Chapitre 9

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 Le vestibule était aussi grand que le premier appartement que j'avais loué, une fois partie de la maison familiale. Son sol de marbre blanc amplifiait sa dimension à l'infini et reflétait sur plusieurs commodes et chiffonniers qui le meublaient, une lumière puissante qui aurait pu mettre en évidence la moindre poussière, seulement il n'y en avait pas la moindre trace. Une jeune femme à l'allure plutôt sexy et habillée en soubrette, probablement missionnée de cette propreté immaculée, sortit d'une portée dérobée sous l'imposant escalier au centre de la pièce et accouru vers moi, pour me débarrasser de mon par-dessus et proposa de prendre aussi mon minuscule sac à main, à peine plus grand qu'une pochette de soirée. Je me défis volontiers de ma cape, mais répondis poliment à celle qui s'était présentée sous le nom de Beckie, que je préférais garder mon sac avec moi. Elle acquiesça en souriant et tourna les talons pour aller suspendre mon étoffe, dans un dressing abrité derrière la porte la plus à gauche de l'entrée. Plus rapide que l'éclair, elle revint aussitôt vers nous et demanda à son patron ce qu'elle pouvait faire ensuite pour lui être agréable.

— Les invités ne manquent de rien Beckie ?

— Non, Monsieur ! Tout le monde a du champagne et Madame Orchid les égaye de sa charmante compagnie !

— Bien. Pourriez-vous vérifier que Norma s'en sort en cuisine ?

Bien Monsieur !

Pennybags se tourna vers moi et me contempla avec ce même sourire gêné qu'il avait affiché quelques minutes plus tôt et notant probablement sur mon visage, les interrogations qui grandissaient en moi, meubla la conversation pour éluder mes questions.

— Le dressing permet d'accéder directement au garage, ici à gauche se trouve la salle de billard, puis une salle de bain et les commodités juste à côté, là-bas au fond la cuisine et juste là, à votre droite le petit salon et la salle à manger en enfilade. Au premier étage, se trouve mon bureau, une autre salle de bain, ma chambre et une autre pièce transformée en salle de fitness par ma compagne et les combles abritent également deux autres chambres, dont celle de ma fille lorsqu'elle vivait ici. »

— C'est une bien jolie maison que vous avez là, Mister Pennybags ! Ce lustre de cristal au-dessus de nos têtes, est tout aussi magnifique qu'effrayant !

— Figurez-vous qu'il a été remplacé il y a quelques années ! Lorsqu'on manipule une arme, mieux vaut s'assurer que le cran de sureté soit bien en place, ou alors les lustres vous tombent sur la tête ! Je ris, me demandant soudain si un ou deux cadavres n'avaient pas servi de fertilisant dans le parc. Il me rendit un clin d'œil complice et se racla la gorge avant de prendre, à nouveau la parole.

— Je sais que vous vous posez beaucoup de questions et vous aurez toutes les réponses, mais pour l'heure, il nous faut rejoindre les autres invités, qui se languissent de votre grâce ! Vous êtes d'accord ?

— Après un compliment aussi subtil, saurais-je seulement dire non ! Allons-y !

Satisfait, il ouvrit une double-porte opaque qui donnait sur le « petit salon ». Une très grande pièce au parquet massif qui sentait bon la cire d'abeille et où se mélangeaient boiseries classiques et pièces d'art moderne, comme cet énorme vase incurvé juste à l'entrée. Le plafond était pourvue de corniches aux décors baroques et sur les murs étaient accrochées d'imposantes tentures d'une autre ère, qui rejouaient à perpétuité des scènes d'un goût douteux, où des maîtres blancs frappaient des esclaves noirs endormis dans les cultures ou encore, pelotaient de toutes leurs mains honteuses, des femmes à peau d'ébène à moitié dénudées, qui détournaient leurs yeux tristes de leurs assaillants. Mon regard vint enfin se poser sur les six individus qui me faisaient face et qui avaient cessé leurs mondanités lors de mon entrée dans la pièce, pour se changer en des statues de cire semblables à celles que l'on trouve chez Madame Tussaud. Ils observaient un silence de mort, tandis que leurs yeux rivés sur moi me décortiquaient de la tête aux pieds.

Une Soirée Lourde de ConséquencesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant