Le nom du chapitre est explicite : mention légère de deuil et de la mort. Si vous souhaitez un rapide résumé du chapitre pour ne pas avoir à le lire, contactez-moi en message privé ou commentaire.Il se tenait là, droit, rigide, devant les six cercueils recouverts d’un drapeau aux couleurs du ministère de la Magie. Six Aurors décédés en mission. Il n’avait pas flanché en entendant la nouvelle. Ni en prévenant les familles. Mais dans l’intimité de la morgue de Ste Mangouste, il se laissait aller.
Il connaissait ses Aurors. Il en avait formé la plupart, les plus jeunes, avait évolué avec ceux de son âge, avait dirigé les autres, savait comment ils travaillaient. Il les avait écouté. Il s’y était attaché.
Quelques pertes avaient toujours été à déplorer au bureau des Aurors. Une seconde d’inattention pouvait être fatale, Harry l’avait appris à ses dépends (l'infirmière du ministère avait dû renoncer à tous congés lorsqu'il avait commencé à travailler sur le terrain). Mais jamais, sauf lors des guerres des Sorciers, plus de trois ou quatre morts avaient été recensées en même temps, sur une même mission. Les Aurors suivaient un entraînement dur, intensif, long et complet pour limiter les accidents. Les cinq ASPIC demandés pour commencer la formation ne servaient pas seulement à faire joli sur le papier, c'était une barrière supplémentaire entre leur métier et la mort.
Si autant étaient morts cette fois-ci, c’était que c’était prémédité. Harry en était sûr, une enquête avait même été ouverte à sa demande. Quelqu’un en savait autant que lui, pouvait prétendre pouvoir tuer les meilleurs duellistes d’Angleterre, les attirer dans un guet-apens. Cette idée le révoltait.
Plusieurs années de guerre et des centaines de morts n’avaient pas suffit. Le mal était toujours là, quelque part. Et six hommes de la juste cause avaient péri.
Il avait recueilli les larmes des femmes éplorées, avait réconforté des enfants hébétés, avait vu des mères en colère lorsqu’il avait dû annoncer la triste nouvelle aux proches des disparus.
On lui avait demandé de prononcer l'oraison funèbre, ce que certaines familles avaient très mal pris. Parce que ces personnes étaient mortes pour la communauté magique, les corps n'avaient pu être rapatriés chez les proches, et leur enlever ce droit, en plus du reste, les avaient froissées.
La presse avait fait des victimes des martyrs. Harry se demandait si c'était ce qu'elles auraient voulu. Et bien sûr, de manière sous-jacente, on l'avait tenu responsable de l'affaire. Ses opposants étaient de plus en plus nombreux avec le temps.
Il restait trente minutes avant le début de l’hommage. Quelques heures avant leur enterrement. Les personnes dépêchées par le ministère pour y ramener les cercueils ne devraient pas tarder.
Hermione l’attendait derrière la porte, qu’on pouvait distinguer dans le coin droit de la pièce. Il repoussait le moment où il devrait croiser son regard.
Harry se détourna des cercueils et passa finalement la porte de la salle. Hermione l’étreignit sans un mot, elle n’en avait pas besoin. Elle le comprenait mieux que quiconque après Ginny.
Vingt-quatre homme en noir s’avancèrent dans le couloir blanc de Ste Mangouste sans leur prêter attention. Hermione le lâcha doucement.
— C’est l’heure, annonça-t-elle simplement. Tu as ton discours ? Tu es prêt ?
— Oui.
Non, pensa-t-il pour lui-même. Je ne suis pas prêt. Je ne veux pas leur faire face…
Mais elle le prit par la main et le fit transplaner au ministère, dans son impeccable bureau. Elle y déposa sa veste, dévoilant une longue robe noire. Un chapeau mauve, orné de la boucle réglementaire du sigle du ministère – deux "M" entrecroisés – complétait le tout.
— Il y aura la presse et les familles, avec quelques éminents membres de la sorcellerie. Le ministre apparaîtra à la fin. Sois naturel, c’est le principal. Et redresse ta cravate, tu ne fais pas sérieux. N’oublie pas le col de ta chemise…
Harry suivit ses conseils. Mieux valait l’écouter.
Elle entrouvrit la porte de son bureau, qui donnait sur une salle d'attente, et des murmures leur parvinrent.
— Tout va bien se passer.
Elle passa la salle d'attente. Après la guerre, Hermione était retournée à Poudlard pour faire sa septième année d'études. Elle s'était ensuite lancée dans une carrière au ministère. Elle avait commencé au service du Contrôle et de la régulation des créatures magiques, où elle avait montré sa loyauté et son sérieux. Puis, certaine du nouveau sort qui attendait les Elfes de maison, elle avait demandé à muter. Voyant son potentiel (et son curriculum vitæ) on lui avait inventé un métier : elle était maintenant Responsable de la Liaison Inter-Départements. Autrement dit, elle s'occupait de la communication qui concernait les différents départements, et de ce qui restait, ou non, au ministère. De par cette fonction, elle avait été chargée d'annoncer à la presse l'échec de la mission.
Harry la suivit dans un couloir recouvert de moquette, jusqu’au grand hall.
Il était rempli. Tous les employés étaient là, avec la famille des défunts. Harry fit de son mieux pour ne pas croiser leurs regards.
Hermione monta sur l’estrade qui avait été aménagée au fond du hall. Harry la suivit, et se positionna entre Lyla Ward, sa secrétaire, et Jeremy Witt, le ministre de la Magie.
Lyla portait un tailleur noir et un chemisier blanc, comme à son habitude. Ses cheveux blonds étaient retenus en arrière par une demi-queue, et son nez retroussé dévoilait de discrètes taches de rousseur. Quant au ministre, il arborait une magnifique robe d’apparat noire qui accentuait ses cheveux poivre et sel et son visage carré.
Hermione se lança un Sonorus.
— Bonjour à tous. Nous sommes aujourd’hui réunis pour rendre hommage aux Aurors Helen Findley, Edward Hernandez, Keith Butler, Paul Thomas, Christian Perales et John Carroll. C’étaient une femme et des hommes d’exception, dévoués à la cause de leur pays…
Pendant ce temps, les hommes du ministère avancèrent dans l’espace laissé libre entre les rangées de chaises en portant les cercueils.
Le discours d’Hermione lui parut extrêmement long. Il s’avança ensuite et lut le texte que Ginny lui avait soigneusement préparé, puis ce fut aux familles (dont les larmes coulaient abondamment) de s’exprimer. Les cercueils furent emmenés, suivis par la foule, afin qu’il ne reste que les journalistes.
— Mr Potter, un mot sur ces pertes ?
— Mr Potter, c’est la première fois qu’autant d’Aurors sont perdus dans une mission. Quel en est la cause ?
— Mr Potter, le ministère est-il toujours apte à assurer la sécurité des sorciers anglais ?
Les questions fusaient de toute part. Harry les fit taire en levant un bras.
— Tout ce que je suis autorisé à dire, c’est qu’une enquête approfondie va avoir lieu, pour appréhender le ou les coupables. Merci de votre compréhension.
— Mr Potter, pouvez-vous…
Le journaliste – qui travaillait pour Sorcière Hebdo – fut poussé comme ses collègues par les vigiles du ministère pour rejoindre la sortie.
Mais Harry s’était déjà éclipsé pour rejoindre le bureau d’Hermione, à deux pas, d’où il pourrait rentrer chez lui via Cheminette.
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Magie en grève
FanficHarry ne s'était jamais vraiment posé de questions sur son métier. Être Auror lui était venu naturellement, malgré les risques et sa famille qui s'était agrandie pendant toutes ces années. Famille tenue dans le noir concernant la Deuxième Guerre sor...