc, rentrer chez moi sans attirer l'attention et devenir la risée du lycée en moins d'une semaine.
Et c'est comme ça que nous sommes devenues amies.
Pas très commun, je sais.
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INSAISISSABLE
Roman d'amourOlivia, première année à l'université, emménage avec sa cousine et tombe d'un coup sous le charme de son mystérieux mais séduisant voisin. Ce dernier lui devient dangereusement addictif alors que la jeune femme ne cesse de découvrir à son sujet, des...