Chapitre 15

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Il était un peu plus de dix-sept heures lorsqu'Eleanor franchit la porte de son appartement. Elle avait eu besoin de marcher un peu dans le parc du bout de l'avenue, pour s'aérer et digérer les dernières informations que Martha leur avait transmises à elle et à Cassandra Rose. Cette petite actrice montante de LA qui s'avérait aussi être sa sœur. Sa demi-sœur. C'était beaucoup pour Eleanor...Beaucoup trop. Il fallait qu'elle se débarrasse de cette robe de cocktail, qu'elle la jette ou qu'elle la brûle, même si elle était griffée Versace et qu'elle coûtait une fortune. Il fallait aussi qu'elle prenne une douche, maintenant ! Qu'elle se débarrasse de cette odeur de transpiration, de ses sueurs froides...Des mensonges et des images de son père mort, qui ne la quittait pas depuis la veille. Elle espérait que tout s'en aille avec l'eau savonneuse...Que ça disparaisse au fond de la tuyauterie de la douche.

Mais avant ça, elle voulait un café noir. Un café serré pour sortir du brouillard dans lequel elle s'était réveillée, après trop peu de sommeil.

Évidemment, lorsqu'elle ouvrit les portes du placard au-dessus de l'évier, elle constata sans surprise, mais avec grande déception qu'elle n'avait plus de capsule. C'est comme ça lorsqu'on vit seule et qu'on passe le plus clair de son temps la tête dans le guidon...À bosser pour oublier qu'on est seule...Personne d'autre pour faire les courses. Eleanor consulta la messagerie de son téléphone fixe, qui ne comptait aucun nouveau message...évidemment, hormis des coups de fil professionnels, pratiquement personne ne l'appelait. Encore moins sur cette ligne.

Eleanor se résigna à sa solitude et à ne pas avoir de café, elle ouvrirait une bouteille de vin après sa douche et puis c'est tout. Elle la boirait jusqu'au bout en espérant ne pas vomir, mais s'endormir pour les huit prochaines heures au moins.

En passant dans le couloir qui desservait la chambre à coucher et la salle d'eau, elle se stoppa devant un portrait de famille accroché au mur. Le même que dans la bibliothèque, au manoir. Celui qui avait attiré l'attention de Cassandra la veille au soir.

Eleanor ravala sa salive, écœurée par l'imposture, la supercherie que représentait cette photographie d'une famille tirée à quatre épingles. Une famille modèle en apparence....Il fallait que Monsieur le Maire soit exemplaire ! Quitte à faire placer dans un hôpital psychiatrique sa femme devenue gênante !

Cassandra était la plus à plaindre dans cette histoire effroyable. Elle aurait dû grandir dans du coton elle aussi. Du moins, être à l'abri financièrement et ne pas souffrir de violences physiques, ni même verbales ou psychologiques. Peut-être même que la vie aurait été plus belle, le manoir moins triste et leur mère toujours vivante, si Cassandra n'avait pas été abandonnée. Eleanor s'empara du cadre et le projeta au mur avec toutes les forces qui lui restaient. Il retomba au sol dans un amas de morceaux de verre et de bois qui fît prendre conscience à Eleanor, que sa vie à elle était tout aussi morcelée.

Il fallait qu'elle accuse le coup tout de même, une sœur qui déboule dans sa vie à l'âge de vingt-sept ans. Elle prendrait le temps de s'y faire, mais elle la rappellerait...C'est une promesse qu'Eleanor se faisait à elle-même. Et puis la fille pouvait prétendre à sa part de l'héritage, c'était d'ailleurs bien mérité. C'est ce que sa mère aurait voulu, ça ne faisait aucun doute...Quoique...Eleanor n'avait pas connu sa mère bien longtemps et n'avaient que peu d'informations sur les valeurs et convictions qui la constituaient. Seulement les choses positives que Norma et Georges lui avaient souvent répétées et les quelques adjectifs élogieux que son père avait prononcés devant elle, à deux ou trois reprises. C'était sa faute à lui, si elle avait été privée de mère. La vérité avait fini par éclater...Comme la cervelle de Violet, qui avait servi d'airbag à Minerva...euh...Fey.

Une Soirée Lourde de ConséquencesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant