Chapitre 13

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Pour la troisième fois en moins d'un mois, Leonard entra dans le poste de police d'Atlanta. Seulement cette fois, il n'était pas seul. Il poussait le fauteuil de Jim, qui, la tête baissée, triturait ses mains sans arrêt. Depuis l'incident de la veille, il n'avait pas ouvert la bouche, enfermé dans un mutisme qui rendait déjà son père malade. Mais aujourd'hui, il devrait parler, raconter, expliquer, et Leonard ne pouvait s'empêcher de craindre son état à la fin de l'audition.

L'officier en poste à l'accueil sembla les reconnaître, puisqu'avant même qu'ils ne se présentent, il fit un signe en direction du couloir derrière lui.

« Monsieur Joshi vous attend, affirma-t-il.

— Bien, merci beaucoup, » répondit Leonard, un peu surpris.

L'homme hocha la tête et les deux visiteurs reprirent leur route. Ils traversèrent le long couloir et arrivèrent face à la porte ouverte du bureau du commissaire. Leonard toqua presque timidement contre le mur après avoir jeté un rapide coup d'œil à l'intérieur et l'homme aux traits indiens leva la tête vers eux, son large souvenir avenant plaqué au visage.

« Messieurs McCoy, venez, entrez ! »

Il se précipita de l'autre côté du bureau pour enlever l'une des deux chaises et Leonard entra en poussant Jim, qui n'avait toujours pas levé la tête. Il positionna le fauteuil à la place vacante et s'assit sur la chaise à côté. Il tourna la tête vers son fils, et remarqua enfin qu'il se mordait les lèvres jusqu'à s'arracher des lambeaux de peau. Joshi aussi semblait l'avoir remarqué, puisqu'après s'être rassis, il ne dit pas un mot, son regard fixé sur le garçon.

Leonard se laissa glisser de sa chaise jusqu'à être accroupi près de lui, posa une main sur l'accoudoir du fauteuil, l'autre sur la cuisse de Jim qui sursauta au contact.

« Jim, Boy, est-ce que ça va ? »

Jim haussa les épaules sans lever la tête, mais son père en décida autrement et remonta son visage pour qu'il le regarde. Pour ce qui lui sembla être la centième fois depuis qu'il avait retrouvé son fils, il passa son pouce sur ses lèvres et les libéra de l'emprise de ses dents. Une fine goutte de sang s'en échappa et il la rattrapa du bout du doigt avant de l'essuyer sur son bras. Jim essaya de baisser la tête mais la prise de Leonard sur son menton était trop forte et il baissa uniquement les yeux.

« Jim, regarde-moi, s'il te plaît, demanda Leonard en sortant un petit pot de sa poche. Si tu n'es pas bien, on peut reporter, tu le sais.

— 'doit pas, croassa-t-il en réponse.

— Arrête de dire ça, grogna son père en étalant un baume sur ses lèvres. Le commissaire t'a bien dit que ça peut attendre encore un peu si tu ne peux pas le faire pour l'instant.

— Je veux le faire, murmura Jim alors que ses yeux s'emplissaient à nouveau de larmes. Je veux oublier. »

Leonard soupira et hocha la tête en terminant d'appliquer la crème. Il se redressa ensuite et embrassa le front de Jim avant de se rasseoir.

« Bien, Boy, mais si ça ne va pas-

— Oui, on arrête, soupira Jim. Je sais. »

Leonard était un peu gêné de se faire couper ainsi par Jim mais n'en dit rien, sachant très bien à quoi il faisait référence. Son insistance de la veille, avant la douche, avait sûrement été excessive, mais il ne pouvait s'empêcher de s'inquiéter.

Jim porta son regard sur Joshi, qui l'attendait, clairement dans l'expectative. Il avait sûrement suivi toute la conversation entre les deux hommes mais il n'en dit rien.

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