Le royaume d'Atoerrhi : Nina

Chapitre 42 : la robe violette

Khalil était en retard ce soir. Nina commençait à s'inquiéter. Un domestique lui apporta une enveloppe. Il repartit sans dire un mot :

« Vous êtes invité à un diner avec la reine dans la salle du trône. Un couturier viendra vous apporter une robe. »

Le retard de Khalil devint encore plus alarmant. Elle ne voulait pas s'y rendre sans lui.

La porte de sa chambre s'ouvrit rapidement et Ezéo rentra avec un assistant qui trainait une grande malle. Il l'ouvrit aussitôt et blêmit devant une magnifique robe violette.

— Qu'est-ce que tu as ? se soucia-t-elle.

— Khalil n'est pas avec toi ?

— Non, il a dû être retenu à l'entrainement.

— Et Yhana a été envoyé en mission, c'est bien ça ?

Nina confirma. Ezéo se servit un verre et le but d'une traite. Une tension désagréable remonta le long de la colonne vertébrale de la jeune femme.

— Vince, va me chercher ma trousse de couture rouge, demanda-t-il à son assistant.

— Monsieur, s'il y a des retouches vous pouvez le faire avec vos pouvoirs.

— Tu me demandes sérieusement de justifier mes ordres ?

Le jeune garçon tressaillit et partit aussitôt.

— Quand il va revenir, tu lui diras de t'habiller. Il est très doué. De toute façon j'ai créé cette merveille à tes mensurations. Les réglages seront minimes. Elle ne sera pas unie à ta peau comme l'autre fois. J'y ai veillé. Je vais essayer de trouver le général.

Il se dirigea vers la porte. Nina lui bloqua le passage.

— Dis-moi ce qui se passe ? Pourquoi tu t'affoles à la vue de cette robe ?

— Tu me jures de ne pas paniquer ?

Nina hésita. Elle ne pouvait pas lui faire une telle promesse.

— Tu sais très bien que je ne contrôle pas mes crises d'angoisses !

Il voulut la contourner. Mais elle recula jusqu'à la porte et se colla à la poignée pour l'empêcher de partir.

— Le violet chez nous est la couleur du mariage. La reine m'a demandé de te créer cette robe pour rendre ton union avec Khalil officielle pour notre administration. Mais ce soir je doute. Elle a pu me donner cette justification pour que je ne pose aucune question.

— Je... je... ne comprends pas, bafouilla Nina.

Mais la jeune femme voyait parfaitement où le couturier voulait en venir. L'angoisse cheminait déjà insidieusement dans ses veines, comme une main glaciale enserrant son cœur.

— Elle a désigné la malle à mon assistant qui est venu me chercher seulement après, poursuivit Ezéo. Je n'ai pas fait attention à ce que je prenais. J'ai cru à une simple tenue de soirée.

Il prit une profonde respiration avant de terminer :

— Nina, nous en avons emporté qu'une. Le costume de Khalil est resté à l'atelier et de toute façon où est-il ?

— Elle veut... Elle veut me... marier à quelqu'un d'autre ?

— J'en ai bien peur.

Nina suffoqua soudainement. Elle se gratta la gorge par réflexe. Ezéo remplit un deuxième verre d'alcool et lui tendit. Elle refusa.

— Cela va te détendre un peu. Bois.

Elle fit de grand signe de la main et repoussa le verre. Les meubles autour d'eux se mirent à trembler. Le couturier pensa que la reine prenait des grands risques. Nina n'en avait pas conscience. Mais la rage qui l'habitait pourrait raser le château entier.