12/ Une solution ?

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Je reconnais alors les bras d'Erwin qui s'enroulent autour de mes hanches d'une force et d'une douceur que je ne lui connaissait pas. Il me tire d'une traite contre lui et colle son torse contre mon dos, je sens son souffle chaud se déposer sur ma nuque.

- Erwin ?

Je me tourne face à lui, intrigué. Son corps tremble soudainement comme une feuille, des sanglots se font entendre de plus en plus alors qu'il essaie d'articuler.

- Excuse-moi... Je suis désolé...

Je baisse la tête vers lui et c'est moi qui l'encercle dans mes bras, une main plongée dans ses cheveux. Il s'agrippe à moi tandis que ses pleurs sont de plus en plus prononcés, alors je caresse doucement sa chevelure. C'est tellement dur de le voir dans cet état, et encore pire, de savoir que c'est de ma faute. Pourtant il ne cesse de me présenter ses excuses...

- Je te demande pardon...

- Ne t'inquiète pas...

- Je veux juste continuer ma vie avec toi... Rien d'autre...

- Moi aussi, mais la vie en a décidé autrement... Et je ne veux pas passer des mois à l'hôpital, tu comprends ?

- Hm...

Les larmes aux yeux, j'essuie doucement sa joue toute trempée avec mon pouce. Il me fait tellement de peine, j'aurais peut-être dû être plus doux, plus compréhensif moi aussi. Je le console alors dans mes bras plusieurs minutes, mais il pleure toujours, encore et encore sans s'arrêter. Ses sanglots sont de plus en plus brisants à chaque fois.

J'entends alors des chuchotements, puis petits à petits il m'appelle plus distinctement, ses lèvres prononcent mon prénom avec tristesse et désespoir. Sa voix est déchirante et pleine de détresse. C'est trop pour moi, je craque et je fond moi aussi en larme. Je le serre fortement contre moi tout en continuant les caresses sur sa tête. On se serre l'un contre l'autre comme si quelque chose allait nous séparer d'un instant à l'autre, comme si cette étreinte était la dernière, comme un adieu. C'est horrible, jamais je n'ai ressenti une vague de détresse et de nostalgie m'engouffrer ainsi, et en si peu de temps. Tant de souvenirs avec Erwin me reviennent, et en premier lieu notre rencontre. On était si différents à l'époque, et même encore aujourd'hui, que je me demande comment on a fait pour s'entendre aussi naturellement. Plus on passait de temps ensemble, plus cela nous semblait évident. On ne pouvait pas se séparer, comme le yin et le yang : deux oppositions qui se complètent. Pour le moment, la seule chose qui nous lie c'est notre chagrin à tout les deux, la peur de perdre l'autre.

Aucuns mots ne sortent de ma bouche, je n'y arrive pas, on reste ainsi un long moment jusqu'à ce que l'on trouve un apaisement commun. Il y a un instant de silence puis Erwin prend la parole, d'une voix douce et légèrement cassée. Mielleuse mais aussi déchirante.

- J'ai fait des pâtes bolognaise tout à l'heure... Je t'en ai mis dans un tupperware avec un petit mot...

Un ricanement incontrôlé me prend tant Erwin est vraiment adorable. Comment vouloir quitter ce monde sans lui ?

- Idiot...

J'embrasse son nez avec tendresse et le serre fortement contre moi pour l'apaiser, et le remercier. Je l'aime tellement, du plus profond de mon cœur... De mon être tout entier. En échange de cet amour dont je suis incapable de lui transmettre autant de temps que je l'aurais souhaité, je peux peut-être lui offrir la gourmette. Demain sera très bien.

- Aller dors maintenant...

Contre toute attente il s'exécute et s'endort assez rapidement, mais j'en suis incapable. Erwin a ravivé des sentiments que j'avais enfouie pour éviter de souffrir, je ne peux plus me voiler la face. Il est au courant, tout sera différent désormais... Chaque regard qu'il posera sur moi aura un soupçon de tristesse, chaque baiser aura un goût amer de dernier baiser, chaque étreinte ne dira plus "je t'aime" mais "ne pars pas"... Et c'est tout ce que je ne veux pas. Jamais. Mais en même temps je peux le comprendre, j'avoue ne pas avoir essayé de me mettre à sa place une seule seconde. Là, il a l'air tranquillement endormi, mais qu'est-ce qui me dit qu'il a pas juste les yeux fermés ? Qu'il est pas rongé par ce que je viens de lui dire et que d'ici une semaine il aura des cernes bien marquées à cause d'insomnies ? Je me sens horrible, tout d'un coup. Je vivais bien, j'avais une vie qui me plaisait enfin, des rêves, des objectifs...

Rester encore un peu [Eruri] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant