Et Si On Se Trompait...

11.

Je m'apprête à désactiver la connexion internet de mon téléphone quand j'entends les pleurs de ma nièce. Elle est réveillée. Je m'attendais à cela. Je me dirige alors immédiatement au salon où elle se trouve dans son berceau. Ma mère n'aimait pas la laisser là-haut toute seule au cours de journée. Je la prends dans mes bras, mais ses pleurs redoublent. Il ne manquait plus que ça!

- Elle a sûrement faim, me crie ma mère depuis la cuisine. Viens prendre son biberon !

Je la dépose un instant dans le berceau et je m'exécute. Ma mère a tout préparé pour elle heureusement. Je prends le biberon rempli de lait et m'empresse de l'apporter à la fille affamée. Elle a bon appétit.

* *

- La finale du concours de génie organisée par l'Académie des sciences se tiendra le 29 Mai prochain, nous annonce M. François à la dévotion. Les cartes de participation sont disponibles au Secrétariat du Collège à un prix raisonnable et elles sont valables pour deux personnes. Je demande à tous ceux qui veulent s'en procurer de contacter Alex Désir de la Terminale, le capitaine de l'équipe qui dressera une liste et vous aurez les cartes afin d'éviter un grand nombre d'élèves au Secrétariat. Les représentants du Collège pour le concours sont priés de me rencontrer immédiatement après la montée du drapeau pour les différentes dispositions.

- Jenny !

- Oui, Clara.

- Tu n'y vas pas à la convocation de M. François ? Me demande une camarade, une fois la dévotion terminée.

- Oui, j'y vais. Je vais d'abord déposer mon sac en classe.

- Je t'attends afin qu'on y aille ensemble.

- D'accord. J'arrive.

Clara et moi sommes les deux élèves à représenter notre classe. Elle est une fille très douée et surtout gentille.

* *

- Je vous remercie tous pour votre présence. Je n'ai pas beaucoup à vous dire mais sachez bien que l'enjeu du concours est de taille. Je vous félicite encore pour votre exploit lors de la demi-finale. Mais ça ne suffit vraiment pas, la troisième place. Si une école doit être championne, je veux bien que ce soit la nôtre ! Vous avez donc intérêt à travailler davantage car je sais que vous pouvez y arriver! Pour la finale, vous pouvez porter le t-shirt du Collège étant donné que ce sera un dimanche. Il n'y a pas de questions ?

Un garçon de la Terminale lève le doigt. C'est le capitaine de notre groupe.

- Oui, Alex. On t'écoute.

- À quelle heure est prévue la finale ?

- À deux heures de l'après-midi. Et tout retard sera sanctionné par le staff organisateur du concours. Nous vous attendons dès une heure pour le déplacement. Je crois que vous avez conscience de ce qui est enjeu.

- Merci.

- Merci à vous. Je vous prie de disposer, à présent.

* *

- Ton poids se stabilise peu à peu et ta santé est bien mieux que la dernière fois, Jenny. N'y va pas trop fort dans tes activités !

Nous sommes aujourd'hui le mercredi 11 Mai et j'avais rendez-vous chez le docteur Chérestal. C'est ma mère qui m'accompagne. À savoir que ma santé va beaucoup mieux est une bonne nouvelle pour moi et j'ai dû régulariser toutes mes activités pour en arriver là : Me coucher à la même heure chaque soir, me détendre beaucoup plus, etc...
Vous vous imaginez comment ça me pose problème de me coucher à la même heure tous les soirs surtout quand il y a un épisode de ma série préférée à régarder, un bon film à la télévision ou encore quand mes conversations téléphoniques prennent une tournure vraiment intéressante. Mais peu importe c'est le résultat de tout ça qui m'intéresse.

Il est vrai que les blessures affectives mettent beaucoup de temps à guérir mais j'ai compris qu'il faut que je passe à autre chose. Sinon je vais mourir moi aussi... Comme on peut se tromper dans la vie !

Je reste songeuse un long moment. J'aurais tellement voulu oublier cette tragédie qui m'a brisée... Je laisse mon esprit vagabonder un peu et pendant un instant j'oublie complètement si je suis à un rendez-vous médical. Et vous n'allez pas croire la personne qui me vient à l'esprit. C'est Thierry ! Le garçon de ma classe. Et tout à coup, j'ai une grave envie de lui parler.

- Jenny !

- Ou...Oui.

Je sors à regret de ma rêverie.

- On y va, ma chérie !

Il est presque neuf heures et nous quittons l'hôpital. Nous prenons un transport en commun pour que je puisse me rendre à l'école, étant donné que j'étais déjà en uniforme.

Aux heures de récréation, à dix heures, je passe un temps fou à chercher Thierry mais je ne le vois nulle part. Il n'est peut-être pas venu à l'école aujourd'hui. Quel cauchemar ! Je suis bien obligée d'attendre demain.

- À quoi penses-tu ?

Venant de la cafétéria, Éliana s'assoit sur un banc à mes côtés. Je juge plus opportun de ne pas répondre à sa question.

- Tu as mis beaucoup de temps, dis-je pour changer de sujet.

- Oui, les élèves se bousculaient beaucoup.

La bousculade à la cafétéria ! Je m'en souviens. C'est à cause de mon anémie  que ma mère m'a épargné cette misère et ça me fait du bien, la boîte à lunch. Mais j'ai quand même la nostalgie de la friture de l'école ou encore des gratinées.

* *

- Belle-maman, Jenny est née au mois de Mai, n'est-ce pas ?

- Oui, mon garçon. Le 29 Mai.

- Je voudrais organiser un festin en l'honneur de Keisha car j'ai envie de célébrer la vie. La vie de celle qui me reste de Sandy. Puisque l'anniversaire de Jenny est pour bientôt, on pourrait organiser une seule fête, n'est-ce pas ?

Je reviens à peine de l'école. Je me déshabille dans ma chambre et j'entends cette conversation qui m'intéresse beaucoup. J'enfile un t-shirt noir et une jupe de la même couleur avant de sortir.

- Oui, ce n'est pas une mauvaise idée, mon grand. Mais pourras-tu répondre véritablement aux impératifs financiers de ce festin ? Jeff et moi ne pourrons pas nous permettre un tel acte en ce moment car notre situation financière...

Ma mère se tait à mon arrivée. Je sais très bien ce qu'elle allait dire et ça me fait de la peine de savoir que je suis la cause de tout ça.

- Ça va, ma belle ?

Elle essaie de détourner la conversation. Et j'entre dans son jeu.

- Oui, maman.

Je salue mon beau-frère et je m'empresse de déplacer.