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- Ce soir-là, quand Stephen rentra à la maison, j'étais mort de peur. Il retira une bouteille dans son sac qu'il vida d'une traite. Il appela mon frère mais je n'ai pas osé répondre à sa place puisqu'il n'était pas là. Il était alors venu vers moi et me tira de ma cachette, sous mon lit. Il sentait l'alcool et une odeur puante. Il me demanda où était passé William, je lui annonçai qu'il n'était pas là et qu'il ne rentrerait pas de la soirée. Il me prit à la place de mon frère et je ne tardais pas à saigner du nez. Il me tortura beaucoup, ce qui me valut des gémissements.
À cet instant, ma mère fit son entrée dans la chambre, ne comprenant pas encore la situation.

Thierry est à bout de souffle. Je n'aurais imaginé qu'il a vécu une situation aussi cauchemardesque et traumatisante. C'est douloureux ! J'aurais pris la fuite à sa place.

- Tu m'écoutes ? Me demande-t-il

- Oui. Mais tu peux t'arrêter là si tu le souhaites.

- Je souhaite continuer. J'ai envie de libérer tout ça en moi afin d'aller mieux.

- Stephen se tourna vers ma mère pour lui demander pourquoi William n'était pas à la maison et qu'il ne fût pas mis au courant. Il nous rappela qu'il nous a offert une vie meilleure mais pourtant nous ne lui avons jamais manifesté de la gratitude. Car il avait voulu avoir un enfant de ma mère mais elle avait jugé que ce n'était pas nécessaire, elle ne voulait plus enfanter. Alors à cause de cela, il avait promis de nous éliminer tous. J'ai connu la plus grande peur de toute ma vie. Mais heureusement, l'un de nos voisins, vint se présenter à la porte pour demander si tout va bien. Stephen l'avait chassé et j'avais profité de cela pour me munir de son arme à feu. Et quand il était revenu, je lui fis comprendre que je n'allais pas lui laisser la chance s'il osait nous toucher alors il prit la fuite. Mais c'était une fuite passagère.

Il se tait un moment avant d'ajouter :

- Le lendemain, après avoir informé mon frère, nous avons dû laisser de très tôt notre zone de confort matériellement pour nous réfugier quelque part qu'on ignore. Ma mère craignait que Stephen revienne et ce serait la fin de nos jours. On n'avait nulle part où aller car ma mère est fille unique de ses parents et les gens de la famille de mon défunt père n'auraient pas voulu de nous. Nous étions ça et là d'un endroit à un autre, espérant être oubliés par notre bourreau. On a passé trois mois à vivre cette situation peureuse jusqu'au jour où Stephen a téléphoné à ma mère pour nous faire comprendre que même si nous étions dans le sein de la terre, il va nous retrouver pour nous faire payer notre ingratitude. Et William a donc décidé de mettre fin à cette situation qui nous terrifiait tous. Il se privait de tout pour économiser un peu d'argent en vue de payer les services d'un gang, ennemi de Stephen. On l'a mutilé lors d'une soirée chez lui. Mais l'un d'entre eux a dénoncé mon frère à la police, le livra comme meurtrier car l'argent était trop peu d'après lui. C'est ainsi qu'il s'est retrouvé en prison.

- Alors, ton comportement de ce matin est donc lié à tout ça ?

- Oui. Chaque fois que je viens de lui rendre visite, je n'arrive pas à me contrôler car le revoir me rappelle toujours tout ce que notre famille a vécu, il y a quatre ans. Surtout ce traitement inhumain qu'il subit là-bas. Son avenir est gâché. Il venait tout juste des examens du bac lors de son arrestation. Et j'ai dû quitté l'établissement que je fréquentais à cause de ce scandale car mes camarades le connaissaient puisqu'on fréquentait la même école à l'époque. Il aimait beaucoup ses études. Il s'est toujours sacrifié pour nous depuis la mort de mon père car il se considérait comme l'homme de la maison. Le revoir fait déclencher une violente sensation en moi.

- Et pourquoi tu t'es aussitôt calmé quand on t'avait retenu par le bras ? Demandé-je avec curiosité.

- Je suis certain que c'est Woody qui avait proposé ça car il était le seul à le savoir. C'est la seule attitude qui puisse me calmer. Tu le sais, à présent.

- Je comprends. Ça me fait un grand bien de te parler. Je dois rentrer à la maison.

- Tu ne voulais pas plutôt dire que ça te fait du bien de m'écouter puisque c'était moi le narrateur du jour ?

Il sourit.

- Oui, c'est vrai.

- Je dois rentrer, moi aussi. Ma mère doit être morte d'inquiétude en ce moment. Fais attention à toi, Jenny !

- Oui, ce sera fait. Au revoir, Thierry ! À demain !

- Au revoir! Sois prudente !

Ah ! Je n'arrive pas à y croire que Thierry a vécu tout ce qu'il vient de me dire. Il semble tellement fort. Fort !? Oui, il l'est dans son physique. Un type assez grand et une musculature normale.
Alors tous ses bavardages en classe étaient pour lui une façon d'éviter ses vieux démons. Un père décédé. Un beau-père criminel. Un frère en prison. Sa vie n'a été pas facile. C'est si traumatisant !

* *

- J'ai cru devoir me rendre à l'école te chercher ma chérie. Qu'est-ce qui t'as pris tout ce temps ? Il est presque cinq heures.

- Je suis désolée, Papa. Je devais régler une affaire avec un camarade à l'école.

- Et ça va ?

- Oui, c'est réglé. Ça va.

- Maman n'est pas rentrée ?

- Oui, mais elle est sortie à nouveau régler une affaire tout comme toi.

- Ah! Et toi par hasard, tu n'as pas d'affaire à régler ?

Il affiche un grand sourire.

- Non, toutes mes affaires sont déjà réglées pour aujourd'hui.

- Je m'en réjouis pour toi alors.

Il me fait un grand câlin et je me monte dans ma chambre. Avoir une famille est une grande richesse. Une famille unie en plus. Car l'opportunité n'est pas donnée à tous. Il faut donc savoir apprécier leur présence car il y a la mort là...
N'en parlons pas!

Et Si On Se Trompait...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant