V. Libérée

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Nous sommes en cours de maths, le dernier cours de la matinée. Les cours précédents passèrent à une lenteur impressionnante. Les secondes étaient des minutes, les minutes des heures et les heures semblaient se multiplier par deux.
En maths, je ne suis pas les instructions du professeur. Mégane essaie d'attirer mon attention mais je l'ignore. J'ai besoin de réfléchir à la façon dont je vais leur annoncer mon départ. Comment réagiront-ils ?
Mégane me regarde encore avec insistance. Je fais donc semblant d'être absorbée par la complexité de l'exercice. Quelques instant après, elle se lassa et tourna la tête pour faire la discussion avec sa voisine.
L'heure se déroula dans le bruit. Le professeur criait, les élèves lançaient des projectiles et moi je restais là sans rien faire, envahi par mes pensées.
À la sortie des cours, Mégane me racontait des choses dont je ne captais pas le sujet. Je hochais la tête, souriais bêtement et faisais des "hum hum" et des "oui oui". Elle ne remarquait rien et c'était mieux comme ça.
On était externe donc on quitta le lycée pour aller rejoindre nos amis dans un petit restaurant où on avait l'habitude de se rendre. Il fallait que je me lance une fois pour toute. J'appréhendais leur réaction.
Tout le monde parlait, rigolait. Je raclai ma gorge pour ensuite continuer :
- J'ai quelque chose à vous dire.
Aucune réaction. Nos plats étaient arrivés et ils mangeaient tout en discutant la bouche pleine.
Je réessayai mais cette fois-ci bien plus fort :
- J'ai quelque chose à vous dire. Écoutez moi !
Tous leurs regards interrogateurs étaient braqués sur moi. Je n'allai pas par quatre chemin :
- Je... Je vais déménager. Bientôt. Dans cinq mois.
Alysse fit tomber sa fourchette. Mégane regardait dans le vide, les yeux livides. Steeve avait la tête penchée en avant, la bouché béante. Mike lui, clignait des yeux en me regardant. Le rouge me monta aux joues. Le menton de Mégane commença à trembler et j'eus tout de suite envie de pleurer mais je voulais me justifier :
- Mon père va devenir proviseur dans un lycée privée, à Paris. Dans le 16ème arrondissement, je crois. Vous savez très bien que je veux rester ici mais je n'ai pas le choix. Mes vieux m'y obligent. On se verra toujours,comme d'hab', en dehors des cours...
Un long silence pesant s'installa. De plus en plus pesant.
Mike coupa en premier ce silence :
- Ouais, on se verra t'inquiètes. Dur, tu vas devoir mettre un uniforme et tout ça. Mais le plus dur se sera de trouver des personnes aussi cool que nous et ça, crois moi, tu pourras chercher tu ne trouveras jamais.
Tout le monde rit. La tension qu'il y avait eu, a maintenant disparue. Je leur racontait que j'habiterais dans un appartement plutôt grand. Alysse m'a prévenu qu'elle viendrait me voir pour aller faire du shopping. Mégane n'a pas dit grand chose, elle jouait avec sa nourriture.
J'espère que notre amitié ne sera pas gâchée par la distance. Plein de filles aimeraient être sa meilleure amie et quand je ne serai plus là, la place sera en quelque sorte libre. Un frisson me parcouru le dos. Je préférai ne pas y penser.
On régla nos commandes et on quitta le lieu pour reprendre nos cours de l'après-midi.
Mégane avait retrouvé sa bonne humeur et enchaînait les blagues. J'étais libérée que mes amis prennent bien l'idée que je déménage. Après tout, on se verra toujours autant et tout ira bien. Non?

La Rebelle du 16ème arrondissementOù les histoires vivent. Découvrez maintenant